Qui aurait cru qu’en l’espace de quelques années, Yoon Suk Yeol passerait du statut de procureur étoile à celui de président honni, au bord de la destitution ? Retour sur l’incroyable descente aux enfers de l’homme qui a fait vaciller la démocratie sud-coréenne.
Un Coup de Force qui Ébranle le Pays
Le 3 décembre, Yoon Suk Yeol franchit une ligne rouge en imposant la loi martiale et en envoyant l’armée museler le Parlement. Un acte désespéré pour celui qui se dit victime d’un blocage orchestré par l’opposition, majoritaire à l’Assemblée. Mais pour beaucoup, c’est la goutte de trop. Les députés, réunis d’urgence dans un hémicycle cerné par les forces spéciales, votent l’abolition de la loi martiale. Le président est contraint de s’incliner.
Depuis, la colère gronde. Une deuxième motion de destitution est sur la table, et Yoon, interdit de quitter le territoire, est visé par une enquête pour « rébellion ». Sa cote de popularité a plongé à 11%, un plus bas historique. Trois quarts des Sud-Coréens réclament son départ. Comment en est-on arrivé là ?
De Procureur Admiré à Président Contesté
Né en 1960 à Séoul dans une famille d’universitaires, Yoon Suk Yeol mène une brillante carrière de procureur. Fer de lance de la lutte anticorruption, il fait tomber l’ex-présidente Park Geun-hye et plusieurs hauts responsables. Fort de cette image de chevalier blanc, il se lance en politique fin 2021 et remporte la présidentielle de justesse.
Mais une fois au pouvoir, les scandales s’enchaînent. De la bousculade mortelle d’Halloween à Séoul, imputée à la négligence des autorités, aux controverses entourant son épouse accusée de dépenser sans compter, Yoon accumule les casseroles. Ses abus de veto pour protéger des proches jettent le doute sur son intégrité.
Un Naufrage Politique Sans Précédent
La déroute électorale du parti de Yoon aux législatives d’avril 2024 marque un premier tournant. Laminé, le Parti du Pouvoir au Peuple hérite de seulement 108 des 300 sièges. Un désaveu cinglant pour le président, qui commence à chercher des boucs émissaires.
C’est ce qui le pousse à franchir le Rubicon début décembre, en voulant museler le Parlement par la force. Un coup de poker qui tourne au fiasco et transforme ce procureur jadis adulé en paria de la nation. Même les caciques de son propre camp le lâchent, le jugeant « dangereux pour le pays ».
Le Crépuscule d’un Président
Isolé, affaibli, Yoon Suk Yeol semble au bout du rouleau. Cerné par les enquêtes et les menaces de destitution, celui qui voulait « protéger la Corée du Sud des forces hostiles » se retrouve lui-même accusé de mettre en péril la démocratie. Ironie du sort pour cet admirateur revendiqué de Churchill.
Beaucoup jugent son sort scellé. Une première motion de destitution n’a été repoussée que grâce au soutien in extremis de son propre camp le 7 décembre. Mais l’examen d’une nouvelle motion ce samedi pourrait bien sonner le glas de sa présidence calamiteuse. Avec une popularité au plus bas et des soutiens qui s’effritent, Yoon semble au bord du précipice.
Sa chute serait un épilogue cruel pour cet ex-procureur vénéré, grand pourfendeur de la corruption devenu symbole des dérives du pouvoir. Une descente aux enfers vertigineuse qui laissera des traces dans l’histoire tourmentée de la jeune démocratie sud-coréenne. La saga Yoon Suk Yeol semble proche de son dénouement. Et l’issue s’annonce sombre pour le président déchu.