Le transport fluvial français est sur le point de vivre une véritable révolution. CMA CGM, mastodonte du fret maritime, vient de décrocher une concession de 30 ans pour exploiter et développer le terminal de conteneurs du port Édouard-Herriot à Lyon. Une annonce qui promet de transformer en profondeur le visage du transport de marchandises sur l’axe Rhône-Saône.
Un groupement ambitieux pour doper le fret fluvial
Derrière ce projet d’envergure se cache un consortium emmené par CMA CGM, qui détient 67% du capital. À ses côtés, on retrouve la Banque des Territoires (23%), la CCI Lyon Métropole Saint-Étienne Roanne (4%) et la CCI métropolitaine Aix-Marseille-Provence (4%). Un quatuor de choc bien décidé à faire bouger les lignes du transport fluvial hexagonal.
Jusqu’à présent, le port lyonnais était géré par Lyon Terminal, filiale de la Compagnie Nationale du Rhône. Mais avec l’arrivée de CMA CGM, c’est un tout nouveau chapitre qui s’ouvre. Le géant marseillais, habitué aux mers et océans du globe avec sa flotte de 650 navires, entend bien appliquer son savoir-faire à l’échelle fluviale. Un défi de taille pour cet acteur encore modeste sur ce segment, principalement présent en Asie.
Le port Édouard-Herriot, futur hub de la logistique fluviale
Avec cette concession trentenaire, CMA CGM compte faire du port Édouard-Herriot un véritable hub de la logistique fluviale. Situé à la confluence du Rhône et de la Saône, ce terminal stratégique va bénéficier d’importants investissements pour moderniser ses infrastructures et accroître ses capacités de traitement des conteneurs.
L’objectif est clair : capter une part croissante des flux de marchandises entre la façade méditerranéenne et l’hinterland rhodanien. En misant sur le transport fluvial, réputé plus écologique et économique que le routier, CMA CGM entend offrir une alternative compétitive aux chargeurs et contribuer à la décarbonation de la supply chain.
Une connexion renforcée entre Marseille et Lyon
Au cœur de la stratégie de CMA CGM, on trouve la volonté de renforcer la connexion entre les ports de Marseille et Lyon. Grâce à des navettes fluviales régulières et à des services logistiques intégrés, l’armateur souhaite fluidifier l’acheminement des conteneurs entre ces deux pôles économiques majeurs.
Une meilleure coordination des flux maritimes et fluviaux devrait permettre de réduire les temps de transit, d’optimiser les coûts et d’améliorer la traçabilité des marchandises. De quoi séduire de nombreux acteurs économiques en quête de solutions logistiques performantes et durables.
Avec cette concession, nous allons créer un véritable pont logistique entre Marseille et Lyon. C’est une opportunité unique d’écrire une nouvelle page du transport fluvial français.
Rodolphe Saadé, PDG de CMA CGM
Un enjeu de souveraineté économique
Au-delà des aspects purement logistiques, l’implication de CMA CGM dans le fret fluvial revêt aussi un enjeu de souveraineté économique. Face à la concurrence des grands ports européens comme Anvers ou Rotterdam, la France entend reprendre la main sur ses corridors de transport stratégiques.
En dynamisant l’axe Marseille-Lyon, deuxième artère fluviale du pays après la Seine, CMA CGM participe à ce mouvement de reconquête. Une manière de renforcer l’attractivité et la compétitivité de la chaîne logistique tricolore, tout en soutenant l’emploi et l’activité économique des territoires traversés.
Des défis à relever pour concrétiser la vision
Si le projet porté par CMA CGM est ambitieux, sa concrétisation s’annonce semée d’embûches. Moderniser et étendre les installations portuaires lyonnaises nécessitera des investissements conséquents et un engagement sur le long terme de tous les partenaires impliqués.
Il faudra aussi convaincre les chargeurs et les logisticiens de basculer massivement vers le fluvial, en proposant des services fiables, rapides et compétitifs. Sans oublier l’enjeu de l’intermodalité, clé de voûte d’un système de transport intégré et efficace entre fleuve, fer et route.
Autant de défis que CMA CGM devra relever pour faire de son pari fluvial une réussite. Mais le géant marseillais semble avoir les reins solides et la volonté d’écrire une nouvelle page de son histoire, dans le sillage de ses illustres prédécesseurs qui ont fait la renommée du port phocéen.
Une chose est sûre : avec l’arrivée fracassante de CMA CGM sur le Rhône, le transport fluvial français s’apprête à vivre un sacré coup de boost. Un vent nouveau qui pourrait bien faire souffler un air de renouveau sur notre façade fluvio-maritime. À suivre de près dans les années à venir…