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Albert Kassabi des Forbans Est Mort à 63 Ans

« Tape dans tes mains, un peu plus fort… » : Bébert, la voix explosive des Forbans, s’est tue pour toujours à 63 ans. Derrière le sourire et les bananes gominées, un homme discret emporté par une longue maladie. Que reste-t-il aujourd’hui du phénomène qui faisait hurler les bals dans les années 80 ?

Quand on pense aux années 80 en France, il y a les images de Madonna, de Michael Jackson… et puis il y a cette voix rauque qui hurlait « Chante ! Plus fort que le silence ! » dans tous les bals de campagne et les salles des fêtes. Albert Kassabi, surnommé Bébert, leader des Forbans, nous a quittés le 25 novembre 2025 à l’âge de 63 ans. Une nouvelle qui a fait l’effet d’un coup de tonnerre dans le petit monde du rock français old school.

Une disparition qui résonne comme un dernier riff

C’est Michel Papain, batteur et cofondateur du groupe, qui a annoncé la terrible nouvelle à l’AFP. Bébert s’est éteint en région parisienne après avoir lutté longtemps contre la maladie. Aucun détail supplémentaire n’a filtré – la famille et les proches souhaitant visiblement préserver l’intimité de ces derniers moments. Mais déjà, les hommages pleuvent sur les réseaux sociaux et dans les médias spécialisés.

Car Bébert, ce n’était pas seulement une voix. C’était une silhouette, une énergie, un style inimitable. Avec sa banane impeccable, son blouson de cuir et son sourire carnassier, il incarnait le rock’n’roll à la française version populaire, celle qui faisait danser les adolescents comme les grands-parents un samedi soir.

Des débuts dans les surprises-parties de banlieue

Tout commence à la fin des années 70 dans la région parisienne. Albert Kassabi, jeune ouvrier passionné de rockabilly, monte un groupe avec des copains : Philippe Massebeuf, Dominique Lupo, Jean-Louis Pelletier et donc Michel Papain. Le nom ? Les Forbans. Un clin d’œil à ces pirates qui écumaient les mers, mais surtout à l’idée de faire les 400 coups sur scène.

Leur recette ? Reprendre les standards américains des années 50-60 (Eddie Cochran, Elvis, Gene Vincent) en y ajoutant une bonne dose d’énergie française et des paroles parfois décalées. Très vite, ils deviennent les rois des surprises-parties et des bals du samedi soir. Leur credo : faire danser, transpirer, hurler. Et ça marche.

1982 : l’explosion avec « Chante ! »

Le véritable déclic arrive en 1982. Les Forbans décident d’adapter Shout! Shout! (Knock Yourself Out) d’Ernie Maresca, un titre de 1962 peu connu du grand public. Ils le transforment en « Chante ! », une bombe de trois minutes trente qui va tout casser.

Le morceau devient immédiatement un phénomène. Près de deux millions d’exemplaires vendus, des passages en boucle sur toutes les radios, des plateaux télé à n’en plus finir. On voit Bébert et ses acolytes partout : Le Grand Échiquier, Les Grosses Têtes version années 80, les émissions de Guy Lux… Le rock français populaire vient de naître.

« On ne pensait pas que ça allait prendre une telle ampleur. On voulait juste faire danser les gens. Et d’un coup, on s’est retrouvés numéro 1 partout », confiera plus tard Bébert dans une interview.

Une série de tubes qui marquent toute une génération

Après « Chante ! », les tubes s’enchaînent :

  • « Tape dans tes mains » (1983)
  • « Le rock du léopard »
  • « Flip flap »
  • « Je pardonne à Elvis »
  • « Coucou maman »
  • « Rock de la solitude »

Leur style ? Un mélange savoureux de rockabilly, de twist et de bonne humeur communicative. Des chansons souvent légères, parfois un peu kitsch aujourd’hui, mais qui avaient le mérite de mettre tout le monde d’accord sur la piste de danse. Les Forbans, c’était le groupe qui faisait chanter les filles en jupe à pois et les garçons en blouson perfecto.

