Dans les ruelles animées de Marseille, un phénomène attire l’œil : les barbershops, ces salons de coiffure pour hommes aux devantures éclatantes, se multiplient à une vitesse fulgurante. À deux pas du Vieux-Port ou dans les quartiers populaires, ils rallument des néons là où les commerces traditionnels s’éteignent. Mais cette effervescence, entre opportunités pour jeunes entrepreneurs et zones d’ombre réglementaires, interroge : les barbershops poussent-ils trop vite ?
L’Essor fulgurant des Barbershops à Marseille
Depuis 2019, les barbershops ont transformé le paysage urbain marseillais. Avec leurs fauteuils chromés, leurs dégradés impeccables et leurs prix défiant toute concurrence – parfois à peine 10 euros la coupe –, ces salons séduisent une clientèle jeune et diverse. Leur esthétique soignée, inspirée des cultures hip-hop et streetwear, contraste avec les vitrines désuètes des anciens commerces. Mais au-delà de l’image, c’est un modèle économique qui intrigue.
Dans des quartiers comme Noailles ou La Castellane, où les rideaux de fer s’abaissent souvent, ces salons redonnent vie aux rues. Ils attirent non seulement des clients, mais aussi des entrepreneurs, souvent jeunes, qui y voient une porte d’entrée accessible dans le monde des affaires. Pourtant, cette croissance rapide soulève des questions sur la viabilité et la légalité de certaines pratiques.
Une Aubaine pour les Jeunes Entrepreneurs
Pour beaucoup, ouvrir un barbershop est synonyme de rêve entrepreneurial. Les coûts d’entrée sont relativement faibles : un local modeste, quelques fauteuils, et une bonne dose de style suffisent. Contrairement à d’autres secteurs, aucune qualification formelle n’est exigée pour manier les ciseaux, bien que des formations courtes existent. Cette accessibilité attire une génération en quête d’indépendance.
« C’est plus qu’un salon, c’est un lieu de vie. Les gens viennent pour la coupe, mais aussi pour l’ambiance, les discussions », explique un jeune barbier du quartier Belsunce.
Ces espaces deviennent des hubs sociaux, où se croisent musique, culture urbaine et échanges communautaires. Ils offrent une alternative aux cafés ou aux salles de sport, avec un modèle économique basé sur des coupes rapides et abordables. Mais cette simplicité cache une réalité plus complexe.
Des Règles Floues dans un Secteur en Plein Boom
Si les barbershops dynamisent l’économie locale, ils attirent aussi l’attention des autorités. Les contrôles se multiplient, visant des pratiques comme le travail non déclaré, l’absence de certifications ou des loyers payés en liquide. Dans certains cas, ces salons serviraient de façade à des activités moins avouables, bien que cela reste marginal.
Les règles encadrant le secteur sont souvent mal comprises ou ignorées. Par exemple, tout salon doit respecter des normes d’hygiène strictes, mais les inspections révèlent parfois des manquements. De plus, la concurrence féroce pousse certains à casser les prix, au détriment de la qualité ou de la légalité.
Les chiffres clés du boom des barbershops :
- Plus de 200 barbershops recensés à Marseille depuis 2019.
- Une coupe moyenne à 10-15 euros, contre 20-30 euros dans les salons traditionnels.
- Près de 60 % des gérants ont moins de 30 ans.
Un Impact Contrasté sur l’Économie Urbaine
Les barbershops redessinent la carte commerciale de Marseille. Dans des zones autrefois désertées, ils attirent du passage, favorisant l’ouverture d’autres commerces, comme des snacks ou des boutiques de vêtements. Ce dynamisme est particulièrement visible autour du Vieux-Port, où les néons des salons illuminent les soirées.
Cependant, cet essor peut aussi fragiliser le tissu économique. Les loyers augmentent dans les quartiers prisés, chassant les petits commerces traditionnels. De plus, la saturation du marché pourrait mener à une guerre des prix, menaçant la pérennité des salons les moins structurés.
Les Barbershops, Miroir des Tensions Sociales
Au-delà de l’économie, les barbershops reflètent les dynamiques sociales de Marseille. Ils incarnent une forme de réussite accessible dans des quartiers où les opportunités manquent. Pourtant, ils cristallisent aussi des tensions : certains habitants y voient un symbole de gentrification, tandis que d’autres dénoncent une informalité qui nuit à l’image de la ville.
« Ces salons, c’est à la fois une chance et un problème. Ils créent du lien, mais parfois, on se demande ce qui se passe derrière », confie un commerçant voisin.
Les barbershops sont ainsi à la croisée des chemins : lieux d’intégration pour certains, ils suscitent la méfiance chez d’autres. Leur succès repose sur leur capacité à naviguer entre ces perceptions contrastées.
Vers une Régulation Plus Stricte ?
Face à cette expansion, les autorités locales envisagent des mesures pour encadrer le secteur. Parmi les pistes : des formations obligatoires pour les barbiers, des contrôles renforcés sur les normes d’hygiène et une meilleure traçabilité des transactions financières. Ces initiatives visent à préserver les bénéfices économiques tout en limitant les dérives.
Pour les gérants, l’enjeu est de taille. Une régulation trop stricte pourrait freiner l’élan entrepreneurial, tandis qu’un laxisme prolongé risquerait de ternir l’image du secteur. Trouver un équilibre sera crucial pour garantir la pérennité de ce phénomène.
Un Phénomène qui Redéfinit Marseille
Les barbershops ne sont pas qu’une mode passagère. Ils incarnent une transformation profonde de Marseille, où l’économie informelle côtoie l’innovation entrepreneuriale. Leur succès repose sur une alchimie unique : des prix bas, une ambiance communautaire et une esthétique qui parle à la jeunesse.
Pourtant, leur avenir dépendra de leur capacité à s’adapter. Entre régulation et concurrence, les barbershops devront prouver qu’ils sont plus qu’un feu de paille. En attendant, ils continuent d’écrire une nouvelle page de l’histoire urbaine marseillaise.
| Aspect | Avantages | Défis |
|---|---|---|
| Économie | Création d’emplois, dynamisme commercial | Concurrence féroce, informalité |
| Social | Lieux de lien social, intégration | Tensions avec certains habitants |
| Régulation | Normes d’hygiène renforcées | Risque de freiner l’entrepreneuriat |
En conclusion, les barbershops de Marseille sont bien plus qu’un simple phénomène de mode. Ils incarnent les aspirations et les contradictions d’une ville en mutation. Leur avenir, entre opportunités et défis, reste à écrire, mais une chose est sûre : ils ont déjà marqué les rues et les esprits.
