Imaginez rentrer chez vous un soir ordinaire et être abattu sous les yeux de votre femme et de vos enfants. C’est exactement ce qui est arrivé à Marius van der Merwe le 5 décembre 2025 en Afrique du Sud. Ce n’était pas un crime aléatoire : cet homme était un témoin clé dans une enquête explosive sur les liens entre le système judiciaire et le crime organisé.
Cet assassinat a marqué un tournant sombre pour le pays, déjà confronté à une violence endémique. Il met en lumière une réalité brutale : ceux qui osent dénoncer les puissants risquent leur vie.
Une Commission Déterminée Face aux Menaces
La commission d’enquête, baptisée commission Madlanga du nom de son président l’ancien juge de la Cour constitutionnelle Mbuyiseli Madlanga, a réagi avec fermeté. Dans un communiqué publié récemment, elle annonce avoir remis un premier rapport préliminaire au président Cyril Ramaphosa.
Mais c’est surtout son message qui retient l’attention : la commission affirme qu’elle ne se laissera pas intimider. Elle appelle les forces de l’ordre à traquer sans relâche ceux qui tentent de saper son travail et, plus largement, l’État de droit.
Ce ton combatif n’est pas anodin. L’assassinat de Van der Merwe, survenu devant son domicile, a été perpétré de manière particulièrement cruelle. Le témoin avait participé de façon anonyme aux audiences très suivies, diffusées en direct à la télévision nationale.
Ses déclarations avaient directement mis en cause le chef de la police d’une grande métropole sud-africaine. Des accusations graves qui, manifestement, ont eu des conséquences fatales.
Les Origines de Cette Enquête Explosive
Tout a commencé en juillet dernier avec des révélations choc made by un haut responsable de la police, Nhlanhla Mkhwanazi. Ses accusations ont été si sérieuses qu’elles ont entraîné la mise à l’écart du ministre de tutelle.
Face à ce scandale, le président Cyril Ramaphosa n’a pas eu d’autre choix que de créer cette commission indépendante. Son mandat : faire la lumière sur une éventuelle collusion entre certains membres du système judiciaire et les réseaux criminels organisés.
Depuis, les audiences se succèdent et captivent l’opinion publique. Chaque jour, les Sud-Africains suivent en direct ces témoignages qui dévoilent les coulisses d’un appareil judiciaire parfois compromis.
Mais cette transparence a un prix. Le meurtre de Van der Merwe rappelle cruellement que la vérité peut coûter très cher dans un pays où la corruption ronge les institutions.
La Corruption, un Fléau Endémique
L’Afrique du Sud n’en est malheureusement pas à son premier scandale. La corruption y est profondément ancrée, comme le montre son classement à la 80e place de l’indice de Transparency International.
Un des cas les plus emblématiques reste le détournement massif de fonds publics à l’hôpital de Tembisa, près de Johannesburg. Plus de deux milliards de rands – environ 100 millions d’euros – ont été siphonnés en quelques années seulement.
Le mécanisme ? Des appels d’offres truqués avec des prix délibérément gonflés. Une pratique qui prive les patients de soins essentiels pendant que quelques individus s’enrichissent.
Le Prix du Courage : l’Exemple de Babita Deokaran
Ce scandale avait été révélé grâce au courage d’une lanceuse d’alerte, Babita Deokaran, cadre au ministère de la Santé. Elle avait osé dénoncer ces irrégularités.
Son destin fut tragique : en 2021, elle a été abattue devant son domicile. Un mode opératoire qui présente des similitudes troublantes avec l’assassinat récent de Marius van der Merwe.
Ces deux affaires illustrent un schéma récurrent : ceux qui menacent les intérêts des puissants deviennent des cibles. Le message est clair – tais-toi ou meurs.
Cette impunité encourage les criminels. Elle décourage aussi les potentiels futurs témoins, qui hésitent à témoigner par peur des représailles.
Une Violence qui Explose
Le contexte sécuritaire sud-africain aggrave cette situation. Les meurtres ciblés ont connu une hausse spectaculaire de 108 % en dix ans, selon l’Observatoire de la criminalité organisée en Afrique du Sud.
Le pays enregistre environ 75 homicides par jour, l’un des taux les plus élevés au monde. Un chiffre terrifiant qui traduit une société profondément marquée par la violence.
