Un tribunal sud-africain vient de condamner un ancien policier pour le meurtre d’un jeune militant contre l’apartheid en 1987. Cette affaire, qui avait été examinée par la commission Vérité et réconciliation mise en place après la fin du régime ségrégationniste, met en lumière la quête de justice pour les crimes commis durant cette sombre période de l’histoire sud-africaine.
Un aveu spontané 22 ans après les faits
Johan Marais, aujourd’hui âgé de 65 ans, a plaidé coupable lors de son procès devant le tribunal de Pretoria. Selon des sources proches du dossier, c’est en 2019, alors qu’il se réveillait à l’hôpital après une tentative de suicide, que l’ex-policier a spontanément avoué à la police avoir tiré sur le jeune homme plus de deux décennies auparavant.
À l’époque des faits, Marais était à la tête d’une unité antiterroriste de la police du régime d’apartheid. Il a été reconnu coupable du meurtre de Caiphus Nyoka, un responsable syndicaliste noir de 23 ans connu dans l’est de Johannesburg pour ses prises de position publiques contre la ségrégation raciale.
Un meurtre prémédité
D’après le parquet, le soir du 23 août 1987, Johan Marais et plusieurs membres de la police de sécurité se sont réunis pour planifier l’assassinat de Caiphus Nyoka. Ils ont décidé d’organiser un raid à son domicile en pleine nuit.
Vers 2h30 du matin, les policiers ont fait irruption chez le militant. Après l’avoir identifié dans la chambre qu’il partageait avec trois camarades, ils ont fait sortir ses amis de la pièce. Johan Marais a alors tiré à neuf reprises sur Caiphus Nyoka, le tuant sur le coup.
Trois autres policiers bientôt jugés
Si Johan Marais a été le premier à être condamné dans cette affaire, il ne sera pas le seul à devoir répondre de ses actes devant la justice. Trois autres policiers qui l’accompagnaient le soir du meurtre doivent comparaître à partir de la semaine prochaine devant le tribunal de Benoni.
Après avoir plaidé coupable, Johan Marais avait été libéré sous caution avec l’interdiction d’entrer en contact avec ses trois co-accusés en attendant leur procès. Sa peine définitive sera prononcée à une date ultérieure.
Des enquêtes complexes sur les crimes de l’apartheid
Le parquet sud-africain s’est félicité de cette condamnation qu’il juge “particulièrement significative”. Elle reflète selon lui l’engagement des autorités à demander des comptes pour les “crimes atroces” dont la commission Vérité et réconciliation avait été saisie.
Les magistrats soulignent cependant la difficulté de mener des enquêtes sur des affaires qui remontent à plusieurs décennies. La disparition des preuves matérielles et l’absence de témoins essentiels compliquent considérablement leur tâche.
Vers une réconciliation nationale ?
Au-delà de la condamnation individuelle, ce procès ravive le douloureux passé de l’Afrique du Sud et interroge sur le chemin parcouru depuis la fin de l’apartheid. Si la commission Vérité et réconciliation avait permis de faire la lumière sur de nombreux crimes, beaucoup attendent encore que justice soit rendue.
Pour les familles des victimes comme pour la société sud-africaine dans son ensemble, ces procès tardifs apparaissent comme une étape nécessaire vers l’apaisement et la réconciliation nationale. Ils rappellent que la lutte contre l’impunité et le travail de mémoire restent des défis majeurs pour le pays, plus de 25 ans après la chute du régime raciste.