Le géant britannique de la distribution d’eau Thames Water navigue en eaux troubles. Croulant sous une dette abyssale de 19 milliards d’euros, l’entreprise vient d’obtenir l’autorisation d’emprunter 3,6 milliards supplémentaires pour éviter un sauvetage public potentiellement ruineux. Mais cette bouffée d’oxygène ne règle pas tous ses problèmes.
Avec 8 000 employés et un quart de la population britannique desservie, Thames Water joue un rôle crucial. Pourtant, l’entreprise privatisée depuis 1989 souffre d’un sous-investissement chronique dans ses infrastructures vieillissantes, certaines datant de l’ère victorienne. Résultat : des déversements massifs d’eaux usées polluent rivières et littoral.
Un bras de fer avec le régulateur
Pour renflouer ses caisses et moderniser son réseau, Thames Water comptait sur une hausse des factures de 59% d’ici 2030. Mais le régulateur de l’eau, l’Ofwat, a limité l’augmentation à 35% en moyenne, jugeant la demande excessive. Une décision contestée par l’entreprise, qui vient de faire appel.
La décision de l’Ofwat affecte notre capacité à financer les améliorations que nos clients et l’environnement méritent.
Adrian Montague, président de Thames Water
Pour l’Ofwat, il s’agit de trouver un équilibre entre les besoins d’investissement et le pouvoir d’achat des consommateurs. Mais certains dénoncent une entreprise qui s’effondre « sous le poids de sa propre dette ».
Des actionnaires sur la sellette
Les propriétaires de Thames Water, un consortium mené par des fonds de pension canadien et britannique, sont pointés du doigt. L’entreprise a été épinglée pour avoir versé « des dividendes injustifiés » malgré de piètres performances.
Si les 3,6 milliards d’euros d’emprunts supplémentaires offrent un répit, Thames Water cherche toujours des investisseurs pour éviter la faillite. En attendant, le spectre d’un sauvetage public plane, au moment où le gouvernement s’efforce de relancer la croissance.
Le défi de la modernisation
Au cœur du problème : l’état du réseau d’eau et d’assainissement britannique. Thames Water, comme ses concurrents, peine à entretenir et moderniser des canalisations anciennes. Les fuites et déversements d’eaux usées se multiplient, suscitant la colère de la population et des autorités.
- Un quart des Britanniques desservis par Thames Water
- 16 milliards d’euros de dette pour l’entreprise
- 59% de hausse des factures demandée, 35% autorisée
- 18 millions d’euros d’amende pour dividendes injustifiés
Le défi est immense pour Thames Water, pris en étau entre les exigences du régulateur, la pression de ses actionnaires et le mécontentement des usagers. Si l’entreprise ne parvient pas à sortir la tête de l’eau, c’est tout le modèle de la privatisation des services publics au Royaume-Uni qui pourrait être remis en question.