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Conscription En Israël : Tensions Avec Les Ultra-orthodoxes

En Israël, la conscription des ultra-orthodoxes provoque une tempête. Entre exemptions historiques et guerre à Gaza, le pays est-il au bord d’un nouveau conflit interne ?

En plein cœur d’une guerre qui secoue la bande de Gaza depuis octobre 2023, une autre bataille, bien plus intérieure, fait rage en Israël. La question de la conscription militaire des juifs ultra-orthodoxes, ou haredim, divise profondément la société. Pourquoi cette communauté, qui représente 14 % de la population juive du pays, refuse-t-elle de servir sous les drapeaux ? Cet article plonge dans un débat brûlant, mêlant tradition, politique et tensions sociales, qui pourrait redessiner l’avenir d’Israël.

Un Conflit Ancré Dans L’histoire

Depuis la fondation de l’État d’Israël en 1948, les haredim, ou « craignant Dieu », bénéficient d’une exemption militaire unique. Cette mesure, instaurée à l’époque pour une poignée d’étudiants religieux, permet aux hommes ultra-orthodoxes de se consacrer à l’étude des textes saints dans les yeshivas, des écoles religieuses. À l’époque, cette exemption concernait quelques centaines de personnes. Aujourd’hui, avec près de 1,3 million d’ultra-orthodoxes en Israël, environ 66 000 hommes en âge de servir échappent à l’armée. Ce privilège, autrefois accepté, est désormais au centre d’une polémique nationale.

La société israélienne, marquée par des décennies de conflits, voit le service militaire comme un devoir sacré. Pourtant, l’exemption des haredim crée un sentiment d’injustice, particulièrement en temps de guerre. Depuis l’attaque du Hamas le 7 octobre 2023, qui a déclenché une offensive militaire d’ampleur à Gaza, la question est devenue explosive. Comment justifier qu’une partie de la population soit dispensée de défendre le pays alors que d’autres risquent leur vie ?

Une Réforme Qui Bouscule Les Traditions

Début juillet, l’armée israélienne a annoncé l’envoi de milliers d’appels à la conscription aux jeunes ultra-orthodoxes. Cette décision marque un tournant historique. Jusqu’à récemment, les gouvernements successifs ont évité de s’attaquer frontalement à cette exemption, par peur de froisser les partis ultra-orthodoxes, piliers de nombreuses coalitions politiques. Mais la Cour suprême israélienne, dans les années 2000, a remis en question cet arrangement, jugeant qu’il violait le principe d’égalité.

« Les autorités vont faire face à un judaïsme ultra-orthodoxe mondial uni et luttant pour son âme. »

Un rabbin influent

Cette citation, relayée par un quotidien de référence, illustre la gravité de la situation. Les leaders religieux ultra-orthodoxes perçoivent cette réforme comme une menace existentielle à leur mode de vie, centré sur l’étude religieuse. Pour eux, la conscription n’est pas seulement une question pratique : elle remet en cause leur identité même.

Une Société Divisée Face À La Guerre

La guerre à Gaza, qui dure depuis près de 22 mois, a exacerbé les tensions. Alors que des milliers de soldats israéliens sont mobilisés, seuls 2 % des haredim répondent positivement aux appels de l’armée, selon des chiffres officiels. Ce faible taux de participation alimente la frustration d’une population qui se sent inéquitablement sollicitée. Les familles des soldats, les réservistes et même certains politiciens estiment que l’exemption est un luxe que le pays ne peut plus se permettre.

Pour mieux comprendre cette fracture, voici quelques chiffres clés :

  • 14 % : Part des ultra-orthodoxes dans la population juive d’Israël.
  • 66 000 : Nombre d’hommes haredim en âge de servir exemptés.
  • 2 % : Pourcentage d’ultra-orthodoxes s’engageant volontairement dans l’armée.
  • 1948 : Année où l’exemption a été instaurée pour les étudiants des yeshivas.

