La France politique est en ébullition. L’annonce surprise mardi par Éric Ciotti, président des Républicains, d’une “alliance” entre son parti et le Rassemblement national en vue des législatives anticipées des 30 juin et 7 juillet prochains, a déclenché un véritable séisme. Cette décision hautement controversée, qui fait voler en éclats le fameux “cordon sanitaire” de la droite face à l’extrême droite, place LR au bord de l’implosion. Mais qu’en pensent les militants ?
Une base divisée mais pas hostile
Selon un sondage Odoxa-Backbone Consulting pour Le Figaro, la moitié des militants LR (50%) approuvent en réalité l’idée de ce pacte. Un chiffre qui peut surprendre au vu des réactions indignées de nombreux cadres et élus du parti, de Valérie Pécresse à Laurent Wauquiez en passant par François Baroin. Mais il reflète aussi le rapport de force interne, entre une aile droitière de plus en plus attirée par la ligne identitaire du RN, et une frange centriste attachée à une droite républicaine, libérale et pro-européenne.
La position exprimée par Ciotti est une impasse.
Gérard Larcher, président LR du Sénat
Un front républicain fissuré
C’est tout un pan de l’histoire de la droite, celle du RPR puis de l’UMP, qui semble voler en éclats. Depuis des décennies, la droite gouvernementale avait toujours pris soin de maintenir une distance, voire un “mur” face au Front national puis au RN, malgré la tentation récurrente d’une ligne plus droitière. Des alliances locales avaient pu avoir lieu ici ou là, mais jamais un tel rapprochement n’avait été acté au sommet par la direction du parti.
Le spectre d’une grande coalition des droites
Pour ses partisans, ce pacte serait un moyen de faire barrage à Emmanuel Macron et à la gauche de la Nupes, en additionnant les voix de la droite et de l’extrême droite. Un raisonnement arithmétique qui fait fi des incompatibilités programmatiques et des lignes rouges, sur l’Europe ou les valeurs républicaines. Mais qui pourrait trouver un écho dans une partie de l’électorat de droite tenté par l’union des droites face aux autres blocs.
Vers un big bang politique ?
Au-delà de la droite, c’est tout le paysage politique qui pourrait être chamboulé par ce mouvement tectonique. En brouillant les lignes, en bousculant les repères traditionnels, ce rapprochement pourrait accélérer la recomposition en trois blocs – un bloc central macroniste, un bloc de gauche et un bloc de droite et d’extrême droite – qui s’esquissait déjà depuis la dernière présidentielle. Avec le risque d’une polarisation accrue du débat et des affrontements politiques.
A trois semaines du premier tour, tous les scénarios semblent ouverts. Selon les derniers sondages, le RN arriverait largement en tête, loin devant la Nupes et la majorité présidentielle. Mais les reports de voix et les dynamiques locales pourraient réserver des surprises. Une chose est sûre : la décision choc d’Éric Ciotti aura été le détonateur d’une campagne explosive et incertaine, dont l’issue façonnera le visage de la France des prochaines années.
