Lors de son discours d’investiture pour son second mandat, le président américain Donald Trump a tenu des propos se voulant pacificateurs, promettant d’être un « artisan de la paix ». Pourtant, selon de nombreux experts en relations internationales, ses premières décisions et déclarations à peine de retour à la Maison Blanche sonnent déjà comme une menace pour la stabilité mondiale et risquent d’isoler diplomatiquement les États-Unis.
Trump veut « être fier d’être un artisan de la paix » mais…
Réélu le 5 novembre dernier, Donald Trump a affirmé dans son discours inaugural que son plus grand motif de fierté serait « d’être un artisan de la paix et un rassembleur ». Il a insisté sur le fait que le succès de son mandat ne se mesurerait pas seulement aux « batailles gagnées » mais aussi et surtout aux « guerres terminées et évitées ».
Quelques heures plus tard pourtant, de retour derrière le Bureau Ovale, le président américain a déjà commencé à déployer une rhétorique bien plus offensive. S’adressant à la presse, il a ainsi sommé son homologue russe Vladimir Poutine de trouver rapidement un « accord » pour mettre fin au conflit en Ukraine, menaçant que sans cela, la Russie risquait d’être « détruite ».
Un nouveau sommet avec Poutine en vue
Le milliardaire républicain a laissé entendre à plusieurs reprises qu’il préparait une rencontre avec Vladimir Poutine afin, selon ses mots, « d’en finir » avec la guerre lancée par la Russie le 24 février 2022. Mais le ton employé laisse d’ores et déjà présager des négociations sous haute tension.
L’Amérique d’abord : un credo menaçant pour les alliés
Comme en écho à son tumultueux premier mandat entre 2017 et 2021, Donald Trump a aussi largement repris sa doctrine de « l’Amérique d’abord ». Une vision qui semble déjà semer le trouble chez les partenaires historiques des États-Unis.
Ainsi, le président américain a menacé de « reprendre le contrôle » du Canal de Panama, rétrocédé en 1999 et qu’il considère désormais sous influence chinoise. Il s’est aussi dit prêt à « s’emparer » du Groenland, pourtant territoire danois et donc allié de l’OTAN.
Donald Trump a également proposé d’envoyer l’armée à la frontière mexicaine pour endiguer l’immigration, tout en annonçant le retrait des États-Unis de l’accord de Paris sur le climat ainsi que de l’Organisation Mondiale de la Santé. Des mesures qui ne devraient pas manquer de tendre les relations avec le Mexique et le Canada, deux alliés clés menacés aussi de nouvelles taxes douanières.
Une vision du monde « contradictoire » et « préoccupante »
Pour de nombreux analystes, le positionnement de Donald Trump apparaît pour le moins « contradictoire ». Brian Finucane, de l’International Crisis Group, relève ainsi que le président « aime se présenter comme un grand négociateur » mais se montre en parallèle « belliqueux » et prompt à « proférer des menaces ».
La vision du monde de Trump semble contradictoire. Il a un côté pacifiste et un autre qui semble plus conflictuel et militariste.
Benjamin Friedman, Defense Priorities
Plusieurs experts notent que si Donald Trump adopte un ton plus modéré vis-à-vis de l’Ukraine ou du Moyen-Orient, il se montre en revanche très agressif sur les dossiers latino-américains. Une posture qui rappelle le président populiste du 19ème siècle Andrew Jackson, « à l’aise avec l’utilisation de la force » pour défendre les intérêts américains.
Les alliés traditionnels ignorés
Autre sujet d’inquiétude, Donald Trump n’a quasiment pas évoqué dans son discours les alliés traditionnels des États-Unis, en particulier européens. Un « changement profond » selon Jon Alterman du Center for Strategic and International Studies, pour qui Washington risque de passer « de principal fournisseur de sécurité à principale source d’incertitude ».
Certes, le nouveau secrétaire d’État Marco Rubio a bien rencontré ses homologues du Japon, de l’Inde et de l’Australie. Mais les premières décisions du président ne semblent guère de nature à rassurer.
Les mesures prises par Trump sont préjudiciables.
Kori Schake, ancienne responsable sous George W. Bush
Kori Schake, conseillère de l’ancien président George W. Bush, juge ainsi qu’il est trop tôt pour mesurer l’impact du « chaos » semé par Donald Trump, mais que ses décisions initiales sont déjà « préjudiciables ». Le retrait américain de l’OMS qu’elle cite en exemple sera dommageable. Quant aux menaces sur le Panama, elles pourraient être « contre-productives » et nourrir un sentiment anti-américain dans toute l’Amérique latine.
Alors artisan de la paix ou président va-t-en-guerre ? Si Donald Trump promet d’œuvrer pour un monde stable, ses premières actions font déjà souffler un vent de tensions sur la planète. Un grand écart qui risque de fragiliser la position des États-Unis sur l’échiquier international.