Un phénomène culturel au-delà de la musique

Ce qu’on oublie souvent, c’est que Les Forbans ont été bien plus qu’un groupe de rock. Ils ont incarné toute une époque : celle des bals populaires, des transistors dans les cours de récré, des premiers slows collés-serrés. Leur succès a même donné naissance à tout un mouvement de groupes « rock de bal » en France : Émile et Images, Début de Soirée, Cookie Dingler… tous doivent quelque chose aux Forbans.

Leur look aussi a marqué les esprits. La fameuse banane gominée, les chemises à carreaux, les jeans retroussés… c’était le retour du rock’n’roll fifties version française, mais sans le côté rebelle américain. Ici, on était sage, on dansait, on s’amusait. C’était le rock familial.

Les années 90 et le reflux

Comme beaucoup de phénomènes des années 80, les Forbans vont connaître un ralentissement dans les années 90. La vague grunge, l’arrivée du rap, la techno… les goûts changent. Le groupe continue malgré tout à tourner, fidèle à son public de toujours. Ils remplissent encore les salles des fêtes, les casinos, les festivals rétro.

Bébert, lui, reste fidèle à l’image qu’on lui connaît. Toujours le sourire, toujours la banane, toujours cette énergie communicative. Même quand les caméras se font plus rares, il continue de croire à la magie du live.

Le retour en grâce dans les années 2000-2010

Et puis arrive la vague nostalgie. Les années 80 redeviennent à la mode. Les compilations « Tubes des années 80 » cartonnent, les émissions « Retour vers le passé » se multiplient. Les Forbans sont invités partout : Les Années Bonheur de Patrick Sébastien, les tournées Âge Tendre, les festivals Rock’n’Roll Vintage

En 2012, ils sortent même un nouvel album, On remet le rock’n’roll, avec des reprises et quelques inédits. Preuve que le public ne les a jamais vraiment oubliés. Bébert, à plus de 50 ans, sautait encore sur scène comme un gamin de 20 ans.

Un homme discret derrière la légende

Ce qu’on savait moins, c’est qu’Albert Kassabi était un homme profondément discret dans la vie. Marié, père de famille, il vivait loin des projecteurs entre deux tournées. Ceux qui l’ont côtoyé parlent d’un homme gentil, attentionné, toujours prêt à rendre service. Loin de l’image du rockeur déjanté qu’il pouvait renvoyer sur scène.

Il avait d’ailleurs confié dans une interview en 2018 : « Sur scène, je suis Bébert. Dans la vie, je suis Albert. Deux personnes différentes. Bébert, c’est le clown qui fait le spectacle. Albert, c’est le mec qui aime être tranquille avec sa femme et ses enfants. »

L’héritage des Forbans aujourd’hui

Aujourd’hui, que reste-t-il des Forbans ? D’abord une discographie intemporelle pour les soirées rétro. Ensuite, toute une génération qui a appris à danser sur leurs chansons. Et enfin, un modèle de longévité dans le métier : plus de 40 ans de carrière, toujours avec la même passion.

Leur musique continue d’être jouée dans les mariages, les anniversaires, les soirées à thème. « Chante ! » reste l’un des morceaux les plus demandés par les animateurs de mariage. Preuve que certaines chansons traversent les époques.

Les réactions après l’annonce

Dès l’annonce de sa disparition, les hommages se sont multipliés. Patrick Sébastien, qui les avait souvent invités dans ses émissions, a écrit : « Bébert, c’était la joie de vivre incarnée. Il va terriblement nous manquer. »

De nombreux animateurs radio des années 80, des collègues musiciens, mais aussi des fans anonymes ont partagé leurs souvenirs. Tous évoquent la même chose : cette capacité unique à mettre l’ambiance, à faire chanter même les plus timides.

Michel Papain, le batteur, a promis que le groupe continuerait malgré tout. « Bébert aurait voulu qu’on continue à faire danser les gens », a-t-il déclaré, la voix brisée.

Un dernier salut

Alors voilà. Bébert est parti. Mais quelque part, dans une salle des fêtes de campagne, un animateur va lancer « Chante ! » et des centaines de personnes vont reprendre en chœur. Et à ce moment-là, il sera toujours là.

Merci pour tout, Bébert. Merci pour les sourires, les pas de danse maladroits, les soirées inoubliables. Le rock’n’roll français te doit beaucoup.

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