C’est une décision qui pourrait faire date dans la lutte contre l’addiction aux écrans chez les jeunes. Le district scolaire de Los Angeles, le deuxième plus grand des États-Unis, a voté mardi 18 juin l’interdiction totale des smartphones dans ses écoles publiques. Une mesure radicale mais nécessaire selon ses promoteurs, face à l’impact délétère de ces appareils sur la santé mentale et les résultats scolaires des élèves.
Une journée sans téléphone pour des enfants plus heureux
Nick Melvoin, membre du conseil d’administration du district, est à l’origine de cette proposition d’interdiction. Il s’appuie sur les retours d’expérience positifs des écoles ayant déjà instauré des “journées sans téléphone” :
Les écoles qui ont déjà mis en place une journée sans téléphone font état de résultats incroyables : les enfants sont plus heureux, ils se parlent, leurs résultats scolaires sont meilleurs. Je pense donc qu’il s’agit d’une idée dont le temps est venu.
– Nick Melvoin, conseil d’administration du district scolaire de Los Angeles
Sa résolution s’appuie également sur de nombreuses recherches montrant les effets néfastes d’une utilisation excessive du smartphone chez les adolescents :
- Augmentation du stress, de l’anxiété et de la dépression
- Problèmes de sommeil
- Sentiments d’agressivité
- Pensées suicidaires
À l’inverse, les élèves qui n’utilisent pas de smartphone à l’école obtiennent de meilleurs résultats scolaires selon les études. Concrètement, l’administration du district devra maintenant élaborer un plan pour bannir l’usage des téléphones et l’accès aux réseaux sociaux pendant toute la journée de classe.
La Californie emboîte le pas
Cette décision locale fait écho à une prise de conscience plus large des dangers des écrans pour la jeunesse. Le même jour, le gouverneur de Californie Gavin Newsom a annoncé son intention d’interdire également les smartphones dans toutes les écoles de l’État, sous réserve de l’approbation du parlement.
Le médecin chef des États-Unis, Vivek Murthy, a lui aussi tiré la sonnette d’alarme dans une tribune publiée lundi dans le New York Times. Il y réclame des avertissements clairs sur les réseaux sociaux, à l’image de ceux figurant sur les paquets de cigarettes, pour alerter sur “les dangers importants qu’ils représentent pour la santé mentale des adolescents”.
Passer plus de trois heures par jour sur les réseaux sociaux double le risque de provoquer des symptômes liés à la dépression et à l’anxiété chez les adolescents.
– Dr Vivek Murthy, médecin chef des États-Unis
Un consensus transpartisan
Dans une Amérique de plus en plus polarisée, la régulation du numérique pour protéger les jeunes semble faire figure d’exception en ralliant tous les bords politiques. Outre la Californie démocrate, la Floride républicaine a déjà interdit les portables à l’école l’an passé.
Des projets similaires sont en cours dans de nombreux autres États :
- Oklahoma
- Kansas
- Vermont
- Ohio
- Louisiane
- Pennsylvanie
Cette vague d’interdictions témoigne d’une prise de conscience des effets pervers d’une exposition précoce et excessive aux écrans. Mais suffira-t-elle à endiguer la déferlante des réseaux sociaux et le mal-être adolescent qui l’accompagne ? L’avenir le dira, mais le signal envoyé par Los Angeles constitue un premier pas majeur.
Quelles alternatives pour éduquer au numérique ?
Au-delà de l’interdiction pure et simple, certains prônent une approche plus nuancée passant par l’éducation au numérique. Il s’agirait d’apprendre aux jeunes à utiliser les outils digitaux de manière raisonnée et critique, plutôt que de les en priver totalement.
Des initiatives pédagogiques émergent en ce sens, pour développer une véritable culture du numérique :
- Cours de littératie numérique
- Ateliers de création de contenus
- Sensibilisation aux enjeux de la vie privée et de l’identité en ligne
- Réflexion sur le temps d’écran et le bien-être digital
L’enjeu est de taille car le numérique est amené à prendre une place croissante, tant dans la sphère privée que professionnelle. Trouver le juste équilibre entre protection et éducation sera l’un des grands défis éducatifs des prochaines années. Los Angeles ouvre la voie, mais le chemin est encore long.