Au cœur des montagnes du nord-ouest du Pakistan, un drame humanitaire se joue depuis plusieurs mois. Dans la région reculée de Kourram, à la frontière afghane, un conflit sanglant oppose les communautés sunnite et chiite. Malgré une trêve signée début janvier, les violences perdurent comme l’illustre l’attaque récente d’un convoi acheminant des vivres et des médicaments.
Un cessez-le-feu fragile dans une poudrière
Depuis juillet dernier, les affrontements entre sunnites et chiites ont fait plus de 200 morts dans le district de Kourram selon des sources locales. Cette zone montagneuse stratégique, où les autorités peinent à imposer leur loi, est le théâtre de violences récurrentes attisées par des conflits fonciers ancestraux. Un cessez-le-feu conclu le 1er janvier laissait espérer une désescalade, mais il semble déjà compromis.
Muhammad Ashfaq Khan, un responsable local, rapporte qu’un convoi de 35 camions transportant de la nourriture et des fournitures médicales destinées aux populations isolées du Haut-Kourram a été pris pour cible par des tirs. « Certains camions ont pris feu » indique-t-il, ajoutant que des échanges de coups de feu étaient « encore en cours » dans la zone.
Des milliers de civils pris au piège
Le blocage des routes principales par les autorités pour tenter de contenir les violences a drastiquement réduit l’accès de la population chiite à des denrées de base. Coincés dans leurs villages, de nombreux habitants font face à de graves pénuries alimentaires et médicales. Acheminer de l’aide est devenu périlleux comme en témoigne l’attaque de ce troisième convoi en deux semaines.
De nombreux civils, dont des femmes et des enfants, se retrouvent pris en étau dans ce conflit. L’acheminement sécurisé de l’aide humanitaire est une priorité absolue.
Un travailleur humanitaire sur place
Une fenêtre de dialogue qui se referme
Cette nouvelle attaque questionne la solidité du cessez-le-feu durement négocié et la capacité des différentes parties à trouver une issue pacifique. Des responsables de chaque camp tentent de préserver le fragile dialogue pour parvenir à un accord durable. Mais sur le terrain, la méfiance et la peur continuent de dicter la loi des armes.
En novembre dernier, plus de 40 personnes dont des enfants avaient déjà péri dans des attaques contre des convois de civils chiites, malgré la présence d’escortes policières. Selon l’ONG Commission pakistanaise des droits humains, au moins 79 personnes ont été tuées entre juillet et octobre, parfois à l’arme lourde. Un lourd bilan, témoin de l’intensité des combats et des difficultés à apaiser les tensions.
Un défi sécuritaire et humanitaire pour les autorités
Face à cette situation explosive, le gouvernement pakistanais est sous pression. Assurer la sécurité des convois humanitaires et l’accès des populations aux biens de première nécessité est un enjeu crucial. Mais dans cette région frontalière instable, théâtre de violences endémiques et repaire de groupes armés, la tâche s’avère ardue.
Des renforts militaires ont été déployés pour tenter de sécuriser la zone et empêcher une nouvelle escalade meurtrière. Parallèlement, les agences humanitaires internationales appellent à la création de couloirs sécurisés pour permettre l’acheminement de l’aide. Sans un retour au calme durable, c’est une véritable catastrophe humanitaire qui menace les habitants du Haut-Kourram.
Cette crise souligne une nouvelle fois la complexité du contexte sécuritaire pakistanais, où s’imbriquent conflits ethniques, rivalités religieuses et enjeux géopolitiques. Elle met aussi en lumière les immenses défis auxquels sont confrontées les autorités pour répondre aux besoins vitaux des populations dans les régions les plus reculées et instables du pays. Une mission dont dépendent de nombreuses vies innocentes, à l’image des milliers de civils pris au piège des violences à Kourram.
