Bangkok a été le théâtre d’un crime choquant mardi dernier. Selon plusieurs sources concordantes, Lim Kimya, un ancien député cambodgien de double nationalité khmère et française, a été abattu en pleine rue par un inconnu circulant à moto. Les circonstances exactes de cet assassinat restent à éclaircir, mais il soulève d’ores et déjà des interrogations sur un possible mobile politique.
Un ex-député d’opposition visé
Lim Kimya, 58 ans, était une figure de l’opposition cambodgienne. Élu député sous l’étiquette du Parti du sauvetage national du Cambodge (CNRP) lors des législatives de 2013, il avait siégé au Parlement jusqu’à la dissolution controversée de son parti en 2017. Comme de nombreux autres membres de l’opposition, il s’était alors vu interdire toute activité politique.
Malgré ces pressions, Lim Kimya était resté au Cambodge, refusant de s’exiler contrairement à des dizaines d’autres élus et militants. « Je n’abandonnerai jamais la politique », avait-il déclaré avec détermination dans une interview. Un engagement qui lui aura peut-être coûté la vie.
Arrivé de Siem Reap avec sa famille
Selon les informations rapportées par les médias thaïlandais, Lim Kimya venait d’arriver à Bangkok en provenance de Siem Reap, dans le nord-ouest du Cambodge. Il était accompagné de son épouse française et d’un oncle. C’est peu après être descendu du bus que l’ancien député a été pris pour cible par son agresseur, qui a ouvert le feu avant de prendre la fuite.
Malgré l’intervention rapide des secours, Lim Kimya n’a pas survécu à ses blessures. « Il est mort sur place », a sobrement indiqué la police locale, ajoutant que « le tireur était activement recherché ». Pour l’heure, le mobile de ce crime n’a pas été déterminé avec certitude, mais plusieurs observateurs n’excluent pas la piste d’un assassinat politique.
La police thaïlandaise ouvre une enquête
Face à la gravité de cet homicide, les autorités thaïlandaises ont immédiatement ouvert une enquête. « Nous explorons toutes les pistes possibles concernant les motivations de ce crime », a affirmé un porte-parole de la police, promettant de communiquer plus d’informations « dès que possible ». Les investigations se concentrent notamment sur l’exploitation des images de vidéosurveillance pour tenter d’identifier le tireur.
Sur les lieux du drame, non loin de la célèbre rue touristique de Khao San Road, les enquêteurs ont pu constater la violence de l’attaque. D’après un témoin, « il y avait beaucoup de sang sur le trottoir ». Plusieurs douilles ont également été retrouvées, laissant penser que le tireur a fait feu à plusieurs reprises en direction de sa victime.
Un « assassinat politique » pour des ONG
Si la police thaïlandaise reste prudente sur les motifs de ce meurtre, plusieurs organisations de défense des droits humains n’hésitent pas à parler d’un « assassinat politique ». « Ce crime a toutes les caractéristiques d’une exécution ciblée visant à éliminer un opposant », a déclaré Phil Robertson, directeur d’Asia Human Rights Labour Advocates.
Le gouvernement français doit s’efforcer d’obtenir justice pour son ressortissant et faire pression sur le gouvernement thaïlandais pour qu’il mène une enquête efficace et approfondie.
Phil Robertson, Asia Human Rights Labour Advocates
Pour rappel, l’opposition cambodgienne a été durement réprimée ces dernières années, sur fond de dérive autoritaire du régime de Hun Sen. Au pouvoir depuis près de quatre décennies, le Premier ministre a récemment transmis les rênes à son fils aîné Hun Manet. Mais ce passage de témoin famililal n’a pas mis fin à la répression politique.
Appel à une enquête approfondie
Face à ce nouveau drame, les appels se multiplient pour que toute la lumière soit faite. La famille de Lim Kimya, sa veuve en tête, exige que les commanditaires de cet assassinat soient identifiés et traduits en justice. En tant que citoyen français, l’ancien député pourrait bénéficier d’un soutien diplomatique de Paris.
Mais au-delà de ce cas individuel, c’est la situation des droits et libertés au Cambodge qui est pointée du doigt. Pour de nombreux militants, ce crime illustre la persistance d’un climat de peur et d’intimidation à l’égard de tous ceux qui osent s’opposer au pouvoir en place. À Bangkok comme à Phnom Penh, les questions restent nombreuses après ce meurtre qui endeuille la diaspora cambodgienne.