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Belgique : Retour Surprise du Nucléaire

La Belgique fait volte-face et mise sur le nucléaire pour son avenir énergétique. Pourquoi ce choix soudain ? Quels impacts pour le pays ? Cliquez pour tout savoir.

Imaginez un pays qui, après des décennies de débats passionnés, décide de faire marche arrière sur une promesse historique : abandonner l’énergie nucléaire. C’est exactement ce qui se passe en Belgique, où un vote récent a bouleversé les plans établis depuis 2003. Ce revirement, loin d’être une simple formalité administrative, soulève des questions cruciales sur l’avenir énergétique, la sécurité nationale et les équilibres environnementaux. Pourquoi la Belgique, longtemps tiraillée entre écologie et pragmatisme, choisit-elle aujourd’hui de prolonger la vie de ses réacteurs ? Plongeons dans ce virage inattendu.

Un Revirement Historique pour l’Énergie Belge

En 2003, la Belgique s’engageait sur une voie audacieuse : sortir complètement du nucléaire d’ici 2025. Cette décision, portée par une coalition incluant les Verts, visait à répondre aux préoccupations écologiques et aux craintes liées à la sécurité des réacteurs. Pourtant, en mai 2025, les députés belges ont voté à une large majorité pour abroger cette loi emblématique, marquant un tournant majeur dans la politique énergétique du pays. Ce choix ne se limite pas à un simple prolongement de réacteurs existants : il ouvre la porte à de nouvelles capacités nucléaires, un scénario impensable il y a encore quelques années.

Ce revirement s’inscrit dans un contexte où la Belgique, comme ses voisins européens, fait face à des défis énergétiques sans précédent. La crise déclenchée par la guerre en Ukraine en 2022 a mis en lumière la fragilité des approvisionnements en énergies fossiles, tandis que les ambitions climatiques exigent des solutions fiables et bas-carbone. Le nucléaire, avec ses 42 % de la production électrique belge, apparaît soudain comme un pilier incontournable.

Les Raisons d’un Changement de Cap

Pourquoi un pays qui s’était engagé à fermer ses sept réacteurs opte-t-il aujourd’hui pour leur maintien, voire leur expansion ? Plusieurs facteurs expliquent ce virage stratégique.

D’abord, la sécurité énergétique. La Belgique a déjà déconnecté trois de ses réacteurs depuis 2022, et deux autres doivent l’être à l’automne 2025. Mais la perspective d’une pénurie d’électricité, surtout en hiver, a poussé le gouvernement à revoir ses priorités. La flambée des prix de l’énergie, exacerbée par la réduction des importations de gaz russe, a rendu le nucléaire plus attractif, car il offre une production stable et prévisible.

Le Parlement fédéral vient de tourner la page de deux décennies de blocages pour ouvrir la voie à un modèle énergétique réaliste et résilient.

Mathieu Bihet, ministre belge de l’Énergie

Ensuite, les ambitions climatiques. La Belgique s’est engagée à réduire ses émissions de gaz à effet de serre, et le nucléaire, malgré ses controverses, est une source d’énergie bas-carbone. Contrairement aux centrales à gaz ou à charbon, les réacteurs émettent très peu de CO2, ce qui en fait un allié dans la lutte contre le changement climatique.

Enfin, le pragmatisme politique. Le gouvernement actuel, dirigé par le conservateur Bart De Wever, mise sur une capacité nucléaire de 4 gigawatts, équivalant à quatre réacteurs. Cette stratégie, soutenue par une coalition de cinq partis, vise à garantir une énergie abordable tout en réduisant la dépendance aux importations.

Les Réacteurs au Cœur du Débat

La Belgique dispose de deux sites nucléaires principaux : Doel, près d’Anvers, et Tihange, dans la région de Liège. Ces installations, exploitées par une filiale du groupe français Engie, ont fourni pendant des décennies une énergie fiable. Mais leur avenir est désormais au centre des discussions.

En 2023, un accord avait déjà été conclu pour prolonger la vie de deux réacteurs, Doel 4 et Tihange 3, jusqu’en 2035. Le vote de mai 2025 va plus loin, en supprimant l’interdiction de construire de nouvelles unités. Cependant, un obstacle majeur se profile : l’opérateur actuel, Engie, semble réticent à investir davantage dans le nucléaire, une technologie qui ne fait plus partie de sa stratégie à long terme.

Engie reste le propriétaire des réacteurs, mais il faudra ouvrir un dialogue pour connaître leurs intentions.

