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Conflits à Gaza : Le Hamas Face aux Groupes Armés

À Gaza, le Hamas lutte pour reprendre le contrôle face à des groupes armés et clans rivaux. Qui domine ce chaos ? Découvrez les enjeux d’un conflit explosif...

Dans les ruelles poussiéreuses de Gaza, un cessez-le-feu fragile a à peine été instauré que des affrontements éclatent. Le Hamas, figure dominante du territoire, s’engage dans une lutte acharnée pour reprendre le contrôle face à des groupes armés hétéroclites. Mais qui sont ces factions qui défient l’autorité du mouvement islamiste ? Entre clans familiaux, organisations criminelles et combattants opportunistes, la bataille pour le pouvoir à Gaza révèle des dynamiques complexes, marquées par des violences brutales et des enjeux stratégiques.

Une lutte pour le contrôle dans un territoire fracturé

Depuis l’entrée en vigueur du cessez-le-feu le 10 octobre 2025, le Hamas n’a pas tardé à agir. Avec sa branche armée, les Brigades Ezzedine al-Qassam, le mouvement cherche à réaffirmer son emprise sur les zones récemment libérées par le retrait des forces israéliennes. Ces affrontements, parfois longs de plusieurs heures, ont déjà causé des dizaines de blessés et de morts. Mais au-delà des combats, c’est une lutte pour la légitimité et l’influence qui se joue, dans un territoire où la population, épuisée par des années de conflit, observe avec méfiance.

Les adversaires du Hamas : un mélange hétérogène

Les groupes armés qui s’opposent au Hamas sont loin d’être homogènes. Certains, comme les Tarabin, Heles ou Doghmoush, sont des clans familiaux profondément enracinés dans la société gazaouie. D’autres s’apparentent à des organisations criminelles, vivant de l’extorsion, du trafic de drogue ou des enlèvements contre rançon. Enfin, il existe des factions hybrides, mêlant loyautés familiales et activités illégales. Cette diversité rend la tâche du Hamas d’autant plus ardue, car chaque groupe a ses propres motivations et ressources.

Parmi ces factions, la Force Populaire, dirigée par Yasser Abou Shabab, un criminel évadé de prison pendant la guerre, se distingue. Ce groupe, qui appelle ouvertement à renverser le Hamas, a gagné en notoriété, mais reste loin de rivaliser en influence. D’autres leaders, comme Rami Heles à l’est de Gaza-Ville, Ashraf al-Mansi au nord, ou Hossam al-Astal à Khan Younès, dirigent des groupes similaires, souvent perçus comme des organisations mafieuses.

« Ces groupes n’ont pas la légitimité du Hamas. Ils sont vus comme des pillards par la population, souvent associés à des collaborations avec Israël », explique Tahani Mustafa, chercheuse à l’ECFR.

Le rôle trouble d’Israël dans l’équation

Un élément troublant est apparu en 2025 : Israël a admis avoir soutenu certains de ces groupes armés, sans préciser lesquels. L’objectif ? Affaiblir le Hamas, qui reste une menace stratégique pour l’État hébreu. Cette révélation alimente les soupçons de collaboration entre certains groupes criminels et Israël, ce qui nuit gravement à leur crédibilité auprès des Gazaouis. Pour la population, la légitimité repose sur la résistance à l’occupation, une valeur incarnée par des mouvements comme le Hamas, le Fatah ou le Jihad Islamique.

Cette stratégie israélienne, bien que tactiquement compréhensible, semble avoir des effets limités. Les groupes soutenus manquent de cohésion et de popularité. Comme le souligne Tahani Mustafa, « la Force Populaire n’a ni l’équipement, ni la puissance économique, ni l’influence nécessaire pour rivaliser avec le Hamas. La majorité des Gazaouis les rejette ».

Les opérations du Hamas : répression et amnistie

Face à cette montée des tensions, le Hamas a adopté une double stratégie : répression brutale et offres d’amnistie. L’unité Radaa (« Dissuasion » en arabe), créée récemment pour lutter contre la criminalité, a déjà récupéré plus de 300 armes depuis le début du cessez-le-feu. Parallèlement, des opérations musclées ont été menées, notamment contre la famille Doghmoush à Gaza-Ville et la Force Populaire près de Rafah. Ces raids ont parfois donné lieu à des scènes choquantes, comme l’exécution publique de huit membres du clan Doghmoush, des images qui ont rapidement circulé sur les réseaux sociaux.