Mais ce qui choque encore plus, c’est le faible taux d’élucidation. En 2024, seuls 11,33 % des meurtres ont été résolus selon les statistiques officielles.
Dans ce climat, les assassins savent qu’ils ont de fortes chances de rester impunis. Une réalité qui renforce le pouvoir des réseaux criminels.
Quel Avenir pour l’État de Droit ?
La détermination affichée par la commission Madlanga est encourageante. En refusant de céder à l’intimidation, elle envoie un signal fort : la justice ne pliera pas.
Mais cette posture sera-t-elle suffisante ? Le rapport préliminaire remis au président Ramaphosa pourrait contenir des éléments décisifs. Son contenu reste pour l’instant confidentiel.
L’enjeu est immense. Si la commission parvient à établir des preuves solides de collusion, cela pourrait déclencher une vaste opération de purification du système judiciaire.
À l’inverse, si les intimidations continuent et que les enquêtes piétinent, le message envoyé sera désastreux : le crime organisé est plus fort que l’État.
La société civile sud-africaine suit cette affaire de très près. Beaucoup espèrent que ce drame servira de catalyseur pour un véritable changement.
Les Défis d’une Protection Efficace des Témoins
L’un des problèmes majeurs révélés par ces assassinats concerne la protection des témoins. Malgré l’anonymat accordé à Van der Merwe lors de ses déclarations, il a été identifié et éliminé.
Cela soulève des questions sur l’efficacité des mesures de sécurité. Comment des informations confidentielles ont-elles pu fuiter ? Y a-t-il des complicités internes ?
Dans un pays où la confiance envers les institutions est fragilisée, renforcer ces dispositifs devient une priorité absolue.
Des programmes de protection plus robustes, inspirés de modèles internationaux, pourraient être envisagés. Mais leur mise en œuvre demande des moyens et une volonté politique forte.
L’Impact sur l’Opinion Publique
Les audiences télévisées ont permis à des millions de Sud-Africains de prendre conscience de l’ampleur du problème. Jour après jour, ils découvrent des témoignages accablants.
Cette transparence inédite a un double effet. D’un côté, elle restaure un peu de confiance dans le processus démocratique. De l’autre, elle révèle l’étendue des dysfonctionnements.
L’assassinat du témoin a choqué l’opinion. Beaucoup y voient la preuve que les réseaux criminels sont prêts à tout pour conserver leur influence.
Cela pourrait galvaniser la population et pousser les autorités à agir plus fermement. Une mobilisation citoyenne pourrait émerger pour exiger justice et réformes.
L’histoire sud-africaine a déjà montré que le peuple peut faire bouger les lignes quand il se mobilise massivement. Reste à voir si ce drame servira de déclencheur.
Vers une Réforme en Profondeur ?
Au-delà de cette commission, c’est tout le système qui nécessite une refonte. La faible élucidation des crimes, la corruption généralisée, la violence quotidienne : tous ces éléments sont interconnectés.
Des réformes structurelles sont indispensables. Renforcer l’indépendance de la justice, améliorer la formation et les conditions des forces de l’ordre, lutter plus efficacement contre la corruption.
Le président Ramaphosa, qui a initié cette commission, porte une lourde responsabilité. Ses prochaines décisions seront scrutées de près.
Le rapport préliminaire pourrait constituer une feuille de route. S’il contient des recommandations précises et courageuses, il pourrait marquer le début d’un tournant.
L’Afrique du Sud a déjà surmonté des défis immenses dans son histoire récente. Elle a les ressources humaines et institutionnelles pour relever celui-ci, à condition que la volonté politique suive.
L’assassinat de Marius van der Merwe ne doit pas rester impuni. Il doit devenir le symbole d’une justice qui refuse de plier face à l’intimidation.
Le chemin sera long et semé d’embûches. Mais la détermination affichée par la commission Madlanga laisse espérer que l’État de droit finira par triompher.
« La Commission ne se laissera pas intimider et exhorte les forces de l’ordre compétentes à traquer et à traduire en justice tous ceux qui cherchent à saper le travail de la Commission et l’État de droit. »
– Commission Madlanga
Cette déclaration résonne comme un défi lancé aux forces obscures qui gangrènent le pays. L’avenir dira si ce défi sera relevé avec succès.
En attendant, chaque citoyen sud-africain vit avec cette réalité : dénoncer la corruption peut coûter la vie. Changer cela reste le plus grand défi du nation arc-en-ciel.









