Il inspirait la terreur mais était comparé à un « Robin des Bois » local : Wilexis, l’un des chefs de gang les plus puissants du Venezuela, symbole de l’emprise du crime organisé dans le pays, a été abattu mercredi lors d’une opération de police. Cette mort sonne-t-elle le glas des « mégabandes » qui règnent en maîtres sur certains quartiers? Rien n’est moins sûr selon les experts.
Wilexis, le « roi » de Petaré
Wilexis Alexander Acevedo Monasterios, dit « Wilexis », 39 ans, était à la tête d’un gang de 150 à 200 membres qui contrôlait d’une main de fer Petaré, un immense bidonville de 600 000 habitants dans l’est de Caracas. Extorsions, enlèvements, trafic de drogue, homicides… Son « CV criminel » était long comme le bras, et sa tête mise à prix 150 000 dollars par les autorités.
Mais aux yeux d’une partie de la population de Petaré, celui qui a trouvé la mort mercredi dans une fusillade avec les forces de l’ordre était aussi perçu comme une sorte de « bienfaiteur ». Dans ce labyrinthe de ruelles et de maisons de fortune où la présence de l’État est quasi-inexistante, Wilexis faisait régner sa loi, distribuant une partie des profits du crime sous forme de dons, de fêtes pour les enfants…
Il existait des opinions partagées à son sujet. Une partie de la population le rejetait et une autre partie voyait en lui une sorte de Robin des Bois.
Luis Izquiel, criminologue à l’Université centrale du Venezuela
Un « para-État » criminel
Fort de sa mainmise sur le quartier, le gang de Wilexis était même devenu une sorte de « para-État », réglant certains différends entre voisins. Une justice expéditive rendue par la violence, dans un pays où la population se méfie d’une police régulièrement accusée d’exactions.
Insaisissable depuis des années grâce à la complicité d’une partie des habitants et à la topographie du bidonville qui rend difficile toute intervention, Wilexis a finalement été rattrapé par les autorités. Après des années de traque, le célèbre malfrat a été « neutralisé » par les forces de l’ordre lors d’un violent affrontement, qui fera date dans la lutte contre le crime organisé au Venezuela.
Une lutte sans fin ?
Mais cette « victoire » des forces de l’ordre ne signifie pas pour autant la fin des activités criminelles à Petaré et dans le reste du Venezuela, loin s’en faut. D’après les experts, le vide laissé par la mort de Wilexis risque d’être rapidement comblé, provoquant une guerre de territoires entre gangs rivaux.
Si des mesures ne sont pas prises par les autorités, la situation va rester la même. Les seconds vont prendre la place du chef, ou pire, on va assister à un éclatement en petites bandes qui vont se livrer une guerre sans merci pour le contrôle de la zone.
Luis Izquiel, criminologue
Le cas de Petaré illustre en réalité le fléau de la criminalité qui ronge le Venezuela. Gangs ultraviolents comme le « Tren de Aragua », guérilla urbaine menée par les « collectivos » chavistes… Dans un pays plongé dans une crise économique, sociale et politique sans précédent, la lutte contre ces groupes criminels s’annonce longue et périlleuse pour les autorités vénézuéliennes. La mort de Wilexis n’est qu’une étape dans un combat de tous les instants.
Dans les ruelles poussiéreuses de Petaré, la vie a déjà repris son cours au lendemain de ce fait divers sanglant. Pour les habitants, une seule question demeure : Qui pour succéder au « roi » de la « zona »? La réponse en dira long sur l’avenir de ce quartier, microcosme des maux qui minent le Venezuela d’aujourd’hui.