À quelques mois des élections législatives anticipées en Allemagne, les conservateurs de la CDU/CSU, favoris dans les sondages, viennent de présenter un programme qui marque un net virage à droite. Sous la houlette de Friedrich Merz et Markus Söder, l’opposition entend ainsi se démarquer clairement des sociaux-démocrates du chancelier Olaf Scholz, dont la coalition est à la peine.
Un contre-projet assumé face au gouvernement Scholz
« Notre programme électoral est le contre-projet du gouvernement qui a échoué », a affirmé sans détour Friedrich Merz, président de la CDU depuis 2022. Ancien avocat d’affaires, il entend bien imprimer sa marque et tourner définitivement la page des années Merkel, jugées trop centristes.
De son côté, le très impopulaire Olaf Scholz, qui a perdu lundi la confiance des députés comme il l’escomptait, ouvrant ainsi la voie à un scrutin le 23 février, opère un virage à gauche. Le SPD se pose en champion d’un État social protecteur pour les plus vulnérables, espérant regagner des voix. Mais au vu des sondages, le scénario le plus probable reste une alliance entre SPD et CDU/CSU, à condition de trouver des compromis.
Économie : baisses d’impôts et remise en cause du « Bürgergeld »
Pour relancer l’économie allemande, menacée de récession pour la deuxième année consécutive, les conservateurs veulent que « travailler dur vaille à nouveau la peine ». Au programme : des baisses d’impôts pour les actifs et les plus hauts revenus. À l’inverse, le SPD veut augmenter le salaire minimum à 15 euros de l’heure.
La CDU/CSU veut aussi détricoter l’allocation citoyenne (Bürgergeld), mise en place sous Scholz pour les chômeurs de longue durée. Jugée trop coûteuse, elle n’inciterait pas à la reprise d’emploi selon les conservateurs. Le SPD défend lui des mesures sociales comme la gratuité des cantines scolaires.
Les dettes ne sont pas une potion magique avec laquelle on règle les problèmes.
Friedrich Merz, président de la CDU
Autre point de divergence majeur : la dette. Olaf Scholz veut assouplir les règles pour pouvoir investir et relancer la croissance. Une hérésie pour la CDU/CSU, qui s’oppose à toute remise en cause du « frein à la dette » inscrit dans la Constitution. Les écologistes, pourtant éventuels partenaires de coalition, sont encore plus éloignés sur ces questions budgétaires et fiscales.
Immigration et sécurité : la « ligne dure » des conservateurs
Sur l’immigration, l’alliance CDU/CSU porte une « ligne dure » assumée par Markus Söder. Au programme : une politique sécuritaire de « law and order », qui ne sera « ni à gauche, ni woke, ni genrée ». Les conservateurs entendent aussi couper l’herbe sous le pied de l’extrême droite de l’AfD, 2ème force dans les sondages, en critiquant la politique migratoire jugée trop laxiste du gouvernement.
Énergie et politique étrangère : des convergences possibles
Contrairement au gouvernement Scholz qui a fermé les dernières centrales nucléaires au printemps 2023, la CDU/CSU souhaite garder cette option énergétique. C’est cependant sur la politique étrangère que conservateurs et sociaux-démocrates pourraient le plus se rejoindre. Maintien des dépenses de défense à 2% du PIB, comme le demande l’Otan, et soutien durable à l’Ukraine font consensus.
Si le SPD rejette la livraison de missiles longue portée Taurus à Kiev, la position des conservateurs reste floue sur ce point, même si Friedrich Merz s’y était dit a priori favorable. Autant de sujets qui feront l’objet d’âpres négociations pour former un gouvernement, si comme probable, aucun camp ne l’emporte nettement dans les urnes en février prochain.