L’arrestation de l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal par les autorités algériennes soulève l’indignation, mais Amnesty International refuse pour l’heure de s’engager officiellement pour sa libération. L’ONG de défense des droits humains déclare manquer d’éléments probants pour qualifier sa détention d’arbitraire, s’attirant les foudres de nombreux défenseurs de l’auteur.
Amnesty International élude les appels au soutien
Malgré la vague de protestations dénonçant l’emprisonnement de Boualem Sansal, connu pour ses prises de position critiques envers le régime algérien, Amnesty International se refuse à condamner officiellement cette détention. Sur les réseaux sociaux, l’antenne française de l’ONG a expliqué ne pas disposer pour l’instant de preuves suffisantes pour « vérifier de façon indépendante » le caractère arbitraire de l’arrestation.
Une position qui étonne et indigne de nombreux soutiens de l’écrivain, persuadés que Sansal paie ses opinions dissidentes. D’après une source proche du dossier, l’auteur serait poursuivi pour « atteinte à l’unité nationale » et « complot contre la sûreté de l’État », chefs d’accusation régulièrement utilisés pour museler toute voix critique en Algérie.
Les indices accablants d’une justice aux ordres
Si l’État algérien n’a pas officiellement revendiqué une arrestation politique, les éléments disponibles accréditent largement cette thèse. L’agence de presse publique algérienne a relayé l’information de l’interpellation de Sansal « en plein délire révisionniste », lui reprochant une « tentative de nier l’existence même de la Nation algérienne ».
Des griefs qui font directement écho à de récentes déclarations de l’auteur sur des médias étrangers, dans lesquelles il remettait en cause la lecture officielle des frontières et de l’histoire du pays. Des propos polémiques, mais relevant de sa liberté d’expression selon ses défenseurs.
En l’absence de tout autre motif d’inculpation crédible, difficile de ne pas voir dans l’emprisonnement de Boualem Sansal une tentative de censure et d’intimidation.
Un défenseur des droits humains
Amnesty International prise entre deux feux
La prudence d’Amnesty International face à cette affaire s’expliquerait notamment par sa volonté de préserver un canal de dialogue avec les autorités algériennes. L’ONG, qui opère dans le pays, craindrait des represailles en cas de positionnement trop virulent sur ce dossier sensible.
Mais en refusant de condamner clairement ce qui apparaît comme une détention abusive, l’organisation s’expose à son tour aux critiques. Beaucoup l’accusent de faire preuve de deux poids deux mesures, elle qui n’hésite pas à dénoncer publiquement des situations similaires dans d’autres pays.
Un silence assourdissant
Au-delà d’Amnesty International, c’est le silence relatif des autorités françaises qui interpelle. Si l’Élysée a jugé « inquiétante » l’arrestation de cet écrivain de nationalité française, peu de voix officielles se sont élevées pour réclamer sa libération.
Crainte de froisser Alger ? Volonté de ne pas s’immiscer dans les affaires intérieures algériennes ? Quelle qu’en soit la raison, cette discrétion est vécue comme un abandon par les proches de Boualem Sansal, qui en appellent à une mobilisation internationale.
Un cas emblématique des dérives autoritaires
Au-delà de son cas personnel, tragique, le sort de Boualem Sansal illustre la dégradation continue des libertés fondamentales en Algérie. Malgré une façade démocratique, le pays multiplie les entorses à l’état de droit, muselant méthodiquement les voix dissidentes.
Journalistes, militants, artistes : tous ceux qui osent exprimer une opinion divergente s’exposent à l’arbitraire d’un système judiciaire aux ordres. Un verrouillage qui n’épargne même pas les figures reconnues internationalement, à l’instar de Sansal.
L’Algérie se transforme peu à peu en prison à ciel ouvert pour les esprits libres. L’affaire Boualem Sansal n’est que la partie émergée d’un vaste iceberg répressif.
Un analyste politique
Un auteur mondialement salué réduit au silence
Boualem Sansal n’est pas un opposant anonyme. Lauréat de nombreux prix littéraires prestigieux, il jouit d’une large reconnaissance internationale pour ses romans humanistes dénonçant l’obscurantisme et célébrant les valeurs des Lumières.
Son arrestation constitue un message clair envoyé par le régime algérien : même la notoriété ne protège plus des représailles. Une escalade inquiétante qui vise à terroriser tous ceux tentés de revendiquer leur droit à la liberté d’expression.
La communauté internationale doit sortir de sa réserve
Face à cette dérive manifeste, le silence complice de la communauté internationale n’est plus tenable. Au-delà du cas Boualem Sansal, il est temps pour les démocraties de hausser le ton contre les atteintes systématiques aux droits humains en Algérie.
En fermant les yeux sur ces dérives pour préserver leurs intérêts géostratégiques, les pays occidentaux se rendent complices d’un système oppressif. Un aveuglement volontaire qui hypothèque l’avenir de millions d’Algériens épris de liberté.
Dans ce contexte, le mutisme d’Amnesty International apparaît d’autant plus assourdissant. En refusant d’utiliser sa voix influente pour condamner clairement l’injustice faite à Boualem Sansal, l’ONG prend le risque de perdre en crédibilité et en cohérence.
Plus que jamais, il est temps pour tous les défenseurs des libertés de faire front commun, au-delà des timidités diplomatiques et des calculs politiciens. Car si Boualem Sansal est aujourd’hui réduit au silence derrière les barreaux, c’est toute l’Algérie qui étouffe lentement sous le poids de l’arbitraire.