C’est un procès qui s’annonçait explosif mais qui a tourné court, du moins pour l’instant. Ce mardi matin, la justice béninoise devait juger deux anciens proches du président Patrice Talon, accusés de complot contre l’autorité de l’Etat. Mais après une brève ouverture d’audience, le procès a été reporté à mercredi, dans un climat de vives tensions.
Sur le banc des accusés, deux personnalités de premier plan : Olivier Boko, influent homme d’affaires et ami intime de longue date du chef de l’Etat, et Oswald Homéky, ancien ministre des sports. Arrêtés fin septembre, ils sont poursuivis, avec trois autres personnes, pour « complot contre l’autorité de l’Etat, corruption d’agent public, et faux certificat ».
Mais dès l’ouverture du procès, la défense a dénoncé une composition irrégulière du tribunal, avec seulement trois juges au lieu des cinq habituellement requis. « La loi permet, lorsqu’on n’a pas suffisamment de magistrats, de statuer à trois juges », a pourtant soutenu le Procureur spécial.
Avocats en colère, accusés furieux
Scandalisés, les avocats de la défense se sont tous dessaisis du dossier en guise de protestation. La cour a alors demandé aux accusés de trouver de nouveaux conseils d’ici mercredi, déclenchant la colère d’Olivier Boko :
Il faut du temps pour que les avocats prennent connaissance du dossier. Autant me condamner en même temps… Ce délai n’est pas raisonnable.
L’ancien bâtonnier du Burkina Faso, Baadhio Issouf, en charge de la défense de MM. Boko et Homéky, a dénoncé quant à lui auprès de l’AFP des « irrégularités très graves » et déploré les conditions de détention de ses clients « enfermés 24 heures sur 24 sans possibilité de sortie ».
Rivalité politique en toile de fond
Selon des observateurs, ce procès à fort enjeu politique pourrait être lié aux ambitions électorales d’Olivier Boko. Ce dernier aurait en effet commencé ces derniers mois à afficher ses propres aspirations présidentielles pour 2026, avec le soutien d’Oswald Homéky. Une perspective qui aurait déplu au président Patrice Talon, au pouvoir depuis 2016 et qui arrivera alors au terme de son second mandat, le maximum autorisé par la Constitution béninoise.
Mais pour l’heure, c’est la guerre des procédures et des principes qui occupe le devant de la scène judiciaire, dans un pays régulièrement pointé du doigt ces dernières années pour la dégradation de son climat démocratique. L’issue de ce procès sous haute tension, dans les prochains jours, sera scrutée de près par tous ceux qui s’inquiètent d’un possible tournant autoritaire au Bénin.