En 2024, les députés français ont dû déclarer publiquement les différents cadeaux et invitations reçus tout au long de l’année, comme le veut la règle de transparence en vigueur au Parlement. Avec la tenue des Jeux Olympiques de Paris durant l’été, nombreux sont les présents qui avaient un lien avec ce grand événement sportif. Mais entre places VIP, produits dérivés et autres attentions insolites, tous les élus n’ont pas été logés à la même enseigne. Florilège des dons les plus marquants de l’année.
Paris 2024, pourvoyeur officiel de cadeaux aux députés
Sans surprise, les Jeux Olympiques de Paris ont trusté le haut du pavé en matière de cadeaux reçus par les parlementaires en 2024. Invitations pour les cérémonies et les compétitions, goodies officiels, livres commémoratifs… Les élus ont été choyés, mais de façon très inégale selon les témoignages recueillis.
Ainsi, selon nos informations, certains députés « VIP » se sont vu offrir de nombreuses places dans les tribunes officielles pour assister aux moments phares des JO. C’est le cas par exemple de Philippe Juvin (LR), qui aurait reçu pas moins de 13 invitations de la part de la Métropole du Grand Paris dont il est l’un des élus. Une générosité qui interroge sur les véritables motivations derrière ces largesses.
Privilèges et passe-droits dans les starting-blocks
D’autres ont pu bénéficier de traitements de faveur étonnants. Selon une source proche du dossier, le député Stéphane Mazars aurait ainsi été invité par France Télévisions pour assister aux épreuves d’athlétisme, en remerciement de son « implication dans la préparation des JOP sous la précédente législature ». Un privilège qui s’apparente à une forme de récompense a posteriori pour services rendus.
Mais tous n’ont pas eu droit aux mêmes égards. La plupart des députés « lambda » ont dû se contenter de cadeaux plus modestes, comme un simple tee-shirt officiel ou quelques ouvrages sur l’histoire des JO. Une différence de traitement qui en dit long sur le fonctionnement très hierarchisé du monde politique.
Petits plaisirs et grands soirs
Au-delà des Jeux, certains élus se sont également fait remarquer par des cadeaux plus personnels et décalés. Le député insoumis Carolos Martens Bilongo a reçu des places de match au stade Louis II de Monaco, tandis que son collègue Tristan Lahais (RN) s’est vu offrir plusieurs paquets de chips pour les « longues soirées d’examen budgétaire ». Des attentions prosaïques, voire potaches, mais qui semblent faire le bonheur de leurs destinataires.
D’autres ont visé plus haut, à l’instar des députés Sylvain Maillard et Anaïg Le Meur qui ont assisté au dernier concert de Mylène Farmer, ou de Constance Le Grip qui a eu droit à une soirée VIP avec Paul McCartney. Des privilèges qui posent la question des limites à ne pas franchir en matière de cadeaux aux élus.
Jack Lang, prince de la fashion week permanente
Dans un tout autre genre, l’ancien ministre Jack Lang continue de cultiver son statut d’icône du style jusque dans sa vie après la politique. Entre 2013 et 2018, il aurait ainsi reçu pour près de 500 000 euros de costumes haute couture de la part de grandes maisons. Des largesses qui ne manquent pas d’interpeller, même si elles ne tombent pas formellement sous le coup des règles anticorruption.
Les cadeaux n’étaient liés à aucune contrepartie directe, mais plutôt à l’élégance connue dans le monde entier de Jack Lang.
Créateur de mode
Le maintien d’un train de vie fastueux qui rappelle que même après avoir quitté les ors de la République, certains élus gardent un pied dans le grand monde. Une proximité avec les milieux du luxe qui questionne sur l’exemplarité attendue des décideurs politiques.
Cadeaux et transparence, un couple impossible ?
Au-delà du défilé people, ces révélations posent surtout la question du contrôle démocratique de ces échanges de bons procédés. Certes, les cadeaux aux députés sont encadrés et soumis à une obligation de transparence au-delà de 150 euros. Mais force est de constater que cette règle est diversement appliquée et interprétée selon les élus.
De même, si les voyages financés par des tiers doivent en théorie être signalés, dans les faits seuls les séjours à l’étranger semblent faire l’objet d’une vigilance particulière. Un deux poids deux mesures qui nuit à la clarté du dispositif et ne permet pas d’éviter tous les conflits d’intérêts.
Pour un encadrement strict des cadeaux aux élus
Face à ce constat, il est temps d’aller plus loin et d’imposer un encadrement beaucoup plus strict des cadeaux et avantages reçus par les parlementaires. Cela passe par :
- L’abaissement significatif du seuil de déclaration, aujourd’hui fixé à 150 euros
- L’obligation de déclarer TOUS les cadeaux et invitations, quelle que soit leur nature ou provenance
- Des sanctions réelles et dissuasives en cas de manquement
- Un contrôle renforcé et plus systématique des déclarations
Seule une transparence totale permettra de restaurer la confiance des citoyens envers leurs élus. Car s’il n’est pas question d’interdire tout cadeau ou marque de reconnaissance, il est essentiel que ceux-ci restent mesurés et symboliques. Le seul privilège admissible pour un élu, c’est celui de représenter et servir le peuple souverain. Tout le reste n’est qu’une atteinte inacceptable aux principes démocratiques.
Il est grand temps de mettre fin au mélange des genres et aux complaisances douteuses. Les dérives révélées en 2024 doivent sonner comme un avertissement pour tous les parlementaires: les petits arrangements entre amis des puissants n’ont plus droit de cité dans notre République. Ne plus accepter que des passe-droits et des comportements d’un autre âge, c’est le devoir de chacun pour faire vivre une démocratie exemplaire au quotidien.