Perdre un être cher est une épreuve déchirante. Mais saviez-vous qu’il existe d’autres formes de deuil tout aussi douloureuses, bien que moins reconnues ? Ces « deuils invisibles » peuvent survenir suite à une séparation, un divorce, la perte d’un rêve ou même le fait de voir ses parents vieillir. Bien que différents d’un deuil classique, ils provoquent une grande souffrance et un sentiment de vide. Découvrons ensemble ce qu’est vraiment un deuil invisible et comment le surmonter.
Qu’est-ce qu’un deuil invisible ?
Le terme « deuil invisible » a été inventé par la thérapeute américaine Pauline Boss. Il désigne toutes les formes de deuil ambigu, c’est-à-dire lorsque la perte n’est pas concrète ou socialement reconnue. Cela peut concerner :
- Une rupture amoureuse ou un divorce
- La perte d’un animal de compagnie
- Un proche atteint d’Alzheimer ou dans le coma
- L’infertilité ou une fausse couche
- La fin d’une amitié
- Un coming-out difficile
- Voir ses parents vieillir
- Une grave maladie ou handicap
Lors d’un deuil invisible, il n’y a pas de funérailles ni de rituel pour acter la perte. L’entourage ne se rend souvent pas compte de la douleur vécue. La personne endeuillée se sent seule, incomprise. Son chagrin est nié, minimisé. Pourtant, un deuil invisible fait tout autant souffrir qu’un deuil classique.
Les deuils invisibles dans la famille
Certains deuils invisibles sont spécifiques aux relations familiales. On peut citer :
- Le deuil de voir ses parents vieillir et devenir dépendants
- Le deuil de comprendre que ses parents ne seront jamais comme on le désire
- Le deuil d’avoir un parent présent physiquement mais pas émotionnellement
- Le deuil de s’éloigner d’une famille toxique
- Le deuil de ne pas avoir de relation proche avec sa fratrie
Ces deuils bouleversent profondément car ils touchent aux liens du sang censés être inconditionnels. Ils sont d’autant plus douloureux qu’ils sont rarement reconnus par la société.
Les symptômes d’un deuil invisible
Un deuil invisible se manifeste par des symptômes similaires à ceux d’un deuil classique :
- Tristesse, pleurs
- Sentiment de vide, de manque
- Colère, irritabilité
- Culpabilité, remise en question
- Anxiété, insomnies
- Troubles de l’alimentation
- Repli sur soi, isolement
Lors d’un deuil invisible, on ne reconnaît pas la légitimité de sa douleur, ce qui empêche le processus de deuil et maintient la souffrance.
Marie-Frédérique Bacqué, psychologue spécialiste du deuil
Nier son chagrin ne fait que le refouler. Les émotions finissent par ressurgir sous forme de somatisations, de dépression ou de comportements à risque.
Comment faire son deuil ?
Pour surmonter un deuil invisible, il est primordial de reconnaître et légitimer sa douleur. Voici quelques pistes :
1. Mettez des mots sur votre souffrance. Écrivez un journal, parlez-en à des proches ou à un thérapeute. N’ayez pas peur de dire que vous êtes en deuil.
2. Créez vos propres rituels. Même sans funérailles, vous pouvez inventer des gestes symboliques pour dire au revoir : brûler des photos, écrire une lettre à la personne perdue…
3. Prenez soin de vous. Accordez-vous des moments de répit, pratiquez une activité apaisante. Soyez doux et patient avec vous-même.
4. Cherchez du soutien. Entourez-vous de personnes capables d’accueillir vos émotions sans jugement. Si besoin, suivez une thérapie.
5. Trouvez du sens. Votre deuil peut être l’occasion de repenser votre vie, vos valeurs. Cherchez ce qui compte vraiment pour vous et réorientez-vous dans cette direction.
Faire le deuil, c’est apprendre à aimer autrement, à se souvenir avec douceur plutôt qu’avec douleur. C’est continuer à vivre tout en gardant en soi l’être perdu.
Christophe Fauré, psychiatre
Un deuil invisible peut prendre du temps à être surmonté. C’est un cheminement personnel qui se fait à son rythme. L’essentiel est de s’autoriser à vivre son chagrin et à chercher de l’aide pour ne plus porter seul ce fardeau. Peu à peu, la douleur s’apaisera et laissera place à des souvenirs paisibles, à une nouvelle façon d’aimer l’autre malgré la séparation. Un nouveau chapitre pourra s’ouvrir.
En parler, se faire épauler, reconnaître la réalité de cette perte et la légitimité de son chagrin : telles sont les clés pour guérir d’un deuil invisible et réapprendre à avancer malgré l’absence. Si vous traversez cette épreuve, n’hésitez pas à vous faire aider. Vous n’êtes pas seul.
