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Crise de l’assurance : L’AMF alerte sur une situation intenable pour les communes

Les communes sont au pied du mur. Alors que nombre d'entre elles peinent à assurer leurs biens face à des tarifs prohibitifs, l'Association des maires de France tire la sonnette d'alarme et appelle à une « action urgente ». La crise de l'assurance des collectivités a atteint un point critique. Décryptage d'une situation jugée insoutenable.

Le cri d’alarme est sans équivoque. Face à la crise qui secoue l’assurance des collectivités locales, l’Association des maires de France (AMF) n’y va pas par quatre chemins : la situation est devenue « insoutenable » pour les communes. De plus en plus d’entre elles se retrouvent dans l’incapacité d’assurer correctement leurs biens, confrontées à des tarifs qui s’envolent et des assureurs qui jouent la carte de l’inertie. Un cocktail explosif qui pousse l’AMF à réclamer une « action urgente » des pouvoirs publics.

Explosion des tarifs et désengagement des assureurs

Le constat est sans appel. Selon l’AMF, les tarifs d’assurance pour les communes ont bondi de 90% en moyenne entre 2020 et 2023. Un chiffre qui atteint même les 147% pour l’assurance des dommages aux biens. Une hausse exponentielle jugée « exorbitante » par les élus locaux, d’autant plus difficile à avaler que dans le même temps, les assureurs se font de plus en plus rares sur le marché des collectivités.

Car c’est bien là que le bât blesse. Jugeant ce segment « peu rentable », de nombreux acteurs du secteur ont fait le choix de déserter le navire ou de se montrer extrêmement sélectifs. Résultat, seules quelques compagnies comme Groupama ou la SMACL restent positionnées, avec à la clé une concentration du marché pointée du doigt par l’AMF comme l’un des facteurs aggravants de la crise.

Un marché de niche délaissé

Il faut dire que l’assurance des collectivités représente un marché de niche, pesant à peine 1,5 à 2% du chiffre d’affaires global du secteur selon les estimations. Un poids plume qui n’incite guère les compagnies à se bousculer au portillon, surtout face à la hausse continue des sinistres à indemniser, qu’il s’agisse de catastrophes naturelles, d’actes de vandalisme ou de cyberattaques.

Dans ce contexte, les appels d’offres lancés par les communes pour tenter de s’assurer à des tarifs raisonnables se heurtent souvent à une fin de non-recevoir. Quand les assureurs daignent y répondre, c’est la douche froide, avec des primes et des franchises faramineuses qui placent les contrats hors de portée des budgets municipaux.

Le casse-tête des franchises

Car au-delà de l’envolée des tarifs, c’est aussi le montant des franchises qui pose problème. Pour limiter leur exposition, les assureurs tendent à les fixer à des niveaux stratosphériques, vidant de son sens le principe même d’assurance. Un exemple parlant avec la ville de Mâcon, touchée récemment par des violences urbaines, dont le contrat prévoit une franchise de deux millions d’euros par sinistre, quand le montant des dégâts est estimé à un million d’euros.

Comment mener à bien ses missions de service public si on est dans l’incapacité de réparer ou reconstruire des équipements endommagés ? s’insurge David Lisnard, président de l’AMF.

Des pistes de solutions ignorées

Face à cette crise qui s’envenime, l’AMF dénonce également l’inertie des pouvoirs publics. L’association regrette notamment que les 25 mesures préconisées par une mission gouvernementale en septembre dernier soient restées lettre morte. Des propositions concrètes pourtant, comme le fait de sécuriser juridiquement le recours à la négociation dans les marchés publics d’assurance, ou encore la création d’un régime d’indemnisation des dommages exceptionnels type émeutes, sur le modèle de la garantie des catastrophes naturelles.

Sans réponse rapide et adaptée des autorités, c’est la capacité même des collectivités à remplir leurs missions de service public qui pourrait être remise en cause, alerte l’AMF. Un risque d’autant plus prégnant dans un contexte tendu, entre violences urbaines et événements climatiques extrêmes. De quoi donner des sueurs froides aux élus locaux, pris en étau entre l’impérieuse nécessité de protéger le patrimoine communal et l’impossibilité de payer le prix fort exigé par les assureurs. La quadrature du cercle.

Un appel à l’aide pressant

En attendant des jours meilleurs, certaines communes tentent tant bien que mal de trouver des parades, quitte parfois à jouer la carte de l’auto-assurance. D’autres misent sur la prévention, en renforçant la sécurité de leurs bâtiments et équipements. Mais au final, toutes en appellent à une prise de conscience au plus haut niveau de l’Etat.

L’heure n’est plus au constat mais à l’action. Il y a urgence à trouver des solutions pérennes et équilibrées, avant que la situation ne devienne totalement intenable, martèle l’AMF.

Reste à savoir si cet énième appel à l’aide sera entendu. En attendant, le bal des communes en quête d’assureurs acceptant de les couvrir à des conditions raisonnables se poursuit. Un jeu de chaises musicales de plus en plus périlleux, où les perdants se comptent déjà par dizaines. Et si rien ne change, ils pourraient bien se transformer en légion dans les mois à venir. Le compte à rebours est lancé.

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