La métropole syrienne d’Alep a été le théâtre mardi d’une nouvelle attaque sanglante qui a coûté la vie à trois membres des forces de sécurité kurdes locales. Selon une source proche de l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH), un barrage de contrôle tenu par ces forces dans le quartier majoritairement kurde d’Achrafieh a été pris pour cible par des combattants pro-turcs armés et un drone.
D’après le directeur de l’OSDH qui s’est confié à l’AFP, outre les trois victimes, sept autres membres des forces kurdes ont été grièvement blessés dans cette attaque et se trouvent actuellement dans un état critique. Il s’agit là du premier incident de ce type depuis la chute du régime de Bachar al-Assad début décembre dernier suite à une offensive éclair menée par une coalition de groupes rebelles.
Une situation sécuritaire globalement stable mais des tensions persistantes
Si la sécurité reste largement assurée dans Alep même, qui est désormais sous le contrôle des nouvelles autorités mises en place, la situation demeure beaucoup plus tendue dans d’autres secteurs du nord de la Syrie. Des affrontements opposent en effet régulièrement les groupes armés pro-turcs aux Forces démocratiques syriennes (FDS), une coalition dominée par les Kurdes et soutenue par les États-Unis.
Ces combats se concentrent notamment à l’est d’Alep, près de la ville de Manbij, où ils ont fait pas moins de 31 morts dans les deux camps rien que ces deux derniers jours selon l’OSDH. Un responsable kurde joint par l’AFP accuse directement « les groupes pro-turcs d’avoir attaqué le barrage de contrôle avec un drone armé ».
Alep, une ville divisée
Bien qu’elle soit retombée dans le giron des autorités issues de la rébellion, Alep n’en reste pas moins une ville divisée. Deux de ses quartiers, Cheikh Maqsoud et Achrafieh, qui abritent une population à majorité kurde de plus de 300 000 personnes, échappent en effet toujours à leur contrôle. Ils sont tenus par des forces de sécurité issues de cette minorité, dont certains éléments ont été visés mardi.
Pour l’OSDH, qui dispose de nombreuses sources sur place, le risque d’une escalade des violences est réel. L’attaque contre le checkpoint kurde, situé entre les quartiers de Cheikh Maqsoud et Achrafieh, pourrait n’être que le prélude à une offensive de plus grande envergure visant à déloger les forces kurdes de leurs derniers bastions dans la ville.
Vers une intégration des forces kurdes dans la future armée syrienne ?
Face à ces tensions, le nouveau dirigeant syrien Ahmad al-Chareh a évoqué dimanche dernier lors d’une interview télévisée la possibilité d’intégrer à terme les FDS dans la future armée régulière syrienne. Une perspective qui permettrait de régler la question du statut de ces forces mais qui risque de se heurter à de fortes résistances, tant les relations entre Kurdes et Turcs sont conflictuelles.
Au final, cette nouvelle attaque meurtrière vient rappeler que malgré la chute de l’ancien régime, la situation en Syrie est loin d’être apaisée. Les équilibres restent fragiles, notamment dans le nord du pays où les intérêts des différents acteurs locaux et régionaux s’entrechoquent violemment. Dans ce contexte, seule une solution politique inclusive semble à même de ramener une paix durable. Mais le chemin pour y parvenir s’annonce encore long et périlleux.