C’est un véritable séisme politique qui a secoué la Corée du Sud ce mardi soir. Alors que des rumeurs bruissaient depuis quelques heures sur une annonce fracassante à venir, le président Yoon Suk Yeol est apparu à la télévision à 22h24 pour déclarer, à la stupeur générale, la mise en place immédiate de la loi martiale dans tout le pays. Dénonçant « les menaces des forces communistes nord-coréennes » et « les éléments hostiles à l’État », il a justifié sa décision par la nécessité de « protéger la Corée du Sud libérale ». Mais ce coup de force inattendu a déclenché une réaction en chaîne qui a précipité le pays dans le chaos en l’espace de 24 heures.
L’opposition se mobilise, l’armée investit le Parlement
Immédiatement après l’allocution présidentielle, le chef de l’opposition Lee Jae-myung a appelé les députés et les citoyens à se mobiliser et à le rejoindre à l’Assemblée nationale pour une session d’urgence. Mais alors que les élus tentaient de pénétrer dans le bâtiment, des hélicoptères ont déposé des soldats des forces spéciales qui ont pris position autour et à l’intérieur du Parlement, allant jusqu’à escalader les grilles et briser des vitres. Les employés ont tenté de résister et de barricader les accès à l’hémicycle avec le mobilier, pendant que des milliers de manifestants pacifiques se rassemblaient aux abords pour réclamer le retrait de la loi martiale et la démission de Yoon Suk Yeol.
Malgré le déploiement des forces de l’ordre, 190 députés sur 300 sont parvenus à entrer dans l’Assemblée nationale, parfois en escaladant eux-mêmes les clôtures. Vers 1h du matin, la séance a pu démarrer alors même que les militaires tentaient de forcer les portes de l’hémicycle. Faisant fi de la pression, les parlementaires ont voté à l’unanimité une motion exigeant la levée immédiate de la loi martiale, que le président est constitutionnellement tenu de respecter.
« Nous allons accéder à la requête de l’Assemblée nationale et lever la loi martiale. »
Yoon Suk Yeol, lors d’une allocution vers 4h30 du matin
Grève générale et motion de destitution
Après ce revirement express, les réactions ne se sont pas fait attendre. Dès le matin, la principale confédération syndicale du pays a appelé à une grève générale illimitée pour obtenir la démission de Yoon Suk Yeol, fustigeant « une mesure irrationnelle et antidémocratique ». L’opposition a de son côté annoncé le dépôt d’une plainte contre le président pour « rébellion » ainsi que d’une motion de destitution qui pourrait être adoptée dès cette fin de semaine si quelques députés de la majorité apportent leurs voix.
Face à la tempête, l’entourage présidentiel tangue. Plusieurs conseillers importants ont présenté leur démission collective dans la matinée, suivis en début de soirée par le ministre de la Défense Kim Yong-hyun. Mais le principal intéressé n’est pas réapparu en public depuis son allocution nocturne. Pendant ce temps, des milliers de Sud-Coréens continuent d’affluer vers le centre de Séoul pour réclamer son départ.
En 24 heures, c’est un véritable vent de folie qui a balayé la péninsule, plongeant la 10ème puissance économique mondiale dans une crise politique majeure dont l’issue est pour l’heure totalement incertaine. Beaucoup redoutent un regain de tensions avec la Corée du Nord voisine, qui pourrait être tentée de profiter de la situation. La communauté internationale retient son souffle.