La France vient de vivre un moment historique ce vendredi : pour la première fois, un ancien Président de la République a été assigné à résidence avec port d’un bracelet électronique. Nicolas Sarkozy, condamné il y a quelques mois dans l’affaire dite « des écoutes », a vu un agent de l’administration pénitentiaire se présenter à son domicile parisien cet après-midi pour lui poser le fameux bracelet à la cheville. Une situation totalement inédite pour un ex-chef d’État.
Retour sur cette journée qui marquera les annales judiciaires. Condamné en septembre dernier à trois ans de prison, dont un an ferme, pour corruption et trafic d’influence dans l’affaire des écoutes, l’ancien locataire de l’Élysée a vu sa peine confirmée en appel puis en cassation. Après d’âpres négociations avec le parquet, il a finalement obtenu de pouvoir purger sa peine à son domicile, sous surveillance électronique.
Un symbole lourd de sens
Au-delà de l’aspect purement judiciaire, voir un ancien Président affublé d’un bracelet électronique revêt une portée symbolique très forte. C’est la preuve, s’il en fallait encore une, que personne n’est au-dessus des lois, pas même ceux qui les ont faites voter. Un signal envoyé à toute la classe politique, souvent soupçonnée de bénéficier de passe-droits.
C’est un message de fermeté adressé à tous. La justice est la même pour tous, quel que soit le statut de la personne.
D’après une source proche du dossier
Les conditions de la détention à domicile
Si le principe d’une assignation à résidence sous surveillance électronique a été acté, les détails de son exécution restent à définir. Nicolas Sarkozy devra en effet respecter certaines conditions strictes :
- Interdiction de s’absenter de son domicile en dehors de certaines plages horaires définies
- Obligation de recevoir les visites inopinées des agents de probation
- Interdiction d’entrer en contact avec certaines personnes, dont les autres mis en cause dans l’affaire
Des aménagements seront sans doute consentis à l’ancien chef d’État, eu égard à son statut et à ses activités. Il devrait ainsi pouvoir continuer à travailler, en se rendant à son bureau, et à honorer certains rendez-vous importants. Mais sa liberté de mouvement sera fortement réduite pendant un an.
L’épilogue d’une affaire retentissante
La pose de ce bracelet électronique vient clore le feuilleton judiciaire le plus retentissant de ces dernières années. Jamais un ancien Président n’avait ainsi été condamné à de la prison ferme. L’affaire des écoutes, déclenchée il y a près de 10 ans, aura tenu la France en haleine, avec ses multiples rebondissements.
Soupçonné d’avoir voulu obtenir d’un haut magistrat des informations couvertes par le secret, dans une autre procédure le visant, en échange d’un coup de pouce pour un poste prestigieux à Monaco, Nicolas Sarkozy a toujours nié les faits. Mais les juges ont considéré qu’il y avait bien eu un « pacte de corruption », en s’appuyant notamment sur des écoutes téléphoniques.
L’ancien Président, qui reste malgré tout très populaire dans une partie de l’opinion, va devoir s’habituer à ce nouvel accessoire envahissant. Lui qui envisageait de revenir sur le devant de la scène va devoir faire profil bas pendant un an. Une éternité en politique. Mais quand on a connu la prison de la rue de la Santé, la prison dorée reste un moindre mal.
Cette première pose de bracelet électronique fera date. Et même si Nicolas Sarkozy a déjà annoncé vouloir saisir la Cour européenne des droits de l’homme, la justice française a montré qu’elle savait frapper fort et se montrer exemplaire quand il le fallait. Une nouvelle étape dans la moralisation de la vie publique a sans doute été franchie.