Et si l’avenir de notre planète dépendait d’une poignée de milliards ? À quelques jours d’une réunion cruciale à Rome, la présidence colombienne de la COP16 sur la biodiversité vient de dévoiler un texte qui pourrait changer la donne. Après l’échec retentissant des négociations à Cali en novembre dernier, ce compromis tente de réconcilier des visions radicalement opposées sur la manière de financer la protection de la nature d’ici 2030. Mais entre ambitions affichées et flou persistant, que faut-il vraiment en attendre ?
Un Nouveau Souffle pour la Biodiversité
Il y a quatre mois, les délégués du monde entier quittaient Cali sans réponse claire. L’accord de Kunming-Montréal, signé en 2022, fixait pourtant un cap ambitieux : stopper la destruction de la nature d’ici la fin de la décennie. Mais sans argent, cet objectif reste une coquille vide. Le texte publié vendredi par la présidence colombienne propose une voie médiane, jonglant entre les attentes des pays en développement et les réticences des grandes puissances.
Pourquoi Cali a-t-il échoué ?
À Cali, les discussions ont buté sur une question explosive : la création d’un fonds spécifique pour la biodiversité. Les pays du Sud, souvent les plus riches en écosystèmes mais les plus démunis en ressources, y voyaient une solution pour accéder directement aux financements. Les nations industrialisées, elles, ont freiné des quatre fers, craignant une dispersion de l’aide déjà mise à mal par des crises économiques.
“Ce texte cherche à naviguer entre les lignes rouges des 196 signataires.”
– D’après un analyste proche des négociations
Le torchon brûlait donc entre deux visions : d’un côté, une demande d’équité et de transparence ; de l’autre, une peur de perdre le contrôle sur les flux financiers. Résultat ? Un statu quo frustrant, mais qui a poussé la présidence colombienne à retravailler sa copie.
Que propose ce nouveau texte ?
Le document dévoilé vendredi mise sur une réforme progressive des financements existants. L’objectif chiffré reste colossal : mobiliser **200 milliards par an** d’ici 2030, dont **30 milliards** provenant directement des pays riches. Mais plutôt que de créer un fonds ex nihilo, il s’agit d’optimiser ce qui existe déjà, tout en laissant la porte ouverte à de nouvelles solutions.
- Renforcer le GEF : Le Fonds mondial pour l’environnement, pilier actuel du financement, doit monter en puissance.
- Améliorer le GBFF : Ce fonds temporaire, doté de 400 millions de dollars, serait mieux structuré.
- Inventer l’avenir : Un “instrument mondial” pourrait voir le jour, sous l’égide de la Convention sur la diversité biologique.
Cette dernière proposition est une concession majeure aux pays en développement, qui réclament un accès plus juste aux ressources. Mais elle reste vague : s’agit-il d’un simple ajustement ou des prémices d’un bouleversement ?
Une équation à 200 milliards
Où trouver autant d’argent ? Le texte esquive la question pour l’instant, préférant organiser un “travail multilatéral” d’ici 2030. Une manière élégante de reporter le problème, diront certains. Pourtant, cette approche pourrait avoir du sens : structurer dès maintenant les outils financiers pour qu’ils soient prêts à absorber des fonds massifs dans les années à venir.
Objectif | Montant annuel | Échéance |
Total des flux financiers | 200 milliards | 2030 |
Contribution des pays riches | 30 milliards | 2030 |
Ces chiffres impressionnent, mais sans un plan concret, ils risquent de rester des promesses en l’air. La réunion de Rome, prévue du 25 au 27 février, devra trancher : réforme ou révolution ?
Rome : le rendez-vous décisif
Dans quelques jours, les délégués se retrouveront dans les murs de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture. L’enjeu est clair : transformer ce texte en un accord viable. Mais les positions restent tranchées. Les pays riches accepteront-ils un instrument sous l’autorité de la CDB ? Les nations du Sud lâcheront-elles du lest sur leurs exigences ?
À retenir : Rome sera le théâtre d’un bras de fer entre équité et pragmatisme. Le sort de la biodiversité mondiale en dépend.
Le suspense est à son comble. D’après une source proche des négociations, “ce texte ne résout pas tout, mais il pose les bases d’une discussion structurée”. Un optimisme prudent, qui contraste avec les doutes de nombreux observateurs.
Et après ?
Si Rome accouche d’un accord, la prochaine étape sera de traduire ces engagements en actions. Réformer le GEF et le GBFF demandera du temps et des ressources. Quant à l’idée d’un nouvel instrument financier, elle pourrait redessiner les rapports de force mondiaux sur l’environnement. Mais pour l’instant, tout reste à écrire.
En attendant, une chose est sûre : la nature ne peut plus attendre. Chaque année, des espèces disparaissent, des écosystèmes s’effondrent. Le compromis colombien est-il une lueur d’espoir ou un pansement sur une plaie béante ? Réponse dans quelques jours.