Et si la voiture de demain n’appartenait plus à personne, mais à tout le monde ? Dans le Val-de-Marne, l’autopartage fait un retour discret, mais prometteur. À Alfortville, une nouvelle station Citiz vient d’ouvrir ses portes, tandis qu’Arcueil prolonge son expérimentation avec Getaround. Ces initiatives, encore modestes, pourraient redessiner la mobilité urbaine et répondre aux attentes d’une population en quête de solutions pratiques et durables. Mais comment ces services s’inscrivent-ils dans un territoire où la voiture individuelle règne encore en maître ?
L’Autopartage : Une Nouvelle Façon de Bouger
L’autopartage, c’est la promesse d’une voiture accessible sans les contraintes de la propriété. Fini les frais d’entretien, d’assurance ou de parking : vous payez uniquement pour le temps d’utilisation. Dans le Val-de-Marne, ce concept séduit de plus en plus, notamment dans des communes comme Alfortville et Arcueil, où les habitants cherchent des alternatives aux transports en commun parfois saturés.
Le principe est simple : des véhicules, souvent à faible émission de CO2, sont disponibles à des stations fixes. Les usagers réservent via une application, déverrouillent la voiture et la ramènent au même endroit après usage. Ce système, déjà populaire dans des métropoles comme Strasbourg ou Montréal, commence à trouver sa place en Île-de-France.
Alfortville : Citiz, le Pionnier Local
À Alfortville, l’arrivée d’une troisième station Citiz marque un tournant. Ce réseau, né en 2001 à Strasbourg, propose une flotte d’une vingtaine de véhicules répartis entre Alfortville, Suresnes et Montreuil. Les voitures, disponibles à partir de 3 euros de l’heure, séduisent par leur simplicité et leur coût abordable.
J’ai revendu ma voiture il y a quinze ans, et avec Citiz, je retrouve la liberté sans les contraintes. Les voitures sont toujours disponibles, et l’assurance est incluse.
Dominique, retraité et usager régulier à Alfortville
Pour Dominique, comme pour d’autres, l’autopartage est une solution idéale pour des besoins ponctuels : faire ses courses, rendre visite à un proche ou partir en week-end. Mais ce n’est pas seulement une question de praticité. Citiz, organisé en Scop (société coopérative et participative), met l’accent sur des valeurs de partage et de durabilité, un argument qui résonne auprès des habitants sensibles à l’écologie.
Arcueil : Getaround, l’Expérimentation qui Dure
À Arcueil, l’autopartage prend une forme différente avec Getaround. Depuis un an et demi, trois stations accueillent des véhicules partagés, installés sur des places équipées de bornes de recharge électrique. Résultat ? En une année, ces voitures ont parcouru 20 000 kilomètres et ont été louées pendant 7 000 heures.
Ce projet, soutenu par le Sipperec, vise à intégrer l’autopartage dans une stratégie plus large de réduction de la dépendance à la voiture individuelle. Le maire d’Arcueil, Christian Métairie, ne cache pas son enthousiasme :
Ce service réduit la circulation et favorise des véhicules moins polluants. Mais il faut du temps pour changer les habitudes.
Christian Métairie, maire d’Arcueil
Si les débuts sont encourageants, le défi reste de convaincre une population habituée à posséder sa propre voiture. L’expérimentation, prolongée jusqu’en octobre 2025, pourrait ouvrir la voie à une adoption plus large.
Pourquoi l’Autopartage Peine à S’Imposer
Malgré ces avancées, l’autopartage reste marginal dans le Val-de-Marne. La fin d’Autolib’ en 2018 a laissé un vide que peu de services ont réussi à combler. Les raisons sont multiples :
- Une offre limitée : Contrairement à Paris, où Free2move domine, le Val-de-Marne manque de réseaux structurés.
- Des freins culturels : La voiture reste un symbole de liberté pour beaucoup, et renoncer à la propriété demande un changement de mentalité.
- Des défis logistiques : Vandalisme, comme celui qui a poussé Zity à quitter Paris, et coûts d’entretien freinent les opérateurs.
Pourtant, les bénéfices sont indéniables. Une étude citée par Citiz montre qu’une voiture partagée remplace jusqu’à huit véhicules personnels, libérant ainsi de l’espace public. À Alfortville, chaque station Citiz libère en moyenne trois places de stationnement, un atout précieux dans des zones densément peuplées.
