Imaginez un lieu où, pendant des décennies, des montagnes d’ordures ont pollué l’air, empoisonné les sols et menacé la santé de milliers de personnes. Maintenant, picturez ce même endroit transformé en un écrin de verdure, avec des pelouses soignées, des terrains de sport et une forêt tropicale naissante. C’est l’histoire d’Akouédo, un quartier de l’est d’Abidjan, en Côte d’Ivoire, où une ancienne décharge, jadis synonyme de nuisances, s’est métamorphosée en un parc urbain flambant neuf. Cette transformation, aussi spectaculaire qu’inspirante, redonne espoir aux habitants et redéfinit l’avenir de cette métropole de six millions d’âmes.
Une renaissance verte pour Akouédo
À Abidjan, la capitale économique de la Côte d’Ivoire, l’urbanisation rapide a souvent laissé peu de place aux espaces verts. Pourtant, le quartier d’Akouédo, autrefois marqué par une décharge nauséabonde, s’apprête à accueillir un parc de 100 hectares, un véritable poumon vert dans une ville en pleine expansion. Ce projet, fruit de cinq années de travaux, symbolise une victoire pour les habitants et une avancée majeure pour l’environnement. Mais comment un site aussi pollué a-t-il pu devenir un lieu de vie et de loisirs ?
Un passé lourd de conséquences
Ouverte en 1965, la décharge d’Akouédo a longtemps été le principal site de stockage des déchets de la ville. Pendant plus de 50 ans, des millions de tonnes de détritus, dont des déchets toxiques, s’y sont accumulés, transformant le quartier en un lieu malsain. Les odeurs pestilentielles, les nuisibles et les eaux polluées rendaient la vie des riverains insupportable. Une habitante de longue date, Célestine Maïlé, raconte :
« On a beaucoup souffert. Il y avait des montagnes d’ordures et en dessous, l’eau coulait partout. »
Célestine Maïlé, riveraine d’Akouédo
Les problèmes allaient bien au-delà des nuisances olfactives. Une étude scientifique menée en 2019 par des chercheurs ivoiriens a révélé que la décharge constituait un risque sanitaire majeur. Les habitants étaient exposés à des polluants dangereux comme le plomb, le mercure ou le chrome, un métal cancérigène. Ces substances favorisaient des maladies telles que le paludisme, les troubles respiratoires ou les infections gastro-intestinales. Pour Célestine, les conséquences sont personnelles : elle souffre encore de problèmes oculaires liés à des décennies de vie à proximité du site.
Un danger pour la santé et la sécurité
Outre les risques sanitaires, la décharge d’Akouédo était devenue un lieu à l’atmosphère pesante. Les agressions y étaient fréquentes, et le site attirait des activités illicites, ce qui renforçait le sentiment d’insécurité. « C’était comme si nous vivions au cimetière », confie Séverin Alobo, représentant de la chefferie locale. Ce contexte rend la transformation du site d’autant plus significative pour les habitants, qui y voient une forme de réparation après des années de souffrance.
Un lieu autrefois synonyme de pollution et d’insécurité devient un symbole d’espoir et de renouveau pour toute une communauté.
Un projet ambitieux pour un avenir durable
La transformation de la décharge en parc urbain a nécessité un investissement colossal de 124 milliards de francs CFA, soit environ 189 millions d’euros, financé par l’État ivoirien. Ce projet ne se limite pas à un simple réaménagement paysager. Il intègre des solutions innovantes pour gérer les déchets enfouis et minimiser leur impact environnemental. Grâce à un système de drainage et de captage, le biogaz et les liquides issus de la fermentation des 53 millions de tonnes de déchets sont collectés et transformés en électricité. Cette énergie alimente non seulement le parc, mais aussi une partie du réseau national.
Le parc d’Akouédo se distingue également par ses infrastructures modernes. Les visiteurs pourront profiter :
- D’un court de tennis et de deux terrains de football.
- D’une grande passerelle serpentant à travers une forêt tropicale en développement.
- De potagers partagés pour encourager l’agriculture urbaine.
- D’une Maison de l’environnement dédiée aux enjeux écologiques.
Ces aménagements font du parc un lieu de détente, de sport et d’éducation, tout en favorisant un mode de vie plus sain pour les habitants.
Un impact social et économique
Le projet ne se contente pas de reverdir le quartier. Il a également créé 750 emplois, directs et indirects, offrant des opportunités économiques aux habitants. Un marché local a été construit, un collège est en cours de développement, et deux kilomètres de routes ont été rénovés, améliorant la connectivité du quartier. Pour Bouaké Fofana, ministre de l’Hydraulique, de l’Assainissement et de la Salubrité, ce projet est une réussite totale :
« Ce qui a été perdu a été amplement regagné. »
Bouaké Fofana, ministre ivoirien
Pour les habitants, ce parc représente bien plus qu’un espace vert. Il redonne une dignité au quartier, longtemps stigmatisé par la décharge. « Le nom d’Akouédo ne sera plus associé à une décharge, mais à un beau parc urbain », ajoute le ministre, soulignant l’impact symbolique de cette transformation.
Un modèle pour l’avenir ?
La reconversion de la décharge d’Akouédo en parc urbain pourrait inspirer d’autres villes confrontées à des défis similaires. Dans un contexte d’urbanisation galopante, la création d’espaces verts est essentielle pour améliorer la qualité de vie et lutter contre la pollution. Le parc d’Akouédo montre qu’il est possible de transformer un passif environnemental en une opportunité pour la communauté. Mais ce projet soulève aussi des questions : comment gérer durablement les déchets dans les grandes métropoles ? Quelles leçons tirer pour d’autres villes africaines ?
Aspect | Impact |
---|---|
Environnement | Valorisation des déchets en énergie, réduction de la pollution. |
Social | Amélioration de la santé et de la sécurité des habitants. |
Économique | Création de 750 emplois, développement d’infrastructures. |
Le parc d’Akouédo n’est pas seulement un projet local. Il incarne une vision d’avenir où les villes peuvent conjuguer développement, durabilité et bien-être. Alors que la date d’ouverture officielle approche, les habitants d’Abidjan attendent avec impatience de découvrir ce nouvel espace, symbole d’un renouveau tant attendu.
Ce projet illustre une vérité universelle : même les lieux les plus abîmés peuvent renaître, pour peu qu’on y mette les moyens et la volonté. À Akouédo, la transformation d’une décharge en parc urbain prouve que le changement est possible, et que l’espoir peut germer là où tout semblait perdu.