Ilias Roussos, père de quatre enfants, se souviendra toujours du jour où il a été forcé de quitter Santorin, son île natale, comme des milliers d’autres habitants terrifiés par une série de séismes d’une ampleur sans précédent. Depuis plus de deux semaines, avec sa famille, il vit dans un camp de réfugiés aménagé dans une colonie de vacances de la banlieue d’Athènes, à des centaines de kilomètres de chez lui.
Plus de 20 000 secousses enregistrées
Haut-lieu touristique de la mer Égée, Santorin a été ébranlée par des milliers de séismes depuis la fin janvier, dont les plus puissants atteignaient une magnitude de 5,3. Selon l’université d’Athènes, environ 20 000 tremblements de terre se sont produits dans la région en l’espace d’un mois, un phénomène totalement inédit depuis le début des relevés en 1964.
Une île vidée de ses habitants
Face à cette situation, de nombreuses familles ont préféré quitter l’île. Après avoir passé deux nuits dans sa voiture, Ilias Roussos a pris la décision de partir pour Athènes avec sa femme et ses enfants le 1er février. En quelques jours, la plupart des 16 000 résidents permanents de Santorin, ainsi que de nombreux travailleurs saisonniers, ont abandonné l’île pour se réfugier chez des proches sur le continent grec ou dans leur pays d’origine, comme l’Albanie pour certains.
Trois de mes enfants pleuraient, ma femme était sur les nerfs. Nous sommes partis, que pouvais-je faire d’autre ?
confie Ilias Roussos à l’AFP
Un refuge temporaire près d’Athènes
Pour héberger une partie des déplacés, la mairie d’Athènes a mis à disposition une colonie de vacances située à Agios Andreas, à une trentaine de kilomètres au nord-est de la capitale. Environ 130 personnes, dont une moitié d’enfants, y ont trouvé refuge. Logés dans des maisonnettes de quatre personnes avec climatisation, les résidents bénéficient de trois repas par jour et d’un service de blanchisserie.
Des activités sont également organisées pour occuper petits et grands pendant la journée. Si les plus jeunes semblent apprécier ce séjour improvisé à Athènes, leurs parents s’inquiètent. « C’est un peu difficile avec quatre enfants ici », reconnaît Ilias Roussos, actuellement au chômage et qui n’exclut pas de déménager en Géorgie, le pays d’origine de sa femme.
Le manque à gagner pour les travailleurs
Pour ceux qui travaillent habituellement à Santorin, cette évacuation forcée représente aussi un manque à gagner conséquent. Ilir Cingerrima, un peintre en bâtiment albanais de 39 ans, déplore avoir déjà perdu plusieurs offres d’emploi sur l’île, visitée l’an dernier par environ 3,4 millions de touristes. Lui et sa femme Arjana espèrent pouvoir rentrer dès que possible, à condition que les écoles rouvrent pour leurs enfants.
Nous ne demandons pas grand-chose. Au moins nous sommes à l’abri, au chaud.
se réjouit malgré tout Arjana
La crainte d’une éruption volcanique
Si l’état d’urgence a été déclaré et que l’activité sismique se poursuit, aucune victime ni dégâts majeurs n’ont pour l’instant été signalés. Mais les experts s’inquiètent d’une possible accumulation de magma dans les profondeurs de Santorin, qui fait partie d’une caldeira volcanique. Les deux volcans sous-marins proches de l’île sont entrés en éruption pour la dernière fois en 1650 et 1950.
Pour le moment, le comité national chargé de surveiller l’activité volcanique se veut rassurant et a minimisé le risque d’une éruption imminente. Mais tant que la menace n’est pas définitivement écartée, les milliers d’habitants de Santorin exilés n’ont d’autre choix que de prendre leur mal en patience, avec l’espoir de pouvoir bientôt regagner leur île.