En parallèle, le Hamas propose une amnistie aux groupes prêts à rendre leurs armes. Cette approche vise à désamorcer les tensions tout en consolidant son autorité. Selon des sources proches de l’unité Radaa, cette stratégie a permis de désarmer plusieurs factions, bien que les groupes criminels les plus endurcis restent réfractaires.

Chiffres clés des affrontements :

  • Plus de 300 armes saisies par le Hamas.
  • Dizaines de morts et blessés dans les combats.
  • Centaines, voire milliers de membres dans les groupes armés.

Les unités spécialisées du Hamas

Pour contrer ces menaces, le Hamas s’appuie sur des unités spécialisées. Outre Radaa, l’unité Sahem (« Flèche » en arabe), créée en 2024, cible principalement les pillards et les collaborateurs présumés. Cette unité est connue pour ses méthodes expéditives : tirs ciblés, fractures des jambes ou passages à tabac avec des matraques en fer. Selon Nasser Khdour, chercheur à l’ACLED, « Sahem applique des punitions sévères, parfois des exécutions sommaires, pour envoyer un message clair ».

Ces méthodes, bien que brutales, visent à restaurer l’ordre dans un territoire où le chaos menace. Le Hamas, qui affirme ne plus vouloir administrer directement Gaza, cherche avant tout à regagner en popularité auprès de la population. En luttant contre les pillards et les criminels, le mouvement espère se poser en garant de la stabilité.

Clans familiaux et réseaux de contrebande

Outre les organisations criminelles, les clans familiaux jouent un rôle clé dans la dynamique des affrontements. Ces groupes, comme les Doghmoush ou les Tarabin, comptent des centaines de combattants et disposent de vastes stocks d’armes, souvent acquis par des réseaux de contrebande liés au Sinaï égyptien. Pendant la guerre, ces clans ont profité du désordre pour s’enrichir grâce à des activités illégales, renforçant leur influence.

Certaines familles ont cependant accepté l’amnistie proposée par le Hamas, préférant éviter une confrontation directe. D’autres, comme les Doghmoush, ont résisté, entraînant des raids violents. Ces tensions soulignent la difficulté pour le Hamas de gérer un territoire où les loyautés familiales et les intérêts criminels s’entremêlent.

« Les clans familiaux sont à la fois une force et une menace. Leur influence repose sur des réseaux anciens, mais leur implication dans des activités criminelles les fragilise », note Muhammad Shehada, analyste à l’ECFR.

Un équilibre fragile à Gaza

Le cessez-le-feu, bien que bienvenu, reste précaire. Les affrontements entre le Hamas et les groupes armés risquent de compromettre cette trêve, déjà fragile, avec Israël. En qualifiant ces factions de « hors-la-loi », le Hamas cherche à délégitimer ses adversaires tout en renforçant son image de protecteur de la population. Cependant, la brutalité de ses méthodes, comme les exécutions publiques, pourrait aliéner une partie des Gazaouis, déjà épuisés par des années de conflit.

Pour l’heure, le Hamas semble avoir l’avantage, grâce à sa puissance militaire et à son ancrage populaire. Mais la persistance de ces groupes armés, combinée au soutien trouble d’Israël à certains d’entre eux, maintient Gaza dans une instabilité chronique. La question demeure : le mouvement islamiste parviendra-t-il à unifier le territoire sous son autorité, ou ces rivalités internes ouvriront-elles la voie à un chaos encore plus grand ?

En résumé :

  • Le Hamas lutte pour reprendre le contrôle de Gaza face à des groupes armés diversifiés.
  • Les factions incluent des clans familiaux et des organisations criminelles, certaines soutenues par Israël.
  • Les unités Radaa et Sahem mènent des opérations brutales pour rétablir l’ordre.
  • La trêve avec Israël reste menacée par ces tensions internes.

À Gaza, l’avenir reste incertain. Le Hamas, malgré sa puissance, doit naviguer entre répression et quête de légitimité. Dans ce territoire marqué par la guerre et la division, chaque affrontement redessine les contours d’un pouvoir fragile, où la paix semble encore hors de portée.

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