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Tchad : Mesures Renforcées Contre Les Viols Après Scandales

Choqué par une série de scandales, dont le viol d'une lycéenne par un policier, le Tchad muscle sa législation contre les violences faites aux femmes. Le gouvernement annonce des mesures fortes pour endiguer ce fléau et mieux protéger les victimes. Mais suffira-t-il de durcir les lois pour changer les mentalités ? Décryptage d'une mobilisation sans précédent dans le pays...

Depuis quelques semaines, le Tchad est secoué par une vague de scandales de viols qui a profondément choqué l’opinion publique. Point d’orgue de cette série noire : le viol présumé d’une lycéenne de 20 ans par un commandant de police, en plein commissariat. Face à l’émoi suscité, le gouvernement vient d’annoncer un train de mesures visant à renforcer la lutte contre les violences faites aux femmes et aux jeunes filles dans le pays. Avec en ligne de mire : mettre fin à l’impunité qui entoure trop souvent ces crimes.

Une ordonnance pour durcir la législation

Mardi, la présidence tchadienne a publié une ordonnance de 16 pages destinée à renforcer « la prévention » et « la répression des violences à l’égard des femmes et des filles », avec l’ambition affichée d’y « mettre fin ». Parmi les principales dispositions :

  • Un appel à la justice à « élargir les catégories de preuves à charge » et à mieux prendre en compte « les témoignages oraux des victimes »
  • La réaffirmation que le consentement des mineures de moins de 18 ans n’est pas valable, même si elles l’expriment
  • Le rappel qu’une victime n’a pas à se défendre physiquement pour que l’acte soit considéré comme un viol
  • La précision que le mariage ne légitime en aucun cas un viol

Pour Amina Priscille Longoh, ministre de la Femme, cette ordonnance vient « renforcer le cadre juridique de la protection des femmes » en donnant « plus de poids à la parole de la victime ». « Ceux qui sont pris en flagrant délit, peu importe leur position sociale, subiront la rigueur de la loi », a-t-elle assuré.

Une impunité dénoncée de toutes parts

Ces annonces interviennent alors que la société civile ne cesse de dénoncer l’impunité qui entoure les violences sexuelles dans le pays. « Il faut que ça cesse », martèle Viviane Djatto, représentante d’une association de défense des droits des femmes. Selon elle, dans les cas de viols, « la loi n’est pas appliquée ».

« Il faut changer la mentalité et la culture du viol. Éduquer au respect des femmes dès le plus jeune âge, dans les familles et à l’école. »

Viviane Djatto, association Justice et Dignité pour les Femmes du Sahel

Des centres d’aide aux victimes ouverts

En parallèle du volet répressif, le gouvernement met aussi l’accent sur la prise en charge des victimes. Six centres leur étant destinés ont ouvert leurs portes ces six derniers mois à travers le pays. Les femmes violentées peuvent y bénéficier d’un soutien psychologique, médical, juridique et d’une aide à la réinsertion.

Scandale après scandale

Cette mobilisation des autorités fait suite à une série de scandales très médiatisés. Le plus retentissant : le viol présumé mi-janvier d’une lycéenne de 20 ans par un commandant de police, dans les locaux-mêmes du commissariat. L’officier mis en cause a immédiatement été arrêté, tout comme un de ses collègues qui avait publiquement pris sa défense en accusant la victime sur les réseaux sociaux.

Deux semaines plus tôt, c’est le viol collectif d’une adolescente de 17 ans qui avait suscité l’émoi. Depuis le début de l’année, les associations affirment avoir recensé pas moins de « 4 féminicides et 11 viols » à travers le pays. Elles dénoncent « un climat de peur et de souffrance incessant » pour les Tchadiennes.

Un durcissement des peines prévu par la loi

Le code pénal tchadien prévoit actuellement des peines de 8 à 15 ans de prison pour les auteurs de viols. Elles peuvent être portées jusqu’à 20 ans en cas de circonstances aggravantes, par exemple si le crime est commis par une personne dépositaire de l’autorité publique, comme un policier.

Reste à savoir si ce durcissement de la législation suffira à endiguer le fléau et à faire évoluer les mentalités dans un pays encore très conservateur. Les associations féministes, elles, saluent un « premier pas » important mais promettent de rester vigilantes. La lutte contre les violences faites aux femmes est un combat de longue haleine au Tchad comme ailleurs.

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