– Mathieu Bihet

Ce désintérêt d’Engie pourrait compliquer les ambitions du gouvernement. Si l’exploitant refuse de prolonger d’autres réacteurs ou d’investir dans de nouveaux, la Belgique devra soit trouver un nouvel opérateur, soit nationaliser une partie de son parc nucléaire, une option coûteuse et politiquement sensible.

Un Choix Controversé

Le retour en force du nucléaire ne fait pas l’unanimité. Les écologistes, en particulier, dénoncent une décision opportuniste qui compromet les idéaux de la transition énergétique. Pour Samuel Cogolati, co-président du parti Ecolo, ce revirement est une “opération de communication” sans réel impact, car seuls Doel 4 et Tihange 3 sont techniquement prolongeables, les autres réacteurs ne répondant plus aux normes de sûreté.

Les critiques soulignent également les risques liés au nucléaire : gestion des déchets radioactifs, coût élevé des prolongations, et menace d’accidents, même si les réacteurs belges sont soumis à des contrôles stricts. À l’inverse, les partisans du nucléaire arguent que les alternatives, comme les énergies renouvelables, ne sont pas encore assez développées pour compenser la perte de capacité nucléaire.

Pour mieux comprendre les enjeux, voici un résumé des arguments des deux camps :

  • Pour le nucléaire : Stabilité énergétique, faible empreinte carbone, réduction de la dépendance aux importations.
  • Contre le nucléaire : Risques d’accidents, coûts de gestion des déchets, frein au développement des renouvelables.

Le Contexte Européen

La décision belge s’inscrit dans un mouvement plus large en Europe. La crise énergétique de 2022, déclenchée par le conflit ukrainien, a forcé de nombreux pays à réévaluer leurs stratégies. La France, par exemple, a renforcé son engagement dans le nucléaire, tandis que l’Allemagne a finalisé sa sortie de l’atome en 2023, au prix d’une dépendance accrue au gaz.

En Belgique, le gouvernement De Wever voit le nucléaire comme un pont vers un avenir énergétique durable, en complément des énergies renouvelables comme l’éolien et le solaire. Mais cette stratégie hybride soulève des questions : combien de temps le pays pourra-t-il s’appuyer sur des réacteurs vieillissants ? Et quelles seront les implications financières et environnementales à long terme ?

Les Défis à Venir

Prolonger la vie des réacteurs ou en construire de nouveaux ne sera pas une mince affaire. Voici les principaux obstacles auxquels la Belgique devra faire face :

Défi Description
Financement Les prolongations et nouvelles constructions nécessitent des investissements massifs, que l’opérateur actuel pourrait refuser.
Sécurité Les réacteurs doivent répondre à des normes strictes, ce qui implique des mises à niveau coûteuses.
Acceptation publique Le nucléaire reste un sujet clivant, et le gouvernement devra convaincre une population divisée.

En outre, la gestion des déchets nucléaires reste un casse-tête. Si la Belgique prolonge ses réacteurs, elle devra accélérer ses efforts pour trouver des solutions d’enfouissement sûres, un processus coûteux et techniquement complexe.

Vers un Modèle Hybride ?

Le gouvernement belge ne voit pas le nucléaire comme une solution exclusive, mais comme un complément aux énergies renouvelables. L’objectif est de créer un modèle énergétique “résilient”, capable de répondre aux fluctuations de la demande tout en respectant les engagements climatiques. Les éoliennes en mer du Nord et les panneaux solaires devraient jouer un rôle croissant, mais leur production intermittente nécessite un soutien stable, que le nucléaire peut fournir.

Ce modèle hybride pourrait inspirer d’autres pays européens confrontés à des dilemmes similaires. Mais pour réussir, la Belgique devra relever des défis techniques, financiers et politiques colossaux. Le dialogue avec Engie, les investissements dans la recherche nucléaire, et la communication avec le public seront des étapes cruciales.

Et Après ?

Le vote de mai 2025 marque un tournant, mais il n’est que le début d’un long chemin. La Belgique doit maintenant transformer ses ambitions en réalité, dans un contexte où chaque décision énergétique a des répercussions globales. Le nucléaire, jadis perçu comme une relique du passé, retrouve une place centrale dans le débat. Mais cette renaissance suffira-t-elle à garantir un avenir énergétique stable et durable ?

Pour l’instant, une chose est sûre : la Belgique a choisi de regarder vers l’avenir sans tourner le dos à son passé nucléaire. Reste à savoir si ce pari audacieux portera ses fruits, ou s’il réveillera les vieux démons d’un débat jamais vraiment clos.

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