C’était une intervention très attendue. Depuis que l’affaire Andy Kerbrat a éclaté mi-octobre, avec ce député LFI nantais pris en flagrant délit d’achat de drogue, la maire socialiste de Nantes Johanna Rolland s’était murée dans le silence. Une position de plus en plus intenable face aux assauts répétés de l’opposition qui réclamait une réaction de sa part. Vendredi matin, lors d’un conseil municipal qui s’annonçait houleux, l’édile a fini par sortir de sa réserve, acculée par une série d’interpellations de ses opposants.
« Les faits évoqués sont graves, le déontologue de l’Assemblée a été saisi. Si les faits rapportés par des médias à ce stade sont avérés, alors le député Andy Kerbrat devra prendre ses responsabilités », a fini par lâcher Johanna Rolland, en référence aux révélations de Mediapart selon lesquelles les achats de stupéfiants de l’insoumis auraient été financés par son avance de frais de mandat.
Un silence longtemps maintenu malgré la pression
Pendant plusieurs semaines, alors que l’affaire enflait, la maire de Nantes avait choisi de ne pas commenter publiquement l’attitude du député de sa ville, malgré les demandes insistantes de la droite et du centre. Des messages écrits réclamant une prise de position étaient jusqu’ici restés lettre morte. Mais vendredi, les élus minoritaires avaient bien l’intention d’obtenir des réponses.
Les opposants montent au créneau
Dès l’ouverture du conseil, les interpellations se sont enchaînées. « Comment expliquer qu’un élu censé défendre les intérêts des citoyens semble participer activement à un système criminel ? », a dénoncé Valérie Oppelt, conseillère municipale d’opposition. « Nous souhaitons vous entendre sur le comportement de monsieur Kerbrat et sa nécessité de démissionner », a-t-elle martelé.
Je pense, effectivement, que l’absence de condamnation claire et publique d’un élu nantais qui est votre allié, qui a été pris en flagrant délit de consommation, affaiblit considérablement le message collectif que nous envoyons à nos jeunes et aux Nantais en général.
Foulques Chombart de Lauwe, conseiller municipal
Son collègue Julien Bainvel a lui pointé la « géométrie variable » des indignations de la maire. « Si le député avait été un opposant, vous auriez appelé à sa démission (….) Ce qui se passe est d’une extrême gravité et démontre une fois de plus, malheureusement, que vos indignations sont à géométrie variable », a-t-il asséné.
La maire contrainte à une réponse
Face à ce tir nourri, Johanna Rolland a donc fini par monter au créneau. Non sans s’agacer du moment choisi pour aborder ce sujet, en pleine crise politique nationale. « Les Nantais comme les Français attendent de la responsabilité et des solutions et vous faites le choix de démarrer le conseil sur ce sujet. Cela relève, mesdames et messieurs les conseillers municipaux de l’opposition, je vous le dis comme je pense, de votre triste niveau », a-t-elle lancé.
Une réponse cinglante mais qui n’a pas suffi à éteindre les critiques, plusieurs élus opposants jugeant sa réaction trop timide et tardive. Johanna Rolland n’a en effet pas appelé directement Andy Kerbrat à la démission, se contentant de l’inviter à « prendre ses responsabilités » si les faits étaient confirmés. Le feuilleton est loin d’être terminé, alors qu’une enquête est en cours sur les agissements du député.
La maire de Nantes aura en tout cas été contrainte de sortir de son silence sur un dossier qui empoisonne la vie politique locale depuis des semaines. Une affaire embarrassante pour la gauche nantaise, déjà fragilisée, qui vient rappeler que la question des drogues concerne toutes les strates de la société, y compris ses représentants élus.