Une vague de soutien sans précédent déferle dans le monde littéraire suite à l’arrestation controversée de l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal. Plusieurs Prix Nobel de littérature, dont Annie Ernaux, Jean-Marie Le Clézio, Orhan Pamuk et Wole Soyinka, ainsi que d’éminents auteurs comme Salman Rushdie et Roberto Saviano, ont uni leurs voix pour exiger sa libération immédiate dans une tribune publiée sur le site de l’hebdomadaire Le Point.
Initiée par Kamel Daoud, Prix Goncourt 2024 et compatriote de Sansal, cette tribune est un cri d’alarme face à ce qu’ils considèrent comme une grave atteinte à la liberté d’expression. Les signataires affirment ne pas pouvoir rester silencieux face à cette “terreur” qui cible les écrivains pour leurs idées. Ils soulignent l’urgence d’agir pour défendre “la liberté, le droit à la culture et nos vies à nous, écrivains”.
Une arrestation qui soulève l’indignation
Selon plusieurs sources médiatiques, Boualem Sansal, âgé de 75 ans, aurait été interpellé le 16 novembre dernier à l’aéroport d’Alger alors qu’il revenait de France. Une information confirmée par l’agence gouvernementale algérienne APS, sans toutefois préciser la date exacte de l’arrestation. Cette nouvelle a rapidement suscité l’inquiétude et l’indignation dans les milieux politiques et littéraires, tant en Algérie qu’à l’international.
Connu pour son engagement contre le fondamentalisme religieux et l’autoritarisme, Boualem Sansal est une figure emblématique de la littérature algérienne contemporaine. Son arrestation est perçue par beaucoup comme une tentative de museler une voix critique et indépendante. Son éditeur Gallimard a exprimé sa “très vive inquiétude” et appelé à sa “libération immédiate”, tandis que l’entourage du président français Emmanuel Macron s’est dit “très préoccupé” par cette disparition.
Des motifs d’arrestation controversés
Si les raisons officielles de l’arrestation de Boualem Sansal restent floues, certains médias avancent que les autorités algériennes auraient mal pris ses récentes déclarations au média français Frontières, réputé d’extrême droite. Dans cet entretien, l’écrivain reprenait la position marocaine selon laquelle le territoire algérien aurait été tronqué sous la colonisation française au profit de l’Algérie.
L’agence de presse officielle algérienne APS a vivement critiqué la France pour avoir pris “la défense d’un négationniste qui remet en cause l’existence, l’indépendance, l’histoire, la souveraineté et les frontières de l’Algérie”, qualifiant Sansal de “pantin utile”. Ces propos illustrent la tension diplomatique actuelle entre Paris et Alger, exacerbée depuis le soutien français au plan d’autonomie marocain pour le Sahara occidental en juillet dernier.
Un combat pour la liberté d’expression
Au-delà du cas individuel de Boualem Sansal, c’est la question fondamentale de la liberté d’expression qui est en jeu. Les intellectuels signataires de la tribune y voient une dérive inquiétante et un dangereux précédent. Ils rappellent que le droit de s’exprimer librement, même de manière critique ou dissidente, est un pilier essentiel de toute société démocratique.
La littérature est un espace de liberté et de résistance face à l’oppression. En s’attaquant à un écrivain, c’est toute la création qui est menacée.
Un Prix Nobel signataire de la tribune
Cette mobilisation internationale en faveur de Boualem Sansal témoigne de la solidarité qui unit les écrivains et les défenseurs des droits humains à travers le monde. Elle met en lumière l’importance cruciale de protéger la liberté d’expression, surtout lorsqu’elle dérange ou bouscule le pouvoir en place. Car comme le souligne un autre signataire, “une société qui emprisonne ses écrivains est une société qui a peur de se regarder en face”.
Un appel à la communauté internationale
Face à cette situation préoccupante, les Prix Nobel et écrivains appellent la communauté internationale à se mobiliser pour obtenir la libération de Boualem Sansal et de tous les autres écrivains emprisonnés pour leurs idées. Ils soulignent la nécessité d’une pression diplomatique concertée pour faire respecter les droits fondamentaux en Algérie et ailleurs.
Nous demandons aux gouvernements, aux organisations de défense des droits humains et à tous les citoyens épris de liberté de se joindre à nous pour exiger la libération immédiate et inconditionnelle de Boualem Sansal.
Extrait de la tribune des Prix Nobel et écrivains
Cet appel à l’action vise à créer un mouvement de soutien international, à l’image de ceux qui se sont constitués par le passé pour d’autres écrivains persécutés comme Salman Rushdie ou Liu Xiaobo. L’objectif est de faire triompher la liberté d’expression face à l’arbitraire et à la répression, et de rappeler que les mots et les idées ne sauraient être enchaînés.
L’affaire Boualem Sansal jette une lumière crue sur la situation des droits humains en Algérie et sur les défis auxquels sont confrontés les intellectuels critiques dans les régimes autoritaires. Elle rappelle l’importance vitale de défendre sans relâche la liberté d’expression, ce droit fondamental qui permet aux sociétés d’avancer, de se remettre en question et de progresser. Car comme le disait Albert Camus, autre illustre écrivain franco-algérien, “la liberté, c’est le droit de ne pas mentir”.