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Auch Sous le Choc : Une Maison Criblée de Balles en Pleine Nuit

Mercredi soir, rue d’Angerville à Auch : des rafales de pistolet-mitrailleur déchirent la nuit et criblent une maison. Moins de 24 heures après, la ville entière est placée sous haute protection. Mais pourquoi une telle violence dans le Gers, d’habitude si calme ? L’enquête commence à peine et déjà...

Il est 22 heures, un mercredi de décembre comme les autres dans le quartier tranquille de la rue d’Angerville à Auch. Les enfants dorment, les volets sont fermés, et la ville se prépare doucement aux fêtes. Et puis, soudain, le bruit. Un crépitement sec, rapide, interminable. Des dizaines d’impacts qui font trembler les murs. Une maison vient d’être littéralement mitraillée.

Quand les premiers policiers arrivent sur place, le spectacle est saisissant : la porte d’entrée est constellée de trous, la façade ressemble à une passoire, une voiture garée devant est touchée elle aussi. Par miracle, personne n’est blessé. Mais le message, lui, est limpide. Quelqu’un a voulu terroriser une famille entière.

Une ville paisible brutalement réveillée

Auch, préfecture du Gers, 23 000 habitants, terre de foie gras et d’Armagnac, n’avait jamais connu pareille violence. Ici, les faits divers se résument généralement à des vols de cuivre ou à des incivilités mineures. Une fusillade à l’arme de guerre, c’est du jamais-vu.

Le commissaire Philippe Friedrich, directeur départemental de la sécurité publique, ne tourne pas autour du pot : dès le lendemain matin, il obtient des renforts exceptionnels. Trois équipages supplémentaires – huit fonctionnaires et deux chiens – arrivent de Toulouse, Montauban, Tarbes et Lourdes. Le dispositif est reconduit le vendredi et renforcé encore tout le week-end.

« Nous allons mettre en place un certain nombre de patrouilles sur l’ensemble de la commune, notamment rue d’Angerville »

Philippe Friedrich, directeur départemental de la police nationale du Gers

Un déploiement rarement vu dans le département

Dans le Gers, on compte à peine une centaine de policiers nationaux pour tout le département. Recevoir autant de renforts en si peu de temps témoigne de la gravité avec laquelle l’État prend l’événement. Et pour cause : à une semaine de l’ouverture du marché de Noël, l’objectif est clair – rassurer la population et éviter toute contagion.

Les patrouilles sillonnent désormais la ville jour et nuit. Les habitants croisent des véhicules sérigraphiés là où ils n’en voyaient presque jamais. Les enfants regardent, impressionnés, les maîtres-chiens passer devant les écoles. La peur a changé de camp, du moins l’espère-t-on.

Que sait-on vraiment de l’attaque ?

À ce stade, les informations officielles restent minces. On parle d’un pistolet-mitrailleur, probablement du calibre 9 mm Parabellum, une arme de guerre particulièrement destructrice. Des dizaines de douilles ont été retrouvées sur place. L’enquête, confiée au parquet d’Auch, est en cours.

La maison ciblée appartient à une locataire dont la fille possède la voiture touchée. Rien n’indique pour l’instant qu’il s’agisse d’une erreur d’adresse. Les enquêteurs explorent toutes les pistes : règlement de comptes, intimidation liée à un trafic, vengeance personnelle… Dans une ville de cette taille, les rumeurs vont déjà bon train.

Le Gers, un département qui bascule doucement

Longtemps épargné, le Gers voit pourtant monter une forme d’insécurité nouvelle ces dernières années. Les exemples ne manquent pas, et ils sont inquiétants.

  • À Samatan, une soirée d’anniversaire avait dégénéré en mai 2024 : sept blessés, dont un jeune homme défiguré, entre la vie et la mort.
  • À Nogaro, un individu fiché S pour radicalisation islamiste vient d’être condamné à trente ans de prison pour polygamie, viols et actes de torture sur ses quatre épouses et ses vingt-huit enfants.
  • À Auch même, la mosquée a été profanée à plusieurs reprises, notamment avec des tranches de rosette déposées sur la poignée de porte.

Ces faits, apparemment sans lien, dessinent pourtant un tableau préoccupant : une ruralité qui n’est plus à l’abri des grandes pathologies urbaines – trafics, violences communautaires, radicalisation.

Le marché de Noël sous haute surveillance

À quelques jours de l’inauguration du marché de Noël, l’événement prend une dimension symbolique forte. Chaque année, des milliers de Gersois et de touristes viennent flâner entre les chalets, déguster vin chaud et foie gras. Cette année, les forces de l’ordre seront omniprésentes.

Les organisateurs, eux, serrent les dents. « On ne va pas se laisser impressionner », confie l’un d’eux sous couvert d’anonymat. Mais dans les conversations, la fusillade revient sans cesse. Les parents se demandent s’il faut vraiment emmener les enfants. Les commerçants craignent l’annulation de dernière minute.

Une population entre colère et résignation

Dans les cafés auscitains, on parle de tout sauf de rugby ou de gastronomie en ce moment. Les langues se délient. « Ça ne peut plus durer », lâche un retraité. « On nous parle de tranquillité rurale, mais regardez ce qui se passe… » Une mère de famille, elle, avoue ne plus dormir tranquille : « Ma fille habite à deux rues de là. Quand j’ai entendu les tirs à la télé, j’ai cru que c’était chez elle. »

Beaucoup pointent du doigt l’impuissance des autorités face à l’évolution de la délinquance. D’autres, plus rares, minimisent : « C’est un fait isolé, ça arrive partout maintenant. » Mais dans les regards, on lit la même inquiétude : et si c’était que le début ?

Que va-t-il se passer maintenant ?

L’enquête risque de durer plusieurs mois. Identifier les auteurs d’une fusillade nocturne, sans témoin direct, relève du parcours du combattant. Les caméras de vidéosurveillance, encore rares dans ce quartier, seront scrutées image par image. Les écoutes téléphoniques, les perquisitions, tout l’arsenal judiciaire est mobilisé.

Mais au-delà de l’aspect répressif, c’est toute la question de la prévention qui est posée. Comment une arme de guerre a-t-elle pu circuler librement dans le Gers ? Qui sont ces individus prêts à vider un chargeur sur une maison habitée ? Et surtout, jusqu’où ira cette spirale ?

En attendant les réponses, Auch retient son souffle. Les lumières de Noël brillent un peu moins fort cette année rue d’Angerville. Et dans chaque maison, on ferme les volets un peu plus tôt qu’avant.

Car quand une ville paisible se prend une rafale en pleine figure, c’est tout un département qui comprend, brutalement, que plus rien n’est comme avant.

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