13 octobre 2023. Cette date restera à jamais gravée dans les mémoires à Arras. Ce jour-là, peu avant midi, le professeur de français Dominique Bernard était lâchement assassiné devant le collège-lycée Gambetta où il enseignait. Son meurtrier : Mohammed Mogouchkov, un ex-élève âgé de 20 ans. Douze mois plus tard, alors qu’un hommage va être rendu à l’enseignant ce dimanche, sa veuve sort du silence. Et ses révélations sont glaçantes.
Un élève identifié comme « dangereux » dès le collège
Dans une interview accordée au journal Le Monde, Isabelle Bernard, elle-même professeure d’anglais, confie que son mari avait très tôt repéré le caractère problématique de Mohammed Mogouchkov. « Quand il était élève au collège et que Dominique l’avait en classe, l’équipe de direction a tout fait pour signaler le caractère dangereux de ce garçon », révèle-t-elle.
Face à cet élève au comportement inquiétant, Dominique Bernard devait en permanence surveiller ses propos et « faire attention » à ce qu’il disait en classe, de peur de déclencher une réaction violente. Un véritable climat de tension régnait. « Je ne peux pas dire tout ce que je veux, je dois faire attention, » avait-il confié un jour à son épouse. Une autre fois, il lui avait glissé : « J’ai quand même dit que j’étais quelqu’un de libre. » Des mots lourds de sens.
La police au courant des intentions du tueur
Et pourtant, selon Isabelle Bernard, l’Education nationale n’a rien à se reprocher dans ce drame. « Chacun a fait son travail », assure-t-elle. Non, le vrai scandale se situerait du côté des forces de l’ordre. « Les policiers savaient qu’il avait l’intention d’agir mais ne savaient pas quand », lâche-t-elle, amère. Avant de conclure, fataliste : « Quelqu’un qui est déterminé à tuer va tuer. »
Un hommage et des questions
Ce dimanche, un hommage sera rendu à Dominique Bernard sur la place des Héros d’Arras, en présence de plusieurs membres du gouvernement. Une cérémonie que sa veuve souhaite tournée vers « les arts » et à la mémoire de « toutes les victimes du terrorisme ». Hors de question pour elle qu’il y ait une quelconque récupération politique de ce drame.
Mais un an après l’attentat qui a coûté la vie à ce professeur passionné et engagé, les questions restent nombreuses. Comment un jeune repéré si tôt comme une menace potentielle a-t-il pu passer entre les mailles du filet ? Quelles mesures la police aurait-elle pu ou dû prendre ? Pourquoi les signalements de l’Education nationale n’ont-ils pas suffi à éviter le pire ? Autant d’interrogations qui resteront sans doute longtemps sans réponse. Pour Dominique Bernard et les siens, le combat continue. Contre l’oubli. Et pour que de tels drames ne se répètent plus.