ActualitésInternational

Condamnée à mort en Indonésie : une Philippine bientôt transférée

Condamnée à mort en Indonésie pour trafic de drogue, une mère de famille philippine pourrait bientôt être rapatriée dans son pays natal après un accord inédit entre Jakarta et Manille. Retour sur une affaire qui avait soulevé l'indignation aux Philippines...

Une lueur d’espoir se profile à l’horizon pour Mary Jane Veloso, une citoyenne philippine âgée de 39 ans et mère de deux enfants, condamnée à la peine capitale en Indonésie pour trafic de drogue. Selon un accord conclu ce vendredi entre Jakarta et Manille, elle pourrait en effet être transférée aux Philippines et échapper ainsi à l’exécution.

Mary Jane Veloso avait été arrêtée en 2010 à son arrivée en Indonésie, 2,6 kg d’héroïne ayant été découverts dans sa valise. Malgré ses dénégations, la justice indonésienne l’avait reconnue coupable et condamnée à mort la même année. Une sentence qui avait déclenché un véritable tollé aux Philippines.

Un sursis de dernière minute en 2015

En 2015, Mary Jane Veloso avait échappé de justesse au peloton d’exécution. Le gouvernement philippin était en effet parvenu à obtenir un sursis in extremis, faisant valoir que la condamnée avait été la victime d’un réseau de trafiquants. Une femme suspectée de l’avoir recrutée comme « mule » avait d’ailleurs été arrêtée et poursuivie pour traite d’êtres humains.

La famille et les soutiens de Mme Veloso n’ont eu de cesse depuis de clamer son innocence et de dénoncer un piège tendu par des criminels sans scrupules. Leur combat acharné aura donc fini par payer. « Je suis reconnaissante et heureuse. C’est une nouvelle chance qui s’offre à moi d’espérer pouvoir rentrer chez moi et retrouver ma famille », a réagi l’intéressée depuis la prison de Yogyakarta où elle est détenue.

Les conditions du transfert

Yusril Ihza Mahendra, ministre indonésien chargé des Affaires juridiques et des droits humains, a annoncé que Mary Jane Veloso pourrait fouler à nouveau le sol philippin « si Dieu le veut, avant Noël ». Un cadeau inespéré pour cette mère courage, même si le chemin de la liberté est encore long.

Car l’accord prévoit qu’une fois transférée, elle devra purger sa peine « conformément aux lois et réglementations philippines en matière pénale », comme l’a précisé Raul Vasquez, haut responsable du ministère philippin de la Justice. Jakarta s’est néanmoins engagé à respecter la décision des autorités philippines si celles-ci décidaient finalement d’accorder leur grâce à la condamnée.

L’Indonésie va-t-elle relancer les exécutions ?

La législation antidrogue indonésienne est l’une des plus sévères au monde. Pas moins de 530 condamnés se trouveraient actuellement dans les couloirs de la mort, dont 96 étrangers. Le pays n’a plus procédé à des exécutions capitales depuis 2016 mais a laissé entendre cette semaine qu’il pourrait y recourir à nouveau prochainement.

Le gouvernement va étudier l’accélération de l’exécution de la peine de mort pour les condamnés pour trafic de drogue qui ne disposent plus de recours légaux.

Budi Gunawan, ministre coordonnateur des politiques et de la sécurité

Outre Mary Jane Veloso, cinq Australiens et un Français, Serge Atlaoui, 60 ans, figureraient parmi les étrangers en sursis. Jakarta a indiqué être en discussion avec Paris et Canberra en vue de leur éventuel rapatriement. Autant de signes que la pression internationale pourrait amener l’Indonésie à assouplir sa position sur la peine de mort.

Un débat mondial ravivé

Le sort tragique de Mary Jane Veloso aura en tout cas eu le mérite de raviver le débat sur la peine capitale, en Asie et dans le monde. De nombreux pays continuent en effet d’y recourir, notamment en matière de lutte antidrogue, au mépris des appels pressants des organisations de défense des droits humains.

Mais au-delà de la question de son bien-fondé, cette affaire met aussi en lumière la vulnérabilité de certaines populations, souvent issues de milieux défavorisés, qui peuvent basculer dans la criminalité malgré elles, par naïveté ou par nécessité. Un phénomène que les gouvernements se doivent de prendre en compte en parallèle du volet répressif.

Le cas de Mary Jane Veloso constitue donc un terrible avertissement mais aussi un formidable message d’espoir. La mobilisation continue de la société civile, alliée à une volonté politique renouvelée de coopération judiciaire entre États, peut faire reculer l’inacceptable et arracher des vies à l’arbitraire. Une lutte de tous les instants.

Passionné et dévoué, j'explore sans cesse les nouvelles frontières de l'information et de la technologie. Pour explorer les options de sponsoring, contactez-nous.