L’accord de libre-échange entre l’Union européenne et les pays du Mercosur continue de susciter la controverse en France. Alors que les négociations touchent à leur fin après des décennies de discussions, le gouvernement français a réaffirmé son opposition ferme à la signature de cet accord en l’état, jugeant qu’il représente une menace pour l’agriculture française et l’environnement.
La France campe sur ses positions
À quelques jours du sommet du G20 qui se tiendra à Rio de Janeiro les 18 et 19 novembre, la ministre française de l’Agriculture, Annie Genevard, s’est voulue catégorique : l’accord UE-Mercosur “ne sera pas signé” lors de cette rencontre internationale. Une prise de position claire qui reflète la ligne adoptée par Paris depuis plusieurs mois face à ce traité de libre-échange controversé.
Selon la ministre, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, est parfaitement au courant de la position de la France et d’autres pays européens sur ce dossier sensible. C’est ce qui explique, selon Annie Genevard, que la signature de l’accord ne soit pas à l’ordre du jour du G20 de Rio.
Les craintes pour l’agriculture française
Au cœur des inquiétudes françaises se trouve l’impact potentiel de cet accord sur le secteur agricole national. Pour le gouvernement et les syndicats agricoles, il s’agit d’un “mauvais accord” qui risque de déstabiliser les producteurs français en ouvrant la porte à une concurrence déloyale des pays sud-américains.
Annie Genevard a détaillé les volumes d’importations prévus dans le cadre de cet accord : 99 000 tonnes de bœuf, 180 000 tonnes de sucre et autant de viande de volaille. Des chiffres qui font craindre un véritable “déferlement” de produits sud-américains sur le marché européen, au détriment des agriculteurs français.
C’est un mauvais accord qui va faire déferler sur notre pays une quantité de productions qui vont venir concurrencer directement nos producteurs.
Annie Genevard, ministre française de l’Agriculture
Des normes environnementales en question
Au-delà des enjeux économiques, le gouvernement français pointe du doigt les conséquences environnementales d’un tel accord. Annie Genevard a souligné que l’ouverture des frontières aux produits du Mercosur se ferait “au prix de la déforestation et de normes environnementales” peu contraignantes.
Cette critique fait écho aux préoccupations croissantes en Europe concernant l’impact de l’accord sur le climat et la biodiversité. De nombreuses voix s’élèvent pour dénoncer le risque d’une augmentation de la déforestation en Amazonie, liée à l’expansion des surfaces agricoles destinées à l’exportation vers le marché européen.
La mobilisation des agriculteurs français
Face à cette situation, les syndicats agricoles français ont fait de la non-signature de l’accord une priorité absolue. Ils ont érigé ce combat en “ligne rouge” à ne pas franchir et prévoient une amplification de la mobilisation dans les campagnes à partir de la mi-novembre.
Les agriculteurs n’excluent pas d’aller jusqu’à Bruxelles pour faire entendre leur voix et peser sur les décisions européennes. Une démonstration de force qui témoigne de l’inquiétude grandissante du monde agricole face à cet accord perçu comme une menace existentielle.
L’Europe face aux mesures protectionnistes américaines
En parallèle des discussions sur l’accord UE-Mercosur, la ministre française de l’Agriculture a également abordé la question des relations commerciales avec les États-Unis. Alors que Donald Trump a promis durant sa campagne une hausse des droits de douane sur les produits importés, Annie Genevard a appelé l’Europe à “se protéger” contre ce qu’elle considère comme “une agression”.
Quand Donald Trump dit “America First”, nous, on doit dire Europe First, France First.
Annie Genevard, ministre française de l’Agriculture
La ministre a insisté sur la nécessité pour l’Europe de répondre aux mesures protectionnistes américaines et de ne pas se laisser “intimider” ou “déposséder” de ses propres productions. Une position ferme qui illustre les tensions commerciales croissantes entre l’UE et les États-Unis.
Dans ce contexte, le secteur viticole français est particulièrement inquiet. Premier débouché à l’export pour les vins français, le marché américain avait déjà été touché par des taxes douanières de 25% sous le premier mandat de Donald Trump. De nouvelles mesures similaires pourraient compliquer significativement la vie des producteurs, déjà éprouvés par des taxes imposées par la Chine.
L’opposition de la France à l’accord UE-Mercosur et son appel à une Europe qui se protège face aux États-Unis illustrent les défis auxquels est confrontée la politique commerciale européenne. Entre la défense des intérêts agricoles, les enjeux environnementaux et les tensions géopolitiques, l’UE doit naviguer en eaux troubles pour définir sa stratégie dans un monde de plus en plus complexe et concurrentiel.