Au cœur des bouleversements qui secouent le Moyen-Orient, un événement majeur vient de se produire : la mort de Yahya Sinouar, chef du Hamas dans la bande de Gaza. Cette disparition soudaine, survenue dans un contexte de guerre ouverte entre le Hamas et Israël, soulève de nombreuses interrogations quant à l’avenir de la région. Va-t-elle ouvrir la voie à un processus de paix ou au contraire attiser les braises d’un conflit qui n’en finit pas ?
Yahya Sinouar, un leader controversé
Yahya Sinouar, 65 ans, était à la tête du Hamas dans la bande de Gaza depuis 2017. Figure emblématique du mouvement islamiste palestinien, il avait pris les rênes de l’organisation après l’élection d’Ismaël Haniyeh comme chef du bureau politique. Sous sa direction, le Hamas a continué à s’opposer farouchement à Israël, multipliant les tirs de roquettes vers le territoire israélien.
Mais Sinouar était aussi un homme controversé, accusé par Israël d’être un « terroriste » et tenu pour responsable de la mort de nombreux civils. Sa disparition, dans des circonstances encore floues, risque de déstabiliser le Hamas et de créer un vide du pouvoir au sein de l’organisation.
Une opportunité pour la paix selon Blinken
Pour Antony Blinken, secrétaire d’État américain actuellement en visite en Israël, la mort de Sinouar représente une « occasion importante » de mettre fin à la guerre à Gaza. Lors d’une conférence de presse à Jérusalem, il a déclaré : « Nous pensons que c’est le bon moment pour toutes les parties de réduire les tensions et de commencer à travailler à une solution durable du conflit ».
Blinken a également appelé Israël à prendre des « mesures supplémentaires » pour permettre l’acheminement de l’aide humanitaire à Gaza, soumise à un blocus israélien depuis la prise de contrôle de l’enclave par le Hamas en 2007. Une demande qui témoigne de l’urgence de la situation sur le terrain, où les civils paient un lourd tribut au conflit.
« Nous pensons que c’est le bon moment pour toutes les parties de réduire les tensions et de commencer à travailler à une solution durable du conflit »
Antony Blinken, secrétaire d’État américain
Le Hezbollah menace d’une escalade
Mais les appels au calme de Washington peinent à trouver un écho au Moyen-Orient. Au Liban voisin, le Hezbollah pro-iranien, allié du Hamas, a promis de venger la mort de Sinouar et menacé d’une escalade contre Israël. Dans la banlieue sud de Beyrouth, fief du mouvement, des habitants en colère ont brûlé des drapeaux israéliens et scandé des slogans hostiles à l’État hébreu.
Une tension qui s’est encore accrue avec l’annonce par Tsahal d’avoir éliminé Hachem Safieddine, pressenti pour succéder à Hassan Nasrallah à la tête du Hezbollah. Le mouvement chiite avait indiqué début octobre avoir « perdu le contact » avec Safieddine après des frappes israéliennes près de Beyrouth, sans confirmer sa mort. Une information finalement confirmée mardi soir par l’armée israélienne, pour qui la disparition du numéro deux du Hezbollah « porte un nouveau coup » à l’organisation.
Israël en position de force
Avec la mort quasi simultanée de deux ennemis jurés, le Hamas et le Hezbollah, Israël semble en position de force. Délesté de chefs historiques, les deux mouvements sont affaiblis et désorganisés, tandis que l’État hébreu peut compter sur le soutien indéfectible de son allié américain. Une situation qui pourrait inciter le gouvernement de Benyamin Nétanyahou à accentuer la pression militaire pour tenter d’obtenir des gains stratégiques.
Mais attention à ne pas se réjouir trop vite. Car si l’élimination de Sinouar et Safieddine porte un rude coup au Hamas et au Hezbollah, elle risque aussi de susciter un désir de vengeance et une volonté de montrer que les mouvements restent puissants malgré la perte de leurs leaders. Un engrenage dangereux qui pourrait mener à une nouvelle escalade de violence au Moyen-Orient.
Une paix encore lointaine
Malgré les espoirs suscités par la disparition de Sinouar, le chemin vers la paix apparaît encore long et semé d’embûches au Moyen-Orient. Les décennies de conflit ont laissé des blessures profondes et une méfiance tenace entre Israéliens et Palestiniens. Il faudra bien plus que la mort d’un homme, aussi influent soit-il, pour rapprocher les deux camps et les amener à dialoguer.
Le défi est immense, mais pas insurmontable. À condition que toutes les parties fassent preuve de bonne volonté et acceptent des compromis douloureux. Les Palestiniens devront renoncer à la violence et reconnaître le droit d’Israël à exister. Les Israéliens devront mettre fin à la colonisation et permettre la création d’un État palestinien viable. Deux concessions auxquelles ni le Hamas ni le gouvernement Nétanyahou ne semblent prêts à ce stade.
Un nouveau chapitre incertain
Pour l’heure, c’est donc un nouveau chapitre incertain qui s’ouvre au Moyen-Orient. Un chapitre dans lequel le Hamas et le Hezbollah devront se reconstruire sans leurs chefs historiques, tandis qu’Israël tentera de tirer profit de leur affaiblissement. Un chapitre où les armes continueront probablement de parler, à Gaza, au Liban, et ailleurs dans la région.
Mais c’est aussi un chapitre qui pourrait réserver des surprises et des opportunités inattendues. Qui sait si la disparition de Sinouar et Safieddine ne va pas rebattre les cartes et redistribuer les rapports de force au sein du Hamas et du Hezbollah ? Si de nouveaux dirigeants plus pragmatiques et ouverts au dialogue ne vont pas émerger ? Et si la communauté internationale, États-Unis en tête, ne va pas saisir cette occasion pour relancer le processus de paix ?
Autant de questions qui restent ouvertes et dont les réponses façonneront le visage du Moyen-Orient de demain. Une région qui, plus que jamais, a besoin de paix, de stabilité et de développement pour tourner la page des conflits et offrir un avenir meilleur à ses peuples. La mort de Yahya Sinouar n’est peut-être qu’un début…