En ce début d’année 2025, les finances publiques françaises se retrouvent dans une situation pour le moins atypique. Faute d’adoption d’un nouveau budget à temps, le gouvernement n’a eu d’autre choix que de reconduire à l’identique, par décret, le budget initial de 2024 pour l’année qui débute. Une décision qui soulève de nombreuses interrogations sur la gestion des dépenses de l’État dans les mois à venir.
Un budget 2024 reconduit, faute de mieux
Suite au renversement du gouvernement précédent, qui a brutalement interrompu les discussions budgétaires au Parlement, aucun nouveau projet de loi de finances n’a pu être voté avant le 31 décembre. En conséquence, un décret publié au Journal officiel acte la reconduction pure et simple pour 2025 des autorisations d’engagement et de dépenses prévues dans le budget initial 2024.
Selon des estimations fournies par le ministère des Finances, cela correspond à un montant de dépenses de l’État de près de 493 milliards d’euros. Une somme conséquente, gelée provisoirement dans l’attente de la reprise des débats budgétaires par la nouvelle équipe gouvernementale.
Une solution temporaire en attendant un nouveau budget
Le nouveau Premier ministre François Bayrou et son équipe ont bien conscience que cette reconduction n’est qu’une solution temporaire. L’examen du projet de loi de finances pour 2025 doit impérativement reprendre dans les prochaines semaines à l’Assemblée nationale.
Nous allons travailler d’arrache-pied pour présenter dans les meilleurs délais un budget responsable et à la hauteur des défis du pays.
Un membre du gouvernement
En parallèle, une loi spéciale votée fin décembre permet à l’État de continuer à percevoir les impôts et de réaliser des emprunts sur les marchés en attendant l’adoption définitive du budget.
Le casse-tête budgétaire du gouvernement Bayrou
Cette situation inédite place le gouvernement Bayrou face à un véritable casse-tête budgétaire. Les marges de manœuvre sont étroites pour élaborer un nouveau budget tenant compte à la fois :
- Des promesses de campagne du président Edouard Philippe
- De la nécessité de contenir un déficit public en constante augmentation ces dernières années
- Du besoin d’investissements dans des secteurs jugés prioritaires comme l’éducation ou la transition écologique
Un exercice d’équilibriste périlleux pour un gouvernement qui ne dispose que d’une majorité relative et fragile à l’Assemblée nationale. Le moindre faux pas pourrait faire dérailler le processus budgétaire et replonger le pays dans une crise politique.
Vers un report des grandes réformes ?
Face à ces contraintes, plusieurs observateurs s’attendent à ce que le gouvernement soit contraint de reporter certains de ses grands projets de réformes, du moins dans un premier temps. Il pourrait choisir de se concentrer sur des ajustements budgétaires à la marge, histoire de donner des gages de bonne gestion, sans pour autant brusquer une opinion publique déjà échaudée par des mois de crise politique et sociale.
Le gouvernement va devoir définir des priorités claires et faire preuve de beaucoup de pédagogie s’il veut réussir à faire adopter un budget ambitieux et crédible.
Un député de la majorité
Quoi qu’il en soit, François Bayrou et son équipe n’auront pas le droit à l’erreur sur ce dossier budgétaire ultrasensible. Leur capacité à élaborer et faire voter rapidement un budget à la fois responsable et porteur d’espoir conditionnera largement la suite de ce quinquennat à hauts risques. Les prochaines semaines s’annoncent donc décisives sur le front des finances publiques.
Les chiffres clés du budget 2024 reconduit
En attendant de voir plus clair sur les intentions du gouvernement, voici quelques chiffres clés à retenir concernant ce budget « par défaut » :
- 492,9 milliards d’euros : le montant total des dépenses de l’État autorisées pour 2025, identique à celui de 2024
- 6% du PIB : le niveau de déficit public attendu fin 2024 selon les dernières estimations, un niveau jugé préoccupant par de nombreux économistes
- 2 963 milliards d’euros : le montant record de la dette publique française à fin septembre 2024
Des chiffres vertigineux qui illustrent l’ampleur de la tâche qui attend le nouveau gouvernement pour redresser des finances publiques mal en point, tout en répondant aux attentes de réformes et de justice sociale des Français. Un défi titanesque dans un contexte économique, social et géopolitique des plus incertains.
L’opposition dénonce un « passage en force »
Sans surprise, cette reconduction du budget 2024 fait déjà grincer des dents dans les rangs de l’opposition. Des voix s’élèvent pour dénoncer ce qui est perçu comme un « passage en force » et un « déni de démocratie » de la part de l’exécutif.
On ne peut pas gouverner le pays par décret et contourner en permanence le Parlement sur des sujets aussi cruciaux que le budget !
Un député LFI
A droite comme à gauche de l’hémicycle, on réclame un débat budgétaire de fond permettant de remettre à plat les priorités du pays et la trajectoire des finances publiques. Certains menacent déjà de saisir le Conseil constitutionnel si le gouvernement tentait de faire passer son budget en force sans véritable discussion.
François Bayrou se retrouve donc pris en tenaille entre une opinion publique exigeante, des partenaires sociaux remontés, une opposition combative et des marchés financiers scrutant le moindre faux pas sur le front budgétaire. Un baptême du feu sous haute tension pour le nouveau locataire de Matignon !
2025, un budget de tous les dangers ?
Au final, ce budget 2025 s’annonce comme un véritable chemin de crête pour le gouvernement Bayrou. S’il parvient, par un savant dosage, à convaincre de la crédibilité de sa gestion tout en posant des jalons pour ses réformes de fond, il pourra espérer conforter sa légitimité et se donner un peu d’air pour la suite du quinquennat.
Mais la moindre erreur, le moindre couac pourrait au contraire attiser les braises d’une contestation déjà vive et faire vaciller un exécutif fragilisé. C’est peu de dire que François Bayrou joue gros sur ce premier budget de « l’après-crise ». Les arbitrages qu’il s’apprête à rendre seront scrutés à la loupe et détermineront largement la tonalité des prochains mois. Un baptême du feu budgétaire à haut risque qui dira si ce gouvernement a les épaules assez solides pour porter un cap clair dans la tempête. Réponse dans les prochaines semaines…