C’est une première dans le retentissant procès des viols en série qui se tient actuellement devant la cour criminelle de Vaucluse, à Avignon. Lundi, pour la première fois depuis le début des plaidoiries, un avocat a plaidé l’acquittement de son client, reconnaissant une « imprudence » mais pas l’infraction, en l’absence de la « conscience du non consentement » de la victime.
Joseph C., accusé « atteinte sexuelle » et non de viol
L’accusé, Joseph C., 69 ans, est le seul des 51 prévenus de ce procès à ne pas être poursuivi pour viol ou tentative de viol, mais pour « atteinte sexuelle ». Les faits qui lui sont reprochés concernent Gisèle Pelicot, victime droguée à son insu par son mari Dominique Pelicot pendant une dizaine d’années, à leur domicile.
Contre ce retraité qui comparaît libre, le ministère public avait requis quatre ans de prison, la peine la moins élevée de son réquisitoire. Mais pour son avocat, Me Christophe Bruschi, Joseph C. ignorait que « l’ogre de Mazan » droguait son épouse.
La perception de la réalité « suppose quelques minutes »
Selon la défense, cette nuit du 9 au 10 juin 2020, l’accusé « avait le projet d’avoir une aventure libertine ». « Il s’assied sur le bord du lit, il fait quelques caresses sur les fesses et le sexe, ça va très vite, c’est tout sauf une agression sexuelle », a plaidé Me Bruschi. « La perception qu’on peut avoir de la réalité d’une situation, elle n’est jamais immédiate, cela suppose quelques minutes, ces minutes qu’il lui a fallu pour se rendre compte de la situation anormale », a-t-il ajouté.
Il n’y a pas d’élément moral, il n’a jamais eu la conscience du non consentement de Gisèle Pelicot et, dans ce cas, l’infraction n’existe pas.
Me Christophe Bruschi, avocat de Joseph C.
Des plaidoiries contrastées
Cette position tranche avec les plaidoiries des avocats des cinq premiers accusés la semaine dernière, dont celui de Dominique Pelicot, l' »ogre de Mazan ». Tous avaient plaidé coupable, même s’ils ont pour la plupart contesté le quantum des peines requises par le parquet.
Un procès emblématique sur le consentement
Ce procès, qui juge au total 51 accusés, est emblématique des questions de consentement et de soumission chimique. Son verdict, très attendu, doit être rendu au plus tard le 20 décembre. Il marquera sans nul doute la jurisprudence sur ces sujets sensibles.
La plaidoirie de Me Bruschi soulève en effet la délicate question de la conscience du non consentement. Mais au-delà du cas de Joseph C., c’est bien l’ensemble de ce dossier hors normes qui interroge la notion de consentement dans un contexte de soumission chimique et de relations consenties en apparence.