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Argentine : Milei Face À Un Parlement Rebelle

Le Parlement argentin défie Javier Milei en limitant ses décrets. À l’approche des élections, son pouvoir vacille. Quel avenir pour l’Argentine ?

Imaginez un président, porté au pouvoir par une vague de promesses audacieuses, confronté à un mur parlementaire qui freine chacune de ses ambitions. En Argentine, c’est la réalité de Javier Milei, figure ultralibérale dont le style de gouvernance par décrets vient d’être sérieusement entravé. Ce nouveau revers, voté à une large majorité, révèle un bras de fer politique intense et pose une question brûlante : comment Milei pourra-t-il gouverner alors que les élections de mi-mandat approchent ?

Un Parlement Qui Défie Le Président

Depuis son arrivée au pouvoir en 2023, Javier Milei, connu pour son discours anti-caste politique, s’appuie sur des décrets de nécessité et d’urgence (DNU) pour imposer ses réformes. Ces outils, inscrits dans la Constitution argentine depuis 1994, permettent à l’exécutif de légiférer rapidement sans passer par un Parlement souvent réticent. Mais mercredi, la Chambre des députés a voté à 140 voix contre 80 une mesure visant à limiter leur portée, dans la lignée d’une décision similaire du Sénat un mois plus tôt.

Concrètement, un décret-loi pourra désormais être invalidé par le vote d’une seule chambre, et non plus des deux, rendant son adoption bien plus fragile. Ce changement, bien que partiellement en attente d’un nouveau vote au Sénat pour un article controversé, marque un tournant. Milei, qui ne dispose que d’une quarantaine de députés sur 257, voit son pouvoir d’action restreint, accentuant sa dépendance à des alliances instables.

« Plus que l’instrument, c’est son usage qui pose problème », a dénoncé la députée Monica Litza, figure de l’opposition péroniste.

Une Gouvernance Sous Tension

Depuis son investiture, Milei a multiplié les DNU, avec plus de 70 décrets signés en 22 mois. Parmi eux, un méga-décret de décembre 2023, qui bouleversait plus de 300 réglementations dans des secteurs aussi variés que le travail, les loyers ou les privatisations. Ce texte, emblématique de sa volonté de dérégulation massive, a cristallisé les tensions avec le Parlement, où son parti, La Libertad Avanza, reste minoritaire.

Face à cette opposition, Milei a souvent contourné les obstacles législatifs en s’appuyant sur ces décrets. Mais leur usage intensif a suscité des critiques, y compris judiciaires. Des syndicats et des opposants ont contesté la légitimité de certaines mesures, arguant qu’elles ne répondaient pas à un caractère d’urgence requis par la Constitution. Plusieurs de ces recours ont abouti, fragilisant davantage l’exécutif.

Les DNU, bien que légaux, sont devenus un symbole de la gouvernance controversée de Milei, oscillant entre audace réformatrice et contournement démocratique.

Les Enjeux Des Élections De Mi-Mandat

À l’approche des élections législatives du 26 octobre, la situation devient critique pour Milei. Sans une majorité parlementaire renforcée, ses ambitions de réformes structurelles risquent de rester lettre morte. Ces élections, suivies de près par les marchés financiers, ont déjà un impact : le peso argentin subit des pressions répétées, reflétant l’incertitude qui plane sur l’avenir politique du pays.

Pour comprendre l’ampleur du défi, voici les principaux enjeux de ce scrutin :

  • Renforcer la base parlementaire : Avec seulement 15 % des sièges à la Chambre des députés, Milei doit élargir son soutien pour faire passer ses réformes.
  • Stabiliser l’économie : La nervosité des marchés, accentuée par la faiblesse du peso, exige une gouvernance plus solide.
  • Restaurer la confiance : Les revers parlementaires à répétition érodent l’image d’un président capable de transformer l’Argentine.

Un Soutien International Inattendu

Dans ce contexte tendu, un allié de poids est entré en scène : le Trésor américain. En septembre, sous l’égide de l’administration Trump, proche idéologiquement de Milei, une promesse de soutien financier a été formulée pour soutenir la troisième économie d’Amérique du Sud. Bien que les détails de cette aide restent flous, elle pourrait offrir une bouée de sauvetage à une économie argentine fragilisée par l’austérité budgétaire prônée par Milei.

Ce soutien s’accompagne d’une rencontre prévue le 14 octobre à la Maison Blanche entre Milei et Donald Trump. Ce rendez-vous, hautement symbolique, pourrait renforcer la stature internationale du président argentin, mais il ne résout pas ses défis domestiques.

« Le Trésor américain est prêt à faire le nécessaire », a déclaré un représentant, sans préciser la nature de l’aide.

Une Démocratie À L’Épreuve

Le recours intensif aux DNU par Milei soulève une question plus large : où s’arrête l’urgence dans une démocratie ? Si ces décrets ont été utilisés par ses prédécesseurs, notamment pendant la pandémie de Covid-19, leur usage systématique par Milei est perçu par certains comme une tentative de gouverner sans le Parlement. Cette stratégie, qualifiée d’état d’exception permanent par l’opposition, alimente les tensions.

Pour l’opposition, limiter les DNU n’est pas seulement une question de pouvoir, mais une défense des principes démocratiques. « Nous ne pouvons pas laisser l’exécutif transformer les décrets en outil de gouvernance ordinaire », a insisté Maximiliano Ferraro, député de centre-droit.

Période Nombre de DNU Contexte
2020-2021 20+ Pandémie de Covid-19
2023-2025 70+ Réformes ultralibérales de Milei

Un Avenir Incertain

À moins d’un mois des élections, Milei se trouve à un tournant. Ses réformes, bien que soutenues par une partie de l’électorat lassée de la crise économique chronique, peinent à convaincre un Parlement fragmenté. Les critiques fusent, accusant le président de vouloir imposer un agenda radical sans consensus. Pourtant, ses partisans, comme le député Nicolas Mayoraz, dénoncent une opposition cherchant à « déstabiliser » l’exécutif.

Le politologue Leandro Domínguez résume la situation : « Les DNU sont un outil puissant, mais leur abus risque de transformer une gouvernance audacieuse en crise institutionnelle. » Pour Milei, l’enjeu est clair : convaincre les électeurs de lui offrir une majorité suffisante pour gouverner, tout en évitant une rupture avec les institutions.

En attendant, l’Argentine retient son souffle. Les marchés surveillent, le peso vacille, et le Parlement, loin de plier, affirme son rôle. La rencontre avec Trump pourrait apporter un répit, mais sans une victoire électorale, Milei risque de voir son projet de transformation s’enliser. Que réserve l’avenir à ce président atypique ? Les semaines à venir seront décisives.

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