Un Impact Écologique et Social
L’autopartage ne se contente pas de désengorger les routes. Il s’inscrit dans une démarche de mobilité durable, avec des véhicules à faible émission et, dans certains cas, électriques. À Arcueil, les stations Getaround utilisent des bornes de recharge, renforçant l’attrait écologique du service.
Le saviez-vous ? Une voiture partagée émet jusqu’à 30 % de CO2 en moins par utilisateur qu’une voiture individuelle, selon une étude de l’Ademe.
Sur le plan social, l’autopartage démocratise l’accès à la mobilité. Pour les foyers à faible revenu, qui ne peuvent assumer les coûts d’une voiture, ces services offrent une alternative économique. À Alfortville, Citiz propose même des utilitaires pour transporter des objets volumineux, un service plébiscité par les habitants.
Vers une Expansion dans le Val-de-Marne ?
Le succès des initiatives à Alfortville et Arcueil pourrait inspirer d’autres communes. Le territoire Paris Est Marne et Bois, qui regroupe 13 villes, explore déjà des projets d’autopartage. Mais pour que le modèle s’impose, plusieurs conditions doivent être réunies :
- Soutien politique : Les mairies doivent investir dans des infrastructures, comme des stations dédiées.
- Sensibilisation : Des campagnes pour promouvoir l’autopartage auprès des habitants.
- Partenariats : Collaboration avec des opérateurs comme Citiz ou Getaround pour étoffer l’offre.
À Alfortville, la municipalité a déjà intégré l’autopartage dans ses engagements de campagne de 2020. Julien Boudin, premier adjoint au maire, voit dans ce service une réponse aux attentes des anciens usagers d’Autolib’ :
L’autopartage complète les solutions comme Vélib’. C’est un outil pour réduire la place de la voiture individuelle dans nos villes.
Julien Boudin, premier adjoint au maire d’Alfortville
Comparaison des Services : Citiz vs Getaround
Pour mieux comprendre ce que proposent ces deux opérateurs, voici un tableau comparatif :
Critère | Citiz | Getaround |
---|---|---|
Localisation | Al Respondentsfortville, Suresnes, Montreuil | Arcueil |
Tarif horaire | À partir de 3 € | Variable selon le modèle |
Type de véhicules | Compactes, utilitaires | Électriques, hybrides |
Modèle économique | Scop (coopérative) | Plateforme privée |
Chaque service a ses spécificités. Citiz mise sur une approche communautaire et des tarifs compétitifs, tandis que Getaround privilégie la flexibilité et les véhicules électriques.
Les Défis de l’Autopartage en Banlieue
Si l’autopartage séduit en ville, son adoption en banlieue reste complexe. Les habitants du Val-de-Marne, souvent dépendants de leur voiture pour rejoindre Paris ou d’autres pôles d’emploi, hésitent à franchir le pas. Les distances plus longues et les infrastructures moins denses compliquent l’équation.
Pour Pierre Martin-Paquet, chargé de développement chez Citiz, la clé réside dans l’adaptation :
Nous devons proposer des solutions qui répondent aux besoins spécifiques des banlieues, comme des utilitaires pour les déménagements ou des stations près des gares.
Pierre Martin-Paquet, Citiz
Les opérateurs doivent également composer avec des contraintes financières. Installer une station coûte cher, et les redevances versées aux communes, comme à Alfortville, pèsent sur les budgets. Pourtant, les bénéfices à long terme – moins de pollution, moins de congestion – justifient ces investissements.
L’Autopartage, un Pari sur l’Avenir
Dans un contexte de crise climatique et de saturation urbaine, l’autopartage apparaît comme une solution d’avenir. En réduisant le nombre de voitures en circulation, il contribue à des villes plus respirables et plus équitables. Mais pour qu’il s’impose, il faudra surmonter les résistances culturelles et investir massivement dans les infrastructures.
Dans le Val-de-Marne, les premiers pas de Citiz et Getaround sont un signal encourageant. Si d’autres communes suivent l’exemple d’Alfortville et Arcueil, le département pourrait devenir un modèle de mobilité partagée. Reste à savoir si les habitants sont prêts à troquer leur volant pour une application.
Et vous, seriez-vous prêt à partager votre voiture ?
En attendant, les initiatives locales continuent de tracer la voie. L’autopartage, encore timide, pourrait bien devenir le moteur d’une révolution silencieuse dans le Val-de-Marne.