Montpellier, lundi 20 janvier 2025. C’est un procès hors normes qui s’ouvre devant la cour d’assises de l’Hérault. Sandrine P., 54 ans, comparaît pour le meurtre par privation de soins et de nourriture de sa fille Amandine, 13 ans, morte dans un état de dénutrition extrême à l’été 2020. Un calvaire glaçant, un infanticide qui soulève une question lancinante : comment une mère a-t-elle pu en arriver là ?
Le corps martyrisé d’Amandine révèle l’horreur
Le 18 août 2020, les secours découvrent le corps sans vie d’Amandine à son domicile. L’adolescente ne pèse plus que 28kg pour 1m55. Son visage est tuméfié, des dents manquent, des mèches de cheveux ont été arrachées. Sa dépouille porte les stigmates d’une longue torture : de multiples lésions, escarres, des os saillants sous une peau parcheminée par la faim.
Les expertises sont accablantes. Amandine est morte de dénutrition après des mois de privations alimentaires. Son estomac est vide, son corps ne présente plus aucune trace de graisse. La malnutrition aura eu raison de ses dernières forces.
Le lent supplice d’Amandine
L’enquête révèle qu’Amandine subissait les sévices de sa mère depuis des années. Déscolarisée, isolée, l’adolescente vivait recluse dans sa chambre. Les voisins témoignent avoir parfois entendu ses cris et ses pleurs. Mais jamais assez pour alerter.
La descente aux enfers s’accélère pendant le confinement du printemps 2020. Amandine est affaiblie, amaigrie. Sandrine ne l’emmène plus chez le médecin, ne suit aucun de ses traitements. En quelques mois, l’adolescente voit ses forces décliner jusqu’à l’issue fatale.
Sandrine, mère infanticide ou femme malade ?
Au premier jour du procès, l’accusée reste impassible face au récit de l’horreur. D’une voix monocorde, elle semble se dédouaner :
Je ne sais pas pourquoi elle ne mangeait pas. Personne ne l’a privée de nourriture, je n’ai pas d’explication.
Mais rapidement, les experts psychiatres dressent le profil d’une femme instable et violente, mue par une « rage narcissique ». Pour eux, Amandine était devenue « la représentation diabolique du père », ex-compagnon honni de Sandrine.
Une mère maltraitante en quête de pouvoir absolu sur son enfant, selon les experts. L’avocat de la défense, lui, décrit une femme malade, dépassée, qui n’a pas su déceler la souffrance de sa fille.
Les zones d’ombre du dossier
L’enquête soulève aussi de troublantes défaillances. Comment les services sociaux ont-ils pu passer à côté d’un tel drame ? Amandine avait pourtant fait l’objet de plusieurs signalements, classés sans suite. Une assistante sociale avait noté sa maigreur et son repli sur elle-même. Sans jamais donner l’alerte.
Au fil des audiences, c’est toute la mécanique d’un fiasco qui se dessine. Carences des institutions, aveuglement de l’entourage, solitude d’une enfant broyée dans l’indifférence. Jusqu’au pire.
La quête de vérité d’une famille déchirée
Du côté des parties civiles, la douleur est immense. Le père d’Amandine, effondré, cherche à comprendre pourquoi il n’a rien vu du calvaire de sa fille. Les grands-parents maternels, eux, crient vengeance contre cette « mère indigne ».
Quelle mère peut affamer son enfant ? C’est inhumain ! Elle mérite la perpétuité, elle nous a volé notre petite-fille !
lance la grand-mère d’Amandine à la barre, en larmes.
Derrière ce procès, c’est toute une famille brisée qui cherche des réponses. Comment le drame a-t-il pu se nouer, sous les yeux de tous, dans l’indifférence générale ? C’est tout l’enjeu de ce procès hors normes, miroir glaçant d’une société qui aura failli à protéger une enfant.
Une semaine pour comprendre l’incompréhensible
Jour après jour, les débats tenteront de faire la lumière sur ce dossier qui dépasse l’entendement. Décortiquer l’engrenage qui mena une mère à affamer sa propre fille. Sonder les failles d’un système qui n’a pas su sauver Amandine.
Un procès lourd et éprouvant. Car derrière l’horreur des faits, c’est un miroir dérangeant que renvoie cette histoire à notre société. Celui d’un monde où l’inimaginable peut se produire. Où un enfant peut mourir de faim, aujourd’hui en France, dans la solitude et l’indifférence. Un monde où une mère peut devenir le bourreau de sa propre fille.
Au terme des débats, Sandrine P. encourra la réclusion criminelle à perpétuité. La peine maximale pour un acte « d’une rare cruauté ». Un geste inqualifiable qui aura ôté la vie à Amandine dans d’atroces souffrances.
Mais au-delà du verdict, ce procès laissera des questions lancinantes. Sur nos défaillances collectives, nos angles morts. Sur ces enfants invisibles que notre société ne parvient pas à sauver. Amandine a payé de sa vie ces carences. Puisse son calvaire éveiller les consciences. Pour que plus jamais, un tel drame ne se reproduise dans l’indifférence.