Imaginez-vous suspendu à une paroi rocheuse, le vent glacial des Alpes fouettant votre visage, vos doigts crispés sur une prise minuscule. Pour Catherine Destivelle, cette sensation n’est pas seulement un souvenir, mais une réalité qu’elle vit encore à 64 ans. Cette pionnière de l’escalade et de l’alpinisme, véritable icône des sports extrêmes, continue de grimper avec une agilité féline, malgré trois prothèses. Son histoire, faite de triomphes, de chutes dramatiques et d’une résilience hors norme, est une leçon de courage et de passion. Plongeons dans le parcours d’une femme qui a redéfini les limites du possible en montagne.
Une Légende Forgée dans la Roche
Lorsqu’elle débute l’escalade dans les années 1970, Catherine Destivelle entre dans un monde dominé par les hommes. À l’époque, ce sport est confidentiel, presque marginal. Les équipements sont rudimentaires, et les femmes y sont rares. Pourtant, elle s’impose rapidement, non pas par la force brute, mais par une **technique affûtée** et une capacité unique à « lire » le rocher. Cette approche intuitive, qu’elle qualifie d’ »empirique », devient sa marque de fabrique.
Adolescente, elle grimpe sans préparation spécifique, guidée par son instinct et son amour de la montagne. Ses petits pieds, qu’elle doit caler dans des chaussons trop grands avec plusieurs paires de chaussettes, lui valent le surnom de « Patin à roulettes ». Mais dès que des chaussons adaptés arrivent en 1978, sa précision explose, et elle commence à enchaîner les exploits.
« Je n’ai jamais géré mon corps, je grimpais, c’est tout. »
Catherine Destivelle
Des Compétitions à la Conquête des Sommets
Encouragée par ses proches, Catherine se lance dans les compétitions d’escalade dans les années 1980. Sans entraînement structuré, elle remporte trois titres de championne du monde (1986, 1987, 1988), un exploit qui la propulse au sommet de la discipline. Mais l’escalade en salle ne lui suffit pas. Attirée par l’immensité des montagnes, elle se tourne vers l’**alpinisme**, où elle va écrire certaines des pages les plus légendaires de l’histoire.
Dans les années 1990, elle devient la première femme à réaliser en solo hivernal le trio mythique des faces nord : l’*Eiger* (1992), les *Grandes Jorasses* (1993) et le *Cervin* (1994). Ces ascensions, d’une difficulté extrême, sont des jalons dans l’histoire de l’alpinisme. En 2020, elle est consacrée par le prestigieux **Piolet d’Or Carrière**, une reconnaissance unique pour une femme.
Le trio mythique en bref :
- Eiger (1992) : Une face nord abrupte, théâtre de drames historiques.
- Grandes Jorasses (1993) : Une traversée technique en conditions hivernales.
- Cervin (1994) : Un sommet iconique, gravi en solo.
Des Chutes qui Forment le Caractère
Si Catherine Destivelle est une légende, elle n’a pas été épargnée par les épreuves. Deux chutes majeures ont marqué sa carrière, chacune révélant sa force mentale. La première survient dans les années 1980, à Chamonix. En empruntant une corniche instable, elle tombe de 30 mètres dans une crevasse, se fracturant le bassin et la colonne vertébrale. À une époque où la médecine est moins avancée, son corps résiste, et elle reprend l’escalade.
La seconde chute, en 1996, est encore plus dramatique. En Antarctique, au sommet d’un pic vierge de plus de 4 000 mètres, une erreur la fait chuter, entraînant une fracture ouverte du tibia. Isolée, en haute altitude, avec son compagnon de cordée Érik Decamp, elle pense sa fin proche. Pourtant, elle lutte pendant des jours pour redescendre, avant d’être évacuée par hélicoptère. Cette épreuve, qu’elle raconte avec une étonnante sérénité, montre sa capacité à surmonter l’adversité.
« Je pensais que j’allais mourir, mais avec le froid, je me disais que je ne souffrirais pas trop. »
Catherine Destivelle
Un Corps de Chat, Malgré les Prothèses
À bientôt 65 ans, Catherine Destivelle grimpe encore trois fois par semaine. Pourtant, son corps porte les stigmates d’une vie d’exploits : une prothèse à la hanche gauche et une à chaque épaule. Ces interventions, rendues nécessaires par l’usure de ses articulations, ne l’ont pas arrêtée. Au contraire, elles témoignent de sa détermination à rester active. « J’ai toujours le corps d’un chat… mais avec trois prothèses ! » plaisante-t-elle.
Sa longévité est d’autant plus remarquable qu’elle n’a jamais suivi de régime strict ni de programme d’entraînement rigoureux. Kinésithérapeute de formation, elle a appris à écouter son corps, à respecter ses limites tout en repoussant ses frontières. Cette approche, à la fois instinctive et réfléchie, est une source d’inspiration pour les grimpeurs de toutes générations.
Âge | Activité | État physique |
---|---|---|
20-30 ans | Compétitions d’escalade | Aucune préparation spécifique |
30-40 ans | Alpinisme, ascensions solo | Chutes graves, récupération |
60+ ans | Escalade régulière | Trois prothèses, toujours active |
Une Inspiration pour les Nouvelles Générations
Le parcours de Catherine Destivelle est bien plus qu’une série d’exploits sportifs. Il incarne une philosophie de vie : celle de persévérer, d’écouter son corps et de ne jamais se laisser définir par ses blessures ou son âge. Dans un monde où l’escalade est devenue un sport grand public, elle reste une pionnière, une femme qui a ouvert la voie à d’autres grimpeuses.
Ses ascensions en solo, réalisées dans des conditions extrêmes, rappellent que l’alpinisme est autant une quête intérieure qu’un défi physique. Elle inspire non seulement les sportifs, mais aussi tous ceux qui cherchent à surmonter des obstacles, qu’ils soient physiques, mentaux ou sociaux.
Pourquoi Catherine Destivelle inspire :
- Première femme à gravir en solo le trio mythique des faces nord.
- Capacité à surmonter des blessures graves.
- Longévité exceptionnelle dans un sport exigeant.
- Approche intuitive et respectueuse du corps.
L’Héritage d’une Pionnière
Aujourd’hui, Catherine Destivelle ne se contente pas de grimper. Elle partage son expérience à travers des conférences, des livres et des documentaires, transmettant sa passion aux nouvelles générations. Son histoire montre que l’âge, les blessures ou les prothèses ne sont pas des barrières, mais des étapes dans un parcours riche et varié.
En continuant à escalader à un âge où beaucoup auraient raccroché, elle prouve que la passion peut défier le temps. Son surnom de « chat » n’a jamais été aussi pertinent : agile, indépendante, elle incarne l’esprit libre des montagnes.
« Grâce à la médecine et avec trois prothèses, je grimpe encore trois fois par semaine. »
Catherine Destivelle
Le parcours de Catherine Destivelle est une ode à la résilience, à la passion et à la liberté. À travers ses ascensions, ses chutes et ses retours, elle nous rappelle que les véritables sommets sont ceux que l’on gravit dans son cœur et son esprit. Et vous, quel sommet rêvez-vous d’atteindre ?