Les places boursières ont été secouées vendredi par l’annonce d’une nomination qui suscite l’inquiétude au sein de l’industrie pharmaceutique. Donald Trump, le futur président des États-Unis, a en effet choisi Robert F. Kennedy Jr, connu pour ses positions sceptiques vis-à-vis des vaccins, pour prendre la tête du ministère de la Santé. Une décision qui a immédiatement fait plonger les actions des grands groupes pharmaceutiques spécialisés dans les vaccins, que ce soit en Europe ou outre-Atlantique.
Des pertes significatives pour les géants de la pharmacie
En Europe, le français Sanofi a vu son titre chuter de 3,50% à la Bourse de Paris, tandis que le franco-autrichien Valneva a dévissé de 5,38%. Outre-Manche, AstraZeneca a perdu 2,78% et GSK 3,51% à la Bourse de Londres. La tendance a été similaire de l’autre côté de l’Atlantique : dès jeudi, en réaction à cette annonce, Pfizer a terminé en baisse de 2,62%, Moderna de 5,62%, Johnson & Johnson de 0,89% et Merck de 0,14% à Wall Street.
Même des groupes pharmaceutiques moins directement concernés par les vaccins ont été touchés. Le danois Novo Nordisk, pourtant davantage spécialisé dans les traitements contre le diabète et l’obésité, a ainsi reculé de 4,14% à Copenhague. Quant à son compatriote Bavarian Nordic, fabricant du vaccin contre la variole du singe, il s’est effondré de 17,50%.
Un choix qui effraie les investisseurs
Pour Russ Mould, directeur des investissements au sein de AJ Bell, cette nomination a clairement « effrayé les investisseurs du secteur ». Si les conséquences précises restent difficiles à évaluer à ce stade, elle devrait à tout le moins générer « une bonne dose d’incertitude », prévient-il.
Il faut dire que le profil de Robert F. Kennedy Jr a de quoi inquiéter. Cet ancien avocat en droit de l’environnement, sans formation scientifique, s’est fait connaître pour avoir propagé des théories complotistes sur de supposés liens entre vaccination et autisme ou encore sur les vaccins contre le Covid-19. Il milite aussi contre l’ajout de fluor dans l’eau du robinet, pourtant largement considéré comme une avancée sanitaire majeure contre les caries.
Des craintes à relativiser ?
Certains appellent néanmoins à relativiser l’impact de cette nomination. Pour Christopher Dembik, responsable de l’investissement chez Pictet AM France, la réaction des valeurs pharmaceutiques relève davantage d’un mouvement « épidermique, excessif et de courte durée ».
Il souligne que Robert F. Kennedy Jr entend aussi s’attaquer à la malbouffe aux États-Unis. Sur le long terme, estime l’expert, ce sont donc plutôt les valeurs de la grande distribution, de l’agro-alimentaire ou de la restauration rapide qui pourraient souffrir de cette nomination.
Un secteur pharmaceutique sous pression
Il n’empêche, cette annonce vient fragiliser un peu plus un secteur pharmaceutique déjà sous tension ces derniers mois sur les marchés financiers. Après avoir largement profité de l’effet « Covid », de nombreux laboratoires peinent en effet à convaincre sur leurs relais de croissance.
La nomination d’un vaccinosceptique à la tête de la Santé de la première puissance mondiale jette donc une ombre supplémentaire sur les perspectives du secteur. Même si son impact réel sur les politiques de santé reste à déterminer, elle renforce le climat d’incertitude et la pression sur des acteurs déjà chahutés en Bourse. Une situation que les investisseurs, toujours prompts à s’inquiéter du moindre risque, ont sanctionné sans attendre.
Un avenir incertain
S’il est encore tôt pour mesurer toutes les conséquences de ce choix, une chose est sûre : il ne devrait pas faciliter la tâche des grands laboratoires dans les mois et années à venir. Dans un contexte économique et boursier déjà compliqué, ils vont devoir composer avec un environnement politique potentiellement moins favorable.
Les prochains mois seront donc décisifs pour jauger de la capacité de résilience et d’adaptation de ces mastodontes de la pharmacie. Face aux doutes du marché, il leur faudra plus que jamais convaincre sur la solidité de leur pipeline et de leurs perspectives de développement. Un défi de taille qui, s’il est relevé, pourrait déboucher sur de belles opportunités boursières. Mais le chemin s’annonce d’ores et déjà semé d’embûches.