Ces chiffres mettent en lumière l’ampleur du défi. La société israélienne, déjà sous pression, doit composer avec un fossé grandissant entre ses différentes composantes.

Un Équilibre Politique Fragile

La question de la conscription a des répercussions bien au-delà des casernes. Elle menace directement la stabilité du gouvernement israélien. Les deux principaux partis ultra-orthodoxes, jadis alliés du Premier ministre, ont quitté la coalition, exigeant une loi qui pérenniserait l’exemption. Sans leur soutien, la coalition au pouvoir risque de s’effondrer, rendant la situation encore plus précaire.

Un événement récent illustre cette fragilité : la destitution du président de la commission parlementaire de la Défense, un membre du parti du Premier ministre, pour avoir soutenu une loi imposant des sanctions aux déserteurs ultra-orthodoxes. Ce limogeage montre à quel point le sujet est politiquement sensible.

Manifestations Et Résistance

La résistance des haredim ne se limite pas aux déclarations. Des manifestations, parfois violentes, ont lieu régulièrement, notamment à Jérusalem. Certains groupes radicaux brandissent des slogans comme « Plutôt mourir que de s’engager », exprimant leur refus catégorique de rejoindre l’armée. D’autres leaders religieux vont plus loin, incitant leurs fidèles à quitter le pays si l’exemption n’est pas maintenue.

Ces manifestations ne sont pas anodines. Elles pourraient ouvrir un nouveau front de tensions internes, alors qu’Israël est déjà engagé dans un conflit externe. Si les anciens partis alliés du gouvernement rejoignent ces protestations, les autorités pourraient se retrouver face à une crise sans précédent.

Vers Une Redéfinition De L’identité Israélienne ?

Ce débat dépasse la simple question de la conscription. Il touche à l’essence même de l’identité israélienne : comment concilier modernité et tradition, égalité et particularismes culturels ? Les ultra-orthodoxes, attachés à leur mode de vie centré sur la religion, se sentent menacés par une société qui exige d’eux une contribution militaire. De l’autre côté, la majorité des Israéliens voit dans l’exemption une injustice criante, surtout en temps de guerre.

Pour résoudre ce conflit, plusieurs pistes sont envisagées :

  1. Maintien partiel de l’exemption : Une solution pourrait consister à limiter l’exemption aux étudiants les plus dévoués des yeshivas.
  2. Service civil alternatif : Proposer aux haredim des formes de service non militaire, comme des missions humanitaires.
  3. Sanctions renforcées : Imposer des pénalités financières ou juridiques aux déserteurs, bien que cela risque d’attiser les tensions.

Chacune de ces options comporte des risques. Une réforme trop brutale pourrait provoquer une rupture définitive avec la communauté ultra-orthodoxe, tandis qu’un statu quo prolongé alimenterait le ressentiment du reste de la population.

Un Défi Pour L’avenir

Le débat sur la conscription des ultra-orthodoxes n’est pas qu’une question militaire ou politique. Il reflète les tensions d’une société en quête d’unité face à des défis internes et externes. Alors qu’Israël continue de naviguer dans une période de turbulences, la manière dont ce conflit sera résolu pourrait redéfinir les équilibres sociaux et politiques du pays pour les décennies à venir.

La communauté internationale observe avec attention. Une crise interne majeure pourrait affaiblir Israël à un moment où sa stabilité est cruciale. Reste à savoir si le gouvernement parviendra à trouver un compromis acceptable pour toutes les parties, ou si ce différend marquera le début d’une fracture plus profonde.

Aspect Détails
Population ultra-orthodoxe 14 % de la population juive (1,3 million)
Hommes exemptés Environ 66 000
Participation militaire 2 % des ultra-orthodoxes
Contexte Guerre à Gaza depuis octobre 2023

En attendant, les rues de Jérusalem risquent de continuer à vibrer au rythme des manifestations. Le futur d’Israël, entre unité et division, se joue peut-être dans ce bras de fer entre tradition et modernité.

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