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Bras De Fer Entre Orano Et Le Niger Sur L’uranium

Orano a annoncé engager un arbitrage international contre le Niger suite au retrait de son permis d'exploitation d'un gisement d'uranium majeur. Ce conflit illustre les tensions autour des ressources stratégiques et la volonté de souveraineté du Niger face aux intérêts français. Jusqu'où ira ce bras de fer ?

Le spécialiste français de l’uranium Orano a annoncé engager un arbitrage international à l’encontre de l’État du Niger, qui a suspendu le permis d’exploitation d’un gisement majeur. Ce bras de fer illustre les tensions géopolitiques autour des ressources stratégiques et la volonté de souveraineté des pays producteurs face aux intérêts des multinationales.

Un conflit autour de l’uranium nigérien

Selon une source proche du dossier, Orano a décidé d’entamer un arbitrage international contre le Niger après plusieurs mois de négociations infructueuses. En juin 2024, les autorités nigériennes avaient retiré à la société française le permis d’exploitation du gisement d’Imouraren, l’un des plus importants au monde avec des réserves estimées à 200 000 tonnes d’uranium.

Le Niger, 4ème producteur mondial d’uranium, fournit près de 5% de la production globale. Ses ressources représentent donc un enjeu stratégique majeur, surtout dans un contexte de tensions sur les approvisionnements énergétiques. Mais depuis l’arrivée au pouvoir d’un régime militaire par un putsch en juillet 2023, le pays a fait de la souveraineté sa priorité, notamment concernant l’exploitation de son uranium.

La riposte d’Orano

Face à cette décision, Orano affirme avoir soumis « une proposition technique concrète » pour exploiter rapidement Imouraren. Le groupe français, détenu à 90% par l’État, dénonce une situation « fortement dégradée » l’empêchant de « continuer à travailler » dans le pays. Il a donc décidé de suspendre la production de sa filiale Somaïr à partir du 31 octobre 2024.

Imouraren et Somaïr représentent des actifs et des sources de revenus majeurs pour Orano. Leur suspension prive la société de ressources stratégiques pour alimenter les centrales nucléaires françaises. C’est donc un coup dur pour le groupe et une menace pour la sécurité énergétique de la France qui dépend de l’uranium nigérien.

Bras de fer géopolitique

Au-delà du conflit commercial, c’est un véritable bras de fer géopolitique qui se joue entre l’ancienne puissance coloniale et le Niger. Depuis son arrivée au pouvoir, le régime militaire a pris ses distances avec la France, remettant en cause les accords de coopération. La suspension des permis miniers d’Orano illustre cette volonté de reprendre le contrôle des ressources nationales.

De son côté, la France cherche à préserver ses intérêts économiques et stratégiques au Niger. L’uranium représente un enjeu de souveraineté énergétique et de rayonnement international. Paris craint qu’une rupture des approvisionnements ne fragilise son industrie nucléaire et son indépendance.

Quel avenir pour le nucléaire français ?

La crise entre Orano et le Niger soulève la question de la dépendance du nucléaire français aux importations d’uranium. Alors que le gouvernement mise sur l’atome pour décarboner son mix énergétique, cet épisode rappelle la vulnérabilité de cette filière face aux aléas géopolitiques.

Pour garantir son approvisionnement, la France devra diversifier ses sources et investir dans l’exploration de nouveaux gisements. Elle devra aussi renforcer sa diplomatie énergétique pour sécuriser ses partenariats. Mais la transition vers plus d’autonomie prendra du temps et des moyens colossaux.

À court terme, il est probable qu’Orano et le Niger trouvent un compromis pour préserver leurs intérêts mutuels. L’arbitrage international devrait permettre de clarifier les droits et obligations de chaque partie. Mais cette crise aura révélé les limites d’un modèle basé sur l’exploitation des ressources des pays du Sud par les multinationales du Nord.

Vers un nouveau partenariat ?

Au-delà du conflit, c’est l’occasion de repenser les relations entre pays producteurs et consommateurs de matières premières stratégiques. L’enjeu est de construire des partenariats plus équilibrés, basés sur le respect mutuel et le partage des bénéfices.

Le Niger, comme d’autres pays africains, aspire à une plus grande souveraineté sur ses ressources naturelles. Il souhaite en tirer davantage de retombées économiques et sociales pour sa population. Cela passe par une meilleure valorisation locale, des transferts de compétences, des investissements dans les infrastructures…

De leur côté, les pays consommateurs ont intérêt à nouer des relations de long terme avec les pays producteurs. Cela implique d’aller au-delà de la seule logique extractive pour construire des filières durables et créatrices de valeur partagée. Un défi à la hauteur des enjeux de la transition énergétique et du développement.

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