Alors que le gouvernement britannique s’apprête à annoncer son soutien à l’extension controversée de l’aéroport londonien d’Heathrow, le débat s’intensifie entre les partisans de la croissance économique et les défenseurs de l’environnement. Le directeur général d’Easyjet, Kenton Jarvis, s’est réjoui de cette potentielle décision lors d’une récente conférence, y voyant une opportunité unique pour sa compagnie d’exploiter cet aéroport à grande échelle et de proposer des tarifs plus bas aux consommateurs.
Un agrandissement qui divise le gouvernement
Selon des sources proches du dossier, la ministre des Finances Rachel Reeves devrait annoncer la semaine prochaine son feu vert pour la construction d’une troisième piste à Heathrow, ainsi que pour l’accroissement de la capacité des aéroports de Gatwick et Luton. Une position qui ne fait cependant pas l’unanimité au sein de son propre parti, certains membres mettant en avant les engagements climatiques pris par les travaillistes. Le maire de Londres Sadiq Khan a lui aussi exprimé son opposition au projet.
Les écologistes montent au créneau
Sans surprise, les organisations environnementales ont vivement réagi à cette annonce. Jenny Bates, de l’ONG Friends of the Earth, a ainsi déclaré qu’une nouvelle piste à Heathrow serait « extrêmement irresponsable en pleine période d’urgence climatique ». Pour les défenseurs de l’environnement, l’extension de cet aéroport, déjà l’un des plus fréquentés au monde avec près de 84 millions de passagers en 2024, est incompatible avec les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
C’était le problème du dernier gouvernement : il y avait toujours quelqu’un pour dire « Oh oui, bien sûr, nous voulons faire croître l’économie, mais nous n’aimons pas cet investissement, ce parc éolien, ces pylônes, cet aéroport ».
Rachel Reeves, ministre des Finances britannique
La croissance avant tout pour le gouvernement
Interrogée sur le sujet lors du forum économique de Davos, Rachel Reeves a botté en touche, se contentant de réaffirmer que la croissance était « la mission numéro un » de son gouvernement et qu’elle devait l’emporter sur toute autre considération. Une position qui risque d’agacer les écologistes mais qui a le mérite d’être claire.
De son côté, la direction d’Heathrow a annoncé fin 2024 un plan d’investissement de 2,7 milliards d’euros sur deux ans pour moderniser ses infrastructures, notamment en matière de livraison des bagages et de ponctualité. L’aéroport, qui a battu son record de fréquentation l’année dernière, souhaite ainsi anticiper la croissance du trafic aérien dans les prochaines années, quitte à s’attirer les foudres des défenseurs de l’environnement.
Un débat qui est loin d’être clos
Alors que le réchauffement climatique s’accélère et que les objectifs de l’Accord de Paris semblent de plus en plus difficiles à atteindre, la question de la place du transport aérien dans nos sociétés est plus que jamais d’actualité. Si certains, comme le patron d’Easyjet, y voient un moteur indispensable de la croissance économique, d’autres pointent son impact environnemental désastreux et appellent à une remise en question de notre modèle de développement.
Une chose est sûre : le débat sur l’extension de l’aéroport d’Heathrow est symptomatique des contradictions auxquelles nos dirigeants sont confrontés, tiraillés entre la volonté de relancer l’économie et la nécessité de lutter contre le changement climatique. Un dilemme cornélien qui est loin d’être résolu et qui promet encore de nombreux débats passionnés dans les mois et années à venir.