Dix ans déjà. Le 7 janvier 2015, la France était frappée en plein cœur par l’attaque terroriste contre Charlie Hebdo, faisant 12 morts. Cet attentat marquait le début d’une vague d’attaques islamistes sans précédent sur le sol français, avec pas moins de 55 attentats en une décennie, causant la mort de 273 personnes. Aujourd’hui, malgré les actions de l’État pour endiguer la menace, le bilan reste mitigé. Car le risque terroriste est toujours là, persistant.
Une menace islamiste qui ne faiblit pas
Selon une source proche des services de renseignement, de nombreux individus radicalisés continuent de proférer ouvertement des appels au djihad, au meurtre et à l’antisémitisme en France, principalement sur les réseaux sociaux. Suivis par des centaines de milliers de personnes, ils propagent leur idéologie de haine en toute impunité. Plusieurs d’entre eux, de nationalité étrangère, ont été interpellés ces derniers mois, comme à Montpellier, Brest ou Grenoble.
L’épineuse question des expulsions
Mais le problème, c’est que beaucoup de ces individus radicalisés, bien que visés par une obligation de quitter le territoire français (OQTF), sont toujours présents dans le pays. En cause : la difficulté pour les autorités de les renvoyer dans leur pays d’origine, souvent en raison de l’obstruction des pays concernés, à l’image de l’Algérie. Résultat, le taux d’exécution des OQTF reste dramatiquement bas, de l’ordre de 7% pour les ressortissants algériens. Un constat d’échec pour l’État français.
Mais qu’avons-nous fait de ces dix ans ?
s’interroge Yves Thréard, éditorialiste au Figaro
Pour lui, il est urgent d’agir et de trouver des solutions pour enfin expulser efficacement les étrangers radicalisés. Car c’est une question de sécurité nationale. Chaque OQTF non exécutée est un risque potentiel pour les Français. On l’a vu encore récemment avec le meurtre barbare de la petite Lola par une Algérienne qui aurait dû être expulsée depuis 3 ans. Un drame qui a suscité une vive émotion et relancé le débat sur les dysfonctionnements dans l’exécution des OQTF.
Les mesures de l’État face à la menace
Pour tenter d’enrayer le phénomène, le gouvernement a multiplié les mesures sécuritaires ces dernières années :
- Renforcement des moyens alloués aux services de renseignement
- Durcissement de la législation antiterroriste
- Mise en place de l’état d’urgence puis de la loi SILT en 2017
- Fermetures administratives de mosquées radicales
- Plan national de prévention de la radicalisation
Des actions qui ont permis de déjouer de nombreux projets d’attentats et de démanteler plusieurs filières djihadistes. Mais force est de constater que cela ne suffit pas. La menace est toujours là, prête à frapper.
Quel bilan 10 ans après ?
Dix ans après l’électrochoc de l’attaque contre Charlie Hebdo, le bilan est donc en demi-teinte. Si les services de l’État sont plus efficaces et mieux coordonnés pour lutter contre le terrorisme islamiste, la menace n’a pas disparu pour autant. Pire, elle s’est même diversifiée avec de nouveaux profils de terroristes, souvent très jeunes, isolés et difficiles à détecter en amont.
De l’attaque de la préfecture de police de Paris en 2019 à l’assassinat de Samuel Paty en 2020, en passant par les attentats de Nice et de la basilique Notre-Dame en 2016, les exemples ne manquent pas pour illustrer la persistance du péril islamiste en France. Sans parler des centaines de Français partis faire le djihad en Syrie, dont certains sont revenus sur le territoire national.
Les défis des prochaines années
Pour les autorités, l’enjeu des prochaines années sera donc de consolider les progrès réalisés en matière de lutte antiterroriste tout en s’attaquant aux racines du mal. Car si la réponse sécuritaire est indispensable, elle ne suffira pas à elle seule pour vaincre l’hydre islamiste. Il faudra aussi agir sur le terrain de la prévention, de l’éducation et du renseignement pour déconstruire l’idéologie djihadiste et éviter l’embrigadement de nouveaux adeptes.
Autre chantier prioritaire : résoudre le casse-tête de l’expulsion des étrangers radicalisés, en renforçant la coopération avec les pays d’origine et en fluidifiant les procédures administratives. Un défi de taille, tant les obstacles diplomatiques et juridiques sont nombreux. Mais il en va de la sécurité des Français. Dix ans après Charlie, l’heure n’est plus aux atermoiements mais à l’action, pour éviter de nouveaux drames. L’État est attendu au tournant.