Vendredi dernier, le gouvernement nippon a donné son feu vert à un budget sans précédent pour l’exercice fiscal 2025, débutant au 1er avril. Totalisant 115 500 milliards de yens, soit environ 703 milliards d’euros, ce budget marque une étape clé dans la réponse du pays aux défis majeurs que représentent le vieillissement rapide de sa population et les tensions sécuritaires croissantes dans la région.
Un budget social gonflé face au vieillissement démographique
Avec près de 30% de ses habitants âgés de 65 ans et plus, le Japon affiche l’un des rythmes de vieillissement les plus élevés au monde. Pour y faire face, le nouveau budget alloue pas moins de 38 300 milliards de yens aux dépenses de sécurité sociale, en hausse de 1,6% par rapport à l’année précédente. Un effort considérable pour tenter de répondre aux besoins croissants en matière de santé, de retraites et de prise en charge de la dépendance.
Mais au-delà de l’aspect financier, c’est tout un pan de la société et de l’économie nippone qui se trouve bousculé par cette évolution démographique inédite. Pénurie de main d’œuvre, baisse de la consommation, pression sur les finances publiques… Les défis sont nombreux pour le pays du Soleil Levant, qui peine à enrayer la chute de sa natalité malgré des politiques incitatives.
La sécurité nationale, autre priorité budgétaire
Outre le volet social, l’autre grand axe de ce budget 2025 record concerne les dépenses militaires. Avec une enveloppe de 8 700 milliards de yens, celles-ci bondissent de près de 12% en un an. Une hausse spectaculaire qui s’inscrit dans la volonté affichée par Tokyo de porter son effort de défense à 2% du PIB à l’horizon 2027, contre environ 1% jusqu’à présent.
Derrière cette inflexion stratégique, la perception grandissante d’un environnement sécuritaire dégradé aux portes de l’archipel. Montée en puissance de la Chine, essais balistiques à répétition de la Corée du Nord, différends territoriaux persistants… Autant de menaces qui ont poussé le Japon à revoir sa doctrine de défense en profondeur en 2022, malgré sa Constitution pacifiste héritée de l’après-guerre.
Le budget 2025 prévoit ainsi des fonds pour attirer de nouvelles recrues dans les Forces d’autodéfense japonaises, moderniser les équipements et mettre en place un système de collecte de renseignements par satellite. De quoi suivre de près les mouvements de missiles et de navires au large du Japon.
Une adoption qui s’annonce délicate
Si le gouvernement a approuvé les grandes lignes du budget, celui-ci doit encore franchir l’étape du Parlement. Un parcours qui s’annonce semé d’embûches, après la perte de la majorité par la coalition au pouvoir lors des législatives d’octobre dernier. Le parti libéral-démocrate et son allié, le Komeito, devront donc composer avec l’opposition pour faire adopter ce budget crucial pour l’avenir du pays.
Entre nécessité de répondre aux défis intérieurs et volonté de peser davantage sur la scène internationale, le Japon marche sur un fil budgétaire ténu. Les arbitrages qui seront rendus dans les prochains mois, au Parlement comme au sein de la société, dessineront en filigrane le visage du Japon de demain. Un pays tiraillé entre ses aspirations pacifistes et les réalités géostratégiques d’un XXIe siècle de plus en plus incertain.