L’investiture de Donald Trump pour un second mandat à la Maison Blanche sonne comme un électrochoc pour l’Europe. Le président du Rassemblement national Jordan Bardella appelle ainsi à une « suspension immédiate » du pacte vert européen, le fameux « Green Deal », destiné à atteindre la neutralité carbone d’ici 2050 sur le Vieux Continent. Une prise de position radicale face à la nouvelle donne géopolitique.
Le spectre d’une guerre commerciale avec les États-Unis
Selon une source proche du dossier, le retour de Donald Trump à la tête des États-Unis risque de déboucher sur une concurrence féroce avec une Amérique dérégulée. Le milliardaire républicain, connu pour son climato-scepticisme, entend bien dynamiser l’économie américaine en levant un maximum de contraintes environnementales. Un vent de dérégulation qui pourrait pousser les entreprises européennes à délocaliser outre-Atlantique.
Pour Jordan Bardella, pas de doute : il faut répliquer sans attendre en suspendant le Green Deal. Ce plan, adopté en 2020 sous l’impulsion de la Commission européenne, vise à faire de l’Europe le premier continent neutre en carbone d’ici 2050. Un objectif ambitieux qui passe par une vaste transformation de l’économie, avec notamment la fin des moteurs thermiques en 2035.
Le Pacte vert est probablement l’un des plus grands plans de décroissance qu’ait connu notre continent ces 50 dernières années.
Un « plan de décroissance » pour l’Europe ?
Mais pour le patron du RN, ce Green Deal est un boulet pour la compétitivité européenne. « C’est probablement l’un des plus grands plans de décroissance qu’ait connu notre continent ces 50 dernières années », assène Jordan Bardella dans les colonnes du JDD. À ses yeux, ces régulations « vertes » risquent de plomber de nombreux pans de l’économie, « de l’agriculture à l’industrie automobile, de l’intelligence artificielle à notre politique énergétique ».
Le spectre ultime : voir l’Europe reléguée à « la marge du monde » face aux grandes puissances que sont les États-Unis ou la Chine. Pour exister dans cette nouvelle ère géopolitique, Jordan Bardella exhorte donc à « déverrouiller toutes les contraintes qui pèsent sur la croissance en France et en Europe ». Une vision souverainiste partagée par une partie de la droite et de l’extrême-droite européenne.
Vers une Europe plus stratège ?
Pourtant, d’autres voix s’élèvent pour défendre une approche différente. Plutôt que de renoncer à ses ambitions climatiques, l’Europe ne devrait-elle pas miser sur l’innovation pour rester dans la course ? C’est le pari des partisans d’une « Europe puissance », prônant un renforcement de la souveraineté industrielle et technologique du Vieux Continent.
Des aides ciblées aux « champions européens », un meilleur contrôle des investissements étrangers, une plus grande autonomie énergétique et numérique… Les leviers sont nombreux pour permettre à l’Europe de défendre son modèle sans se couper du reste du monde. Une gageure face au rouleau compresseur américain et aux appétits chinois. Mais peut-être aussi la clé pour faire du Green Deal européen un atout plutôt qu’un handicap dans la compétition mondiale.
La proposition choc de Jordan Bardella a en tout cas le mérite de poser la question de la place de l’Europe face aux grandes puissances. Saura-t-elle se réinventer et parler d’une seule voix pour ne pas être le dindon de la farce géopolitique ? Les prochains mois, et les réactions des dirigeants européens au « choc Trump », apporteront sans doute des éléments de réponse. L’avenir du projet européen pourrait bien se jouer maintenant.
