Un drame a frappé un sanctuaire soufi reculé dans le nord-est de l’Afghanistan. Lors d’un rituel hebdomadaire, un homme a ouvert le feu sur les fidèles réunis, faisant dix victimes. Cette attaque sanglante s’inscrit dans un contexte de tensions religieuses exacerbées depuis le retour au pouvoir des talibans en 2021.
Une communauté soufie ciblée
Le soufisme, courant mystique et ésotérique de l’islam, est régulièrement pris pour cible en Afghanistan. Les radicaux sunnites, dont font partie les jihadistes et le groupe État islamique, considèrent les soufis comme des hérétiques. Ils leur reprochent notamment de pratiquer une forme de polythéisme en demandant l’intercession de saints.
D’après une source proche du dossier, les fidèles s’étaient rassemblés comme chaque semaine au sanctuaire de Sayed Pacha Agha dans le district reculé de Nahreen. C’est au moment où ils entamaient leurs traditionnelles psalmodies qu’un individu armé a fait feu, tuant une dizaine de personnes sur place. Les corps des victimes ont été découverts par d’autres fidèles venus pour la prière du matin.
Les talibans imposent une lecture rigoriste de l’islam
Depuis leur retour au pouvoir en août 2021, les autorités talibanes appliquent une interprétation très stricte de la loi islamique, bien différente des pratiques soufies. Si le nombre global d’attentats a diminué dans le pays, les minorités religieuses comme les chiites ou les soufis restent la cible de groupes jihadistes et de la branche locale de l’État islamique.
En avril 2022, un attentat à l’explosif contre une mosquée soufie pendant la prière du vendredi avait tué au moins 33 personnes, dont des enfants, dans la province de Kunduz. Et en septembre dernier, l’État islamique avait revendiqué une attaque faisant 14 morts parmi des chiites venus accueillir des pèlerins de retour de Kerbala en Irak, haut lieu saint du chiisme.
Un contexte de violence religieuse
Ces attaques reflètent les profondes divisions qui traversent la société afghane et la difficulté pour le pays de tourner la page de décennies de conflits. Malgré les promesses de paix et de sécurité des talibans, les minorités religieuses se retrouvent plus que jamais prises entre deux feux, ciblées par les jihadistes sans pouvoir compter sur la protection des autorités.
La communauté internationale s’inquiète de cette détérioration de la liberté de culte et appelle le gouvernement afghan à prendre des mesures concrètes pour protéger tous les citoyens, quelle que soit leur confession. Mais dans un Afghanistan profondément meurtri et divisé, le chemin vers la coexistence pacifique des différents courants de l’islam s’annonce encore long et périlleux.
Cette nouvelle attaque sanglante contre un sanctuaire soufi vient rappeler la précarité de ces lieux de culte et de recueillement dans un pays en proie aux violences religieuses. Tant que les groupes radicaux pourront agir en toute impunité et que les autorités ne garantiront pas la sécurité de tous, d’autres drames comme celui-ci risquent malheureusement de se reproduire, faisant de nouvelles victimes innocentes parmi les fidèles afghans.