Face à une inquiétante recrudescence des cas de viols au Tchad, en particulier ceux impliquant des jeunes femmes et adolescentes, le gouvernement a décidé de passer à l’action. Ébranlé par plusieurs affaires retentissantes survenues ces dernières semaines, dont le viol présumé d’une lycéenne de 20 ans par un policier, le Président a promulgué mardi une ordonnance visant à renforcer significativement les moyens de lutte contre ce fléau.
Des mesures concrètes pour éradiquer les violences faites aux femmes
Le document présidentiel de 16 pages, rendu public sur les réseaux sociaux, se fixe pour objectif prioritaire de « mettre fin » aux violences subies par les femmes et filles tchadiennes. Pour y parvenir, tout un arsenal juridique est déployé afin de faciliter le dépôt de plaintes et de mieux condamner les coupables :
- Possibilité pour les juges de s’appuyer davantage sur les témoignages oraux des victimes pour établir une conviction
- Rappel que l’acte sexuel avec une mineure de moins de 18 ans est un viol, même si elle exprime un pseudo-consentement
- Absence de nécessité pour une femme de se défendre physiquement afin de prouver le non-consentement
- Non légitimation du viol par le mariage
Autant de mesures qui devraient permettre, selon la ministre de la Femme Amina Priscille Longoh, de « renforcer le cadre juridique de la protection des femmes » en donnant « plus de poids à la parole de la victime ». Des sanctions exemplaires sont également promises à l’encontre des agresseurs pris sur le fait, « peu importe leur position dans la société ».
Affaires choquantes et commentaires scandaleux
Cette ordonnance présidentielle intervient alors que plusieurs cas de viols ont défrayé la chronique nationale récemment. Le plus emblématique concerne une jeune lycéenne de 20 ans violée dans un commissariat de la capitale par un commandant de police mi-janvier. D’après des sources proches du dossier, le mis en cause a été immédiatement interpellé et placé en garde à vue.
L’autre affaire qui a profondément choqué l’opinion publique est le viol collectif présumé d’une mineure de 17 ans qui rentrait d’un festival à N’Djamena début janvier. Un drame qui a suscité une vague d’indignation dans le pays, accentuée par des commentaires d’internautes masculins accusant la victime d’avoir « ouvert les jambes » et faisant l’apologie du viol. Des propos fermement condamnés par le ministre de la Sécurité, qui a assuré la jeune fille de son « soutien indéfectible ».
Traduire les annonces en actes
Si les associations féministes se félicitent de la volonté politique affichée au plus haut niveau de l’État dans ce combat contre les violences sexistes, elles attendent maintenant du concret. Car le chemin s’annonce long pour changer les mentalités patriarcales et les habitudes d’impunité profondément ancrées au Tchad.
Il ne suffira pas de belles paroles et de lois. Il faut maintenant former les policiers et les juges à prendre au sérieux les plaintes, arrêter et condamner les coupables, protéger et accompagner les victimes.
une responsable associative
Un véritable défi dans un pays où une femme sur trois déclare avoir subi des violences physiques ou sexuelles, et où seulement 3% des victimes de viol osent porter plainte. Face à l’ampleur du phénomène, le gouvernement tchadien semble avoir pris la mesure de l’urgence. Reste maintenant à transformer l’essai sur le terrain, pour que ces viols odieux ne restent plus impunis et que les victimes soient enfin